Hélène Salette, directrice générale du SIDIIEF : « Les infirmiers doivent apprendre à valoriser par eux-mêmes leur expertise »

Association représentative de la profession infirmière à l’international, le Secrétariat international des infirmières et infirmiers de l’espace francophone (SIDIIEF) est une organisation sans but lucratif, qui mobilise un réseau mondial infirmier francophone. Quelles sont ses actions ? Le point avec Hélène Salette, sa directrice générale.

Hélène Salette, présidente du SIDIIEF

Hélène Salette, présidente du SIDIIEF. © DR

Le rôle du Sidiief est de valoriser la profession infirmière. De quelle manière ? 

Notre mandat est de faire connaître les innovations infirmières, de valoriser le savoir infirmier francophone.

Nous avons aussi pour mission de proposer des solutions infirmières aux grands enjeux de santé, transversaux aux pays francophones.

Nous sommes pro-actifs, nous avons par exemple produit des prises de position sur le rôle infirmier en santé environnementale, dans la vaccination ou encore dans la prévention et le contrôle des infections.

Pour nous inspirer et nous positionner, nous sollicitons les grands acteurs de tous les pays francophones afin de partager leurs expériences sur les pratiques innovantes, sur ce qui fonctionne dans leur pays.

Comme nous sommes un réseau, nos membres nous font part de leurs problématiques vécues et nous travaillons sur ces sujets. Nous nous intéressons aux dossiers qui concernent l’ensemble de la profession.

Puis, avec un comité d’experts, nous nous réunissons pour proposer des solutions. Par ailleurs, comme les infirmières sont prises au quotidien dans leur travail et disposent de peu de temps pour assurer une veille stratégique sur tous les grands enjeux de santé, nous remplissons ce rôle pour elles.

Nous n’avons pas de racine dans tous les pays. Nous ne sommes pas des ″influenceurs″ mais nous avons des membres qui le sont. Nous leur relayons nos positions, qui leur servent d’appui à leur démarche et dans leurs actions.

Pourquoi cette importance de se regrouper ? 

Au début du 21e siècle, nous avons constaté le peu de place laissé au savoir infirmier en français.

Tout devait être traduit en anglais pour avoir accès aux connaissances dans notre domaine. Nous avons donc eu cette volonté de nous regrouper pour échanger d’un point de vue culturel et professionnel.

Il s’agit d’un levier important pour la profession. Par exemple, pendant la crise sanitaire de la Covid-19, de nombreux médecins ont été interviewés, mais jamais des infirmières qui, employées de l’Etat, d’une structure, du système de santé, ne prennent pas cette liberté de parole.

Un organisme comme le Sidiief prend cette liberté, en se basant sur un contenu solide et en français, ce qui apporte une crédibilité à notre expertise professionnelle.

Avec le temps, nous sommes devenus un levier d’autonomie politique pour la profession. Nous n’attendons pas qu’on nous donne la parole, nous la prenons. Et il faut le faire car aujourd’hui, la population apprécie le rôle des infirmières, mais elles sont vues comme des anges. Peu de personnes connaissent notre expertise et nos compétences.

Cette année a été marquée par la crise sanitaire mondiale et, dans ce cadre, la forte mobilisation de la profession infirmière. Trouvez-vous que la profession a été mise en avant à sa juste valeur eu égard à sa forte implication ? 

La population nous a beaucoup appuyées et appréciées mais souvent, on parle des infirmières sous l’angle de la compassion, du soutien et non comme des leaders qui ont géré le changement et permis des interventions pertinentes.

Pour changer la donne, il faut que la profession prenne conscience de ses compétences et soit capable de mettre des mots dessus. Les directrices de soins par exemple, doivent prendre cette liberté de parole comme les médecins.

C’est d’ailleurs pour cela que nous nous considérons comme catalyseur de progrès. Les infirmières n’ont pas été socialisées à mettre des mots sur leurs compétences et à prendre leur place dans le système de santé. Elles doivent aujourd’hui s’organiser politiquement.

Les formateurs ont d’ailleurs un rôle fondamental à jouer pour apprendre aux infirmières à avoir de l’assurance, pour leur apprendre leur rôle social et imposer leur savoir.

Si les infirmières ne font que revendiquer, mettre en avant leur épuisement, leur envie d’arrêter leur métier, nous ne serons jamais prises au sérieux, et il nous sera difficile d’attirer les jeunes recrues.

Il faut davantage parler de notre rôle en santé publique et dans la gestion des grandes campagnes sanitaires. Le message que nous souhaitons faire passer : « Apprenons nous-mêmes à valoriser notre expertise et nos compétences, amenons l’image que nous souhaitons que la société ait de nous. »

Le rôle du Sidiief est justement de valoriser cette expertise et de permettre aux infirmières d’influencer la vision que la population a de la profession.

Propos recueillis par Laure Martin

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Dans notre série de présentations des différentes organisations infirmières, lire aussi : 

Association pour l’innovation en santé : « la rencontre humaine est le moteur de notre association » (août 2020)

Avec la FNIR, les infirmiers de réanimation se fédèrent (août 2020)

Association française des infirmier(e)s de thérapie cellulaire hématologie, oncologie et radiothérapie : « Notre objectif est d’alimenter la réflexion » (juillet 2020)

Association francophone des infirmiers du diabète : « Les compétences des infirmiers sont sous exploitées » (juin 2020)

ANPDE : « Les enfants ont des besoins spécifiques qui requièrent une formation dédiée » (mars 2020)

ANFIPA : « Aujourd’hui, nous nous mettons en ordre de marche » (février 2020)

Association de recherche en soins infirmiers : « Notre objectif est de sensibiliser les infirmiers à développer la recherche » (janvier 2020)

Infirmiers de santé au travail : « Notre montée en compétence requiert une formation dédiée »(décembre 2019)

Brigitte Lecointre, présidente de l’ANFIIDE : « Nous devons créer un leadership infirmier » (novembre 2019)

Instituts de formation paramédicaux : "Nous voulons faire évoluer le rôle de directeur". Entretien avec Florence Girard, présidente de l’Association nationale des directeurs d’école paramédicale (ANdEP). (Sept 2019)

CEFIEC : "Notre finalité est de promouvoir la formation en sciences infirmières" (Octobre 2019)

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