Infirmiers de santé au travail : « Notre montée en compétence requiert une formation dédiée »

Quatrième acte de notre série d’articles sur les associations, cette fois-ci, nous donnons la parole à  Nadine Rauch, présidente du Groupement des infirmiers de santé au travail (GIT), qui rassemble environ 300 adhérents.

Infirmiers de santé au travail Notre montée en compétence requiert une formation dédiée 

Nadine Rauch, présidente du GIT. © DR

Comment est né le Groupement des infirmiers de santé au travail ?

Le GIT est une association loi 1901 créée en 1987 par des infirmières de santé au travail (IST) qui se sentaient isolées les unes des autres. Leurs objectifs étaient de se connaître pour rompre leur isolement, de se faire connaître en se fédérant et de mutualiser leurs connaissances des entreprises.

Et aujourd’hui ?

Avec ses trente années d’expérience, l’association a pour but aujourd’hui de promouvoir la profession. Nous essayons de participer à toutes les mesures et les décisions prises nous concernant. Notre métier a beaucoup évolué ces dernières années.

Auparavant, les médecins de santé au travail travaillaient uniquement en binôme avec une secrétaire dans les services interentreprises. Puis, face à la pénurie de médecins, il a fallu trouver une solution pour continuer à suivre les salariés travaillant dans les entreprises.

Une première réforme en 2012 a introduit d’autres professionnels de santé à leur côté, notamment les IST. Auparavant, ils ne pouvaient être embauchés que par des entreprises.

Depuis cette réforme, ils peuvent intégrer des services interentreprises de santé au travail et mettre en place des entretiens santé – travail infirmier (ESTI) qui ont pour but de recueillir des informations relatives à l’état de santé physique et psychique du salarié en rapport avec le travail, de recenser les expositions aux risques professionnels, et d’alerter le médecin, si besoin.

Cette réforme a permis de développer un travail avec le médecin, qui anime et coordonne l’équipe pluriprofessionnelle composée d’infirmiers, d’Intervenants en prévention des risques professionnels (IPRP), de psychologues du travail, d’assistantes sociales et de secrétaires qui sont devenues des assistantes de santé au travail.

Une autre réforme en 2016 a élargi la réalisation de la visite d’information et de prévention (VIP) aux IST. Ce sont les visites effectuées dans les trois mois maximum suivant l’embauche pour échanger avec le salarié sur son état de santé. Nous avons donc bénéficié d’une montée en compétences. Nous voulons savoir jusqu’où on veut nous amener et surtout bénéficier d’une formation complémentaire spécifique, quel que soit le lieu d’exercice de l’IST : entreprise, service inter-entreprise de santé au travail, fonction publique.

Vous parlez d’une formation complémentaire au diplôme d’Infirmier ?

Effectivement car du jour au lendemain, nous avons été mis sur le devant de la scène. Il faut s’assurer que nous ayons bien les compétences face aux attentes.

En 2012, lorsque la réforme a modifié nos missions, les IST ne disposaient pas forcément de toutes les compétences nécessaires pour assurer les ESTI. La loi précise que les services inter-entreprises de santé au travail ou les entreprises qui emploient directement des infirmiers, doivent les inscrire à une formation dans l’année qui suit l’embauche.

Mais le texte ne précise pas le type de formation, ni sa durée : c’est là où le bât blesse. Le GIT souhaite qu’il soit inscrit dans la loi la nécessité de bénéficier d’une formation diplômante universitaire, d’un diplôme universitaire reconnu par l’enseignement supérieur, pour pouvoir ainsi assurer un suivi de qualité. Ces formations existent déjà à l’université Paris Descartes à Paris 13, Lille ou encore Strasbourg. 

Pourquoi ces formations n’ont-elles pas lieu ?

Une formation universitaire oblige l’entreprise à dégager du temps pour l’infirmier sur une année universitaire. D’autres formations existent, de deux jours à trois semaines. Elles coûtent moins cher pour l’entreprise mais elles ne sont pas suffisantes pour une qualité de prise en charge des salariés.

Ceci peut d’autant plus influer l’avenir de l’infirmière. Aujourd’hui, lorsqu’elles débutent en service de santé inter-entreprises, les IST sont encadrées par des collègues mais cela ne suffit pas. De même qu’il n’est pas envisageable qu’elles soient directement embauchées dans une entreprise, où elles exerceront seules, sans avoir eu une expérience en amont.

Nous conseillons de faire des missions d’intérim dans des secteurs moins difficiles comme dans le tertiaire ou dans un service inter-entreprise pour ne pas commencer leur carrière seules.

Avez-vous d’autres revendications ?

Tout à fait, concernant notre statut. Le médecin du travail possède le statut de salarié protégé. Ce n’est pas notre cas. Les IST sont soumises à la confidentialité mais dans certains cas, nous pouvons nous retrouver dans des situations complexes.

Nous voudrions bénéficier du statut de salarié protégé pour travailler dans des conditions optimales et sans avoir à craindre la pression de la part de l’employeur. Nous échangeons avec l’Ordre national des infirmiers sur le sujet. Nous voudrions aussi que notre spécificité soit reconnue comme une spécialité à part entière.

Propos recueillis par Laure Martin

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Pour aller plus loin :
Formation pour les infirmiers de santé au travail

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