Brigitte Lecointre, présidente de l’ANFIIDE : « Nous devons créer un leadership infirmier »

ActuSoins poursuit sa série sur les organisations infirmières et donne ce mois-ci la parole à Brigitte Lecointre, présidente depuis dix ans, de la plus ancienne association infirmière, l’Association nationale française des infirmiers et infirmières diplômés et étudiants (Anfiide), qui fêtera ses 100 ans en 2024. 

Brigitte Lecointre, présidente de l'ANFIIDE

Brigitte Lecointre, présidente de l'ANFIIDE. © DR

Dans quel contexte l’Anfiide a-t-elle été fondée ?

L’Anfiide est la plus ancienne association infirmière, créée en 1924 par Léonie Chaptal, infirmière, dans un esprit de fédérer, de promouvoir, de défendre les infirmières et de mettre les soins infirmiers au cœur des politiques de santé ainsi que de l’actualité.

C’est d’ailleurs le fil conducteur de l’Anfiide : mettre les soins infirmiers au centre de l’évolution du concept de santé. L’association a cette particularité de travailler pour la promotion d’une profession mais aussi pour l’amélioration des soins de santé pour les patients avec des programmes d’éducation à la santé.

A titre d’exemple, nous allons signer en décembre un partenariat avec l’Université des patients. Nous avons compris que dans les années à venir, une association a toute sa place dans le paysage sanitaire mais elle doit s’ouvrir.

L’Anfiide  est reconnue d’utilité publique (RUP), nous devons donc toujours être dans le cœur des fondements de notre association.

Mais nous souhaitons tout de même réactualiser nos statuts, introduire une notion de réflexion, de modernité sur le devenir d’une association qui a bientôt 100 ans, par rapport à l’évolution de notre système de santé.

Quels sont vos moyens d’action ?

Nous répondons à toutes les sollicitations des instances. Par exemple, j’ai récemment eu un rendez-vous avec la déléguée de la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains (MIPROF).

Je m’étais en effet étonnée dans un courrier adressé à la ministre de la Santé, de l’absence de représentation infirmière lors du Grenelle des violences conjugales. J’ai alors été auditionnée.

Dans le cadre de la création des infirmières de pratique avancée (IPA), nous avons été appelés à participer au groupe de travail de la Direction générale de l’offre de soins (DGOS).

Nous organisons d’ailleurs cette année les troisièmes journées des IPA. L’Anfiide a été un réel promoteur de la pratique avancée en France. En 2007 déjà, nous avions crée le groupe de travail Réseau de pratique avancée en soins infirmiers (REPASI).

Nous écrivons par ailleurs dans des revues, nous organisons des colloques et des manifestations, nous sommes membres du Collège des infirmiers français. Nous cherchons à être des influenceurs.

Mais tous les administrateurs de l’Anfiide sont bénévoles, nous avons tous des activités cliniques et/ou pédagogiques en parallèle. Nous essayons néanmoins d’être les plus réactifs possibles à l’actualité et de taper aux portes lorsque nous ne sommes pas conviés à des réflexions.

Nous essayons enfin d’être davantage présents sur les réseaux sociaux. Notre gros problème, c’est le manque de temps.

Nous nous posons la question de revoir notre modèle économique et réfléchissons à éventuellement proposer des formations, des colloques, de travailler sur des partenariats permettant un retour d’investissement, car avec les seuls adhérents, il est difficile de vivre.

Quelle est l’actualité de l’association ?

Nous voulons travailler sur les problématiques de santé publique et la première sur laquelle nous nous sommes engagés est le repérage des violences faites aux femmes.

Nous avons d’ailleurs organisé une journée sur la santé de la femme. Nous sommes engagés dans cette thématique d’abord parce que 80 % de la profession infirmière est féminine mais aussi parce que le métier évolue en même temps que le droit des femmes. Il est donc important selon nous de mettre un focus sur ce thème.

J’aimerais par ailleurs que nous parvenions à réunir autour de la table les responsables ordinaux, syndicaux et associatifs car d’ici 2040 nous serons 880 000 infirmiers et pourtant, nous n’avons toujours pas de conseiller direct auprès de la ministre.

Cela s’explique peut être parce que nous  n’offrons pas une vision de cohésion d’ensemble.

Nous ne pouvons pas continuer à fonctionner en ordre dispersé et n’offrir que des réponses partielles à des problématiques qui pourtant nous rassemblent. Même pour les jeunes étudiants, c’est confus. C’est pourtant vers eux que nous devons nous tourner.

Je pense que nous devons mener une campagne active pour définir un réel leadership et déterminer ensemble une ligne directrice pour la profession. Nous devons créer une passerelle entre toutes ces organisations qui constituent la communauté infirmière.

Notre troisième objectif, à plus long terme, est de créer un think tank afin de réfléchir ensemble, proposer des réflexions sur des sujets qui s’attachent à la réalité mais aussi dans une démarche prospective. Nous parlons beaucoup d’e-santé, d’intelligence artificielle, de télémédecine.

Comment pouvons-nous être dans cette ère tout en gardant une certaine distance vis-à-vis d’une réflexion commune ? Lorsque je relis les rapports moraux des présidentes de l’Anfiide de nombreuses années en arrière, je me rends compte que les problématiques évoquées sont les mêmes.

Tant que nous n’aurons pas compris ou admis que nous devons nous engager sur la voie d’une unité plus large, nous avons du souci à nous faire surtout dans le contexte actuel mouvant sur les usages et les attentes des patients.

Propos recueillis par Laure Martin

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