Le deuxième étage du Centre hospitalier intercommunal (CHI) de Villeneuve- Saint-Georges (Essonne) abrite une aile dédiée aux grossesses à risque et aux suites de couches pathologiques. Infirmières, sages-femmes et auxiliaires de puériculture y oeuvrent de concert pour accompagner les nouveaux parents, ceux en devenir, et leurs bébés.
Il est 8 heures. Les transmissions entre l’équipe de nuit et celle de jour pour la prise en charge des suites de couches pathologiques (18 lits) ont eu lieu il y a quelques minutes. Maintenant, c’est au tour de la sagefemme de nuit de débuter les transmissions concernant les patientes hospitalisées pour une grossesse à risque (8 lits), à sa consoeur, à l’infirmière et l’étudiante sagefemme de l’équipe de jour. Une fois les informations communiquées, Candice, l’infirmière, débute la prise en charge. Dans la chambre 75, une future maman est prise en charge pour prééclampsie et prend un traitement anti hypertenseur le matin et le soir. Elle présente aussi un diabète gestationnel. « Comment s’est passée votre nuit, lui demande Candice. Vous n’avez pas eu de perte de sang, de liquide ? » « La nuit a été difficile, lui répond la patiente allongée et fatiguée. J’ai eu des picotements dans le bas du dos et j’ai bien senti la petite bouger. » Le traitement régule bien sa tension. « Vous devriez pouvoir bientôt rentrer chez vous si le médecin l’autorise », lui annonce l’infirmière.
Cet article a été publié dans le n°53 d’ActuSoins magazine (juin 2024).
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Des grossesses pathologiques sous haute surveillance
Dans ce secteur, les futures mamans sont hospitalisées pour des risques variables : grossesse gémellaire, menace d’accouchement prématuré, retard de croissance du foetus, prééclampsie, hypertension, problèmes rénaux, syndrome d’hémolyse, de cytolyse hépatique et thrombopénie, diabète gestationnel non stabilisé, diabète antérieur. Au quotidien, le rôle de l’infirmière consiste à mesurer les constantes vitales des futures mères, à leur distribuer ou à leur administrer les traitements, ainsi qu’à réaliser différents soins tels que des glycémies capillaires pour le contrôle du diabète gestationnel, et les prises de sang. De plus, les infirmières interrogent les patientes sur leur ressenti concernant leur grossesse. Au moindre problème, l’équipe est prête à intervenir.
Dans la chambre d’à côté, Candice prend en charge une autre patiente, dont le futur bébé affiche un retard de croissance. Ce type de retard s’explique par des raisons variées : les âges « extrêmes » des futures mères, la consommation de tabac, un contexte de violences, des pathologies utérines, génétiques ou encore de l’hypertension. « Toutes les problématiques jouant sur la vascularisation du placenta peuvent entraîner un retard de croissance du foetus », explique Mathilde Allain, sage femme. Après avoir évalué l’état de santé de la patiente, Candice poursuit ses visites auprès d’une future maman atteinte d’un retard mental, vivant dans un contexte de violences intrafamiliales. « L’équipe a décidé, lors du staff pluridisciplinaire, d’effectuer un signalement au procureur de la République, rapporte Candice. Dans ce type de situation, nous devons nous interroger sur l’aptitude de la future maman ou de sa famille à prendre en charge le nouveau- né. » « Le staff médico-psycho-social est indispensable pour assurer le lien avec les Protections maternelles et infantiles (PMI), l’aide sociale à l’enfance et les centres de soins lorsque des décisions doivent être prises », ajoute Nadine Kizilcik, sage-femme coordinatrice. Si la décision est prise collégialement, ce sont les sages-femmes et les médecins qui détiennent la compétence d’effectuer des signalements au procureur de la République.
Des formations complémentaires
Dans ce service, les infirmières et les sages-femmes sont également amenées à suivre les patientes pour des fausses couches tardives ou en raison d’un décès du foetus in utero. Une prise en charge complexe du deuil périnatal à laquelle Valérie Palmeira, infirmière depuis bientôt 30 ans au sein du pôle mère-enfant du CHI, s’est formée, tout comme Mathilde Allain. « C’est nécessaire pour accompagner au mieux les mamans dans le processus de deuil, insiste Valérie Palmeira. Chaque patiente est différente. Dans le service, nous travaillons avec une psychologue et nous proposons aussi des groupes de parole à distance, pour permettre des échanges entre mamans ayant traversé les mêmes difficultés. » L’équipe doit également s’adapter à la diversité culturelle des patientes du territoire. « J’ai suivi une formation sur cette question, rapporte Valérie Palmeira. Mais j’apprends bien entendu beaucoup au contact de chacune d’elles. » C’est notamment pour ce lien qu’elle noue avec les patientes qu’elle apprécie le suivi de celles présentant des grossesses pathologiques. En plus de leur rôle de surveillance et d’éducation thérapeutique, « nous construisons une relation d’échange et de confiance avec elles, tout en travaillant en équipe avec l’ensemble des professionnels du service », confie l’infirmière.
Conseils personnalisés
Ce matin, dans l’autre couloir du service, en attendant que les nouvelles mères aient terminé leur petit-déjeuner, Valérie Palmeira se répartit, avec Maria Portela Familiar, également infirmière, et Mathilde Allain, le suivi des patientes en suites de couches. Après l’accouchement, les sages-femmes jouent un rôle plus administratif auprès des mamans. « Nous discutons de leur vaccination, de la déclaration de naissance de l’enfant, de la contraception ainsi que des futurs rendez-vous médicaux », énumère Mathilde Allain. De leur côté, les infirmières assurent une surveillance globale, veillent à la bonne observance des traitements, vérifient et réalisent les pansements, tout en contrôlant la bonne cicatrisation des épisiotomies. Maria Portela Familiar et Mathilde Allain doivent à présent prendre en charge une patiente hospitalisée en raison d’une hémorragie lors de son accouchement, dont la sortie est programmée pour aujourd’hui. « Elle a pratiquement perdu deux litres de sang et a dû être transfusée », explique Mathilde Allain.
Outre l’examen du ventre et de ses points de suture, l’infirmière la questionne sur son ressenti. « J’ai des douleurs lorsque j’allaite, en raison de l’oedème qui s’est formé dans mon ventre à la suite de mon hémorragie », confie la patiente. Maria Portela Familiar lui dispense des conseils pour réduire ses douleurs, notamment celui d’appliquer des feuilles de choux – un anti-inflammatoire naturel – sur sa poitrine. L’infirmière, qui a suivi une formation de conseillère en lactation (formation certifiante IBCLC), est également disponible pour accompagner les nouvelles mamans ayant fait le choix d’allaiter leur bébé. C’est le cas d’une autre patiente, hospitalisée post-accouchement depuis quatre jours à la suite d’une césarienne. Pour le moment, sa sortie n’est pas programmée car son petit Julien* rencontre des difficultés pour s’alimenter. « Puisque vous souhaitez allaiter, je vous conseille de le porter le plus souvent possible, pour le stimuler, lui suggère Maria Portela Familiar. Vous devez aussi apprendre à repérer les signes de faim pour éviter d’attendre qu’il pleure pour l’allaiter. Dès qu’il commence à mettre sa main dans sa bouche, c’est le bon moment. »
Accompagnement renforcé des nouveaux parents
Julien est également pris en charge au sein de l’unité Kangourou (six berceaux), rattachée au service de néonatologie. « Nous avons ouvert cette unité en 2013, pour éviter aux mamans d’être séparées de leur bébé lorsqu’il a besoin de soins », confie Nathalie Gillonnier, infirmière puéricultrice, exerçant au sein du pôle mère-enfant depuis une trentaine d’années. C’est le cas pour les nouveau-nés présentant des problèmes de poids, des difficultés pour s’alimenter, ayant besoin d’antibiotiques ou devant être placés dans un appareil de photothérapie pour traiter leur ictère. « Nous ne prenons pas en charge les bébés de moins de 35 semaines, ni les enfants trop techniqués », précise-t-elle. De son côté, le petit Julien, pesé avant sa tétée, ne parvient toujours pas à prendre de poids. « Nous allons trouver une autre solution », rassure Nathalie Gillonnier. Et d’expliquer : « Pour ne pas rompre son apprentissage de la succion puisque sa maman souhaite allaiter, nous allons faire ce que nous appelons un “doigt-paille”. » L’infirmière prend la bouteille contenant le lait maternel que sa maman a tiré, y place une sonde et accroche l’extrémité du tube sur son auriculaire avec du ruban adhésif.
Elle met alors son doigt dans la bouche du nouveau-né qui, instinctivement, reproduit le mouvement de succion. « Demain, l’ostéopathe passe dans le service, je vais vous faire un bon pour qu’il vienne vous voir car la langue de Julien n’est pas encore suffisamment enroulée pour qu’il puisse téter correctement », observe l’infirmière puéricultrice. À cette annonce, la maman s’effondre. Elle espérait pouvoir sortir aujourd’hui et comprend que ça ne sera pas le cas. « Les larmes coulent souvent ici, car les parents se construisent toute une représentation autour de l’accouchement et des suites de couches. Ce n’est pas évident lorsque le projet ne se déroule pas comme prévu », reconnaît Nathalie Gillonnier. L’équipe est présente pour les accompagner. Aujourd’hui, « nous avons aussi de plus en plus de demandes pour l’accompagnement des mamans fragiles, surtout depuis la mise en place du staff médico-psycho-social, qui a accru les identifications et les orientations », indique-t-elle. Et d’ajouter : « Nous menons un important travail d’observation sur la construction des liens parents-enfants. Nous les accompagnons à identifier les besoins de leur enfant et à comprendre son développement psychomoteur afin que tous deviennent acteurs des soins. » « Les équipes assurent un suivi et construisent un lien particulièrement bienveillant avec les patientes et les nouvelles mamans. C’est indispensable, car chacune d’elle se souviendra toujours de son accouchement », conclut Aurore Reigner, l’infirmière coordinatrice.
Laure MARTIN
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Cet article a été publié dans ActuSoins Magazine
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