Aujourd’hui, seules 44 personnes sont qualifiées pour la fonction de maître de conférences en sciences infirmières. Et parmi elles, seulement 12 sont titulaires dans une université. C’est peu mais plusieurs facteurs expliquent cette situation. Tout d’abord, la filière est encore très jeune (2019). Les postes de maîtres de conférences en sciences infirmières ne sont donc pas encore très nombreux. De plus, le parcours pour parvenir à y accéder est long.
Les candidates et candidats à un poste de maître de conférences en sciences infirmières doivent avoir obtenu de la section « sciences infirmières » au conseil national des universités (la « CNU 92 ») une qualification qui porte sur plusieurs critères. Ils doivent avoir suivi un doctorat de sciences – pas forcement infirmières, ce qui prend au moins trois ans, et que leur thèse traite de sciences infirmières, indique Rémi Gagnayre, président de la CNU 92.
Ils et elles doivent aussi présenter un rapport qui montre leur investissement dans la discipline et avoir publié au moins deux articles dans des revues spécialisées en sciences infirmières. Enfin, les candidats doivent avoir une charge d’enseignement en sciences infirmières, au niveau licence ou en master. Et avoir un poste en vue.
Obtenir la qualification
En revanche, rien n’oblige les futurs maîtres de conférences, techniquement, à être infirmiers de profession, même si, de fait, tous le sont actuellement. À l’inverse, des IDE peuvent être maîtres de conférences dans d’autres disciplines, comme les sciences de l’éducation ou la sociologie…
Encore assez peu d’infirmières et infirmiers réunissent les conditions nécessaires à la qualification. « Le vivier de candidats n’est pas très important quantitativement », souligne le président de la CNU 92. Mais « pour la prochaine campagne de qualification, qui s’achèvera en mars, 26 candidats se présentent et cela va augmenter », ajoute-t-il.
Lors des campagnes précédentes, environ 40% des candidats n’ont pas pu être qualifiés, en général parce qu’ils n’ont pas encore eu le temps de publier les articles nécessaires, parce que leur investissement en enseignement n’est pas encore suffisant ou encore parce qu’ils n’ont pas encore trouvé de laboratoire qui propose un poste.
La création de postes de maîtres de conférences dans la filière très récente n’est d’ailleurs pas très fréquente. Tout d’abord, les postes existants n’appartiennent pas à des laboratoires de recherche en sciences infirmières…pour la bonne et simple raison qu’il n’en existe pas encore, que ce soit à l’université ou en partenariat avec l’Inserm. Et il n’existe pas encore de laboratoire aussi parce que les maîtres de conférences en sciences infirmières ne sont pas encore très nombreux. Les postes sont donc créés au sein de laboratoires d’autres disciplines.
Défaut d’attractivité
Devenir maître de conférences est quasi systématiquement synonyme de baisse de revenu importante – voire de déménagement ou de déplacements coûteux.
Les postes se révèlent la plupart du temps peu attractifs : à la différence des étudiants ayant enchaîné une licence, un master et un doctorat, les IDE intéressés par ce type d’évolution professionnelle ont déjà une carrière avancée et une implantation personnelle et familiale dans un territoire. Même qualifiés, certains renoncent à postuler.
Une solution à ce défaut d’attractivité consisterait à permettre la « bi-appartenance » des maîtres de conférences à l’université et à leur cadre professionnel. Elles et ils pourraient ainsi conserver une part de leur activité sur le terrain, utile pour leurs travaux de recherche, tout en déployant leur activité universitaire, et donc sans perte de revenu.
Cette bi-appartenance est réclamée de toute part : « c’est une évidence pour tout le monde, confirme Rémi Gagnayre. Quand elle sera reconnue, il y aura un appel d’air » vers ces carrières universitaires, prédit-il. Selon lui, l’activité professionnelle maintenue n’aurait d’ailleurs pas nécessairement besoin d’être liée à l’hôpital. Les IDE intéressés qui travaillent dans des centres de santé ou des structures comme les ARS devraient être concernés.
Pour le président de la CNU 92, « la création d’une discipline universitaire est une opportunité incroyable, rarissime » et les IDE qui souhaitent embrasser la voie universitaire pour enrichir le champ disciplinaire des sciences infirmières « ne doivent pas hésiter ! ».
La filière promet d’être dynamique. Le Collège français des enseignants-chercheurs universitaires en sciences infirmières (CoFECSI) a été créé en septembre dernier.
Géraldine Langlois
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