
Tant redoutés par les patients, les nausées et vomissements (N/V) ont des causes multiples. Relativement bénins et majoritairement associés à une affection virale, les vomissements sont une réaction naturelle du corps à une menace et permettent d’évacuer l’agent pathogène mis en cause. Cependant, il est important d’être vigilant à certains signes de gravité et le risque de complications est loin d’être nul.
Sommaire
ToggleNausée et vomissement : définition et mécanismes
La nausée se manifeste par une sensation de dégoût insurmontable ou de « mal au cœur ». Cette sensation incommodante est souvent accompagnée d’une perte d’appétit, de fatigue ou de malaise.
Le vomissement est une expérience très désagréable due à l’évacuation du contenu gastrique par la bouche. De nombreux facteurs peuvent contribuer à ce phénomène. Le plus souvent, il est provoqué par un étirement extrême de l’estomac ou du duodénum ou par la présence dans ces organes, d’agents irritants (toxines bactériennes, agents viraux, quantité excessive d’alcool, aliments trop épicés ou certains médicaments). Les influx sensoriels provenant des zones irritées atteignent le centre de vomissement, situé dans le bulbe rachidien, et un certain nombre de réponses motrices sont déclenchées simultanément.
Dans un premier temps, le réflexe de vomissement provoque une hypersalivation, des nausées intenses accompagnées d’une sensation de malaise extrême et de sueurs. Puis, un mouvement antipéristaltique entraîne le reflux du contenu de l’intestin grêle proximal dans l’estomac. Lorsque le patient est conscient, le réflexe ferme la glotte et bloque les voies aériennes supérieures, empêchant ainsi le bol alimentaire d’envahir la trachée et les bronches.
Les muscles de la paroi abdominale et le diaphragme se contractent fortement et font augmenter la pression intra-abdominale. Le sphincter œsophagien inférieur (cardia) et l’œsophage se relâchent et le palais mou s’élève pour fermer les voies nasales. Le contenu de l’estomac est alors expulsé dans l’œsophage puis le pharynx et sort par la bouche.
Les vomissements sont d’une durée variable : aiguë (inférieure à 7 jours) ou chroniques et les causes sont multiples et variées.
La régurgitation correspond à une remontée involontaire du bol alimentaire de l’estomac ou de l’œsophage vers la bouche, sans effort de vomissement. Elle est principalement due à un défaut de fermeture du sphincter inférieur de l’œsophage (cardia).
Les causes des vomissements aigus
Vomissement : cause infectieuse
Le plus souvent, les vomissements sont dus à une gastro-entérite (d’origine virale ou bactérienne) ou à une intoxication alimentaire (cause évoquée lorsque plusieurs personnes sont atteintes ou si les vomissements surviennent dans un contexte épidémique). Des vomissements en jet, associés à une photophobie et à une hyperthermie peuvent évoquer une méningite (d’origine bactérienne ou virale).
Vomissements liés à l’anesthésie
L’incidence des N/V en post-opératoire (NVPO) est variable et reste le principal effet secondaire décrit par les patients en salle de réveil post interventionnelle (SSPI). La prévention lors de l’induction anesthésique est quasi-systématique et dépend des facteurs de risques et de la stratégie établie lors de la consultation d’anesthésie (score d’Apfel).
Les facteurs de risque dépendent du patient, des médicaments (utilisation de gaz halogénés, de morphinique) et de la chirurgie (ORL, strabisme, chirurgie digestive et gynécologique).
Score d’Apfel
Tout score d’Apfel supérieur à 2 incitera à adapter la stratégie anesthésique et l’administration d’une bithérapie antiémétique (dexaméthasone 8 mg et dropéridol entre 0,6 à 1,25 mg).
Malgré la prévention et en cas de vomissement, la molécule de choix est l’ondansétron (Zophren® 4 mg en intraveineuse lente).
Afin de minimiser le risque de NVPO, il est maintenant recommandé de boire un liquide clair (eau, thé, café sans lait) jusqu’à deux heures avant l’intervention.
Autres causes des vomissements et nausées
Les autres causes sont plus variées : d’origine digestive (appendicite, occlusion intestinale, pancréatite, hépatite, calcul biliaire), alimentaire (abus d’alcool, prise à jeun de café ou thé très fort), liées à un contexte de douleurs très intenses (accouchement, colique néphrétique, infarctus du myocarde, crise migraineuse), d’origine traumatique (particulièrement le traumatisme crânien), ORL (vertige ou mal des transport en cas de problème d’oreille interne) ou dues à une intoxication au monoxyde de carbone.
Ils sont également redoutés lors de la prise de certaines médicaments (chimiothérapie anticancéreuse, certains antibiotiques, la colchicine, les dérivées de l’ergot de seigle ou de la théophylline, la morphine, le nefopam (Acupan®). Parfois les vomissements peuvent être le signe d’un surdosage ou d’une intolérance à certains médicaments (comme la digitaline, la levodopa, la nicotine ou les opiacés).
Les causes des vomissements chroniques
La grossesse est la principale cause de N/V : environ une femme sur deux en souffre, particulièrement pendant le premier trimestre. Les causes sont mal connues et s’expliquent principalement par les modifications hormonales au début de la grossesse (notamment par la production d’hormone chorionique gonadotrope (hCG), et d’œstrogènes en grande quantité). Les N/V s’estompent à la fin du premier trimestre mais certaines femmes vont en souffrir tout au long de la grossesse (hyperémèse gravidique).
Ces symptômes ne présentent aucun risque pour l’enfant ni pour la mère. Cependant, face à une déshydratation associée à une perte de poids trop importante (supérieure à 5 % du poids avant grossesse), une hospitalisation peut être envisagée afin de corriger les troubles hydroélectrolytiques, la déshydratation et les carences nutritionnelles.
Fractionner les repas pour éviter d’avoir la sensation de faim, boire régulièrement en petite quantité, privilégier une alimentation pauvre en graisse ou prendre une gélule de gingembre peuvent aider à atténuer les symptômes. Les autres causes de vomissements chroniques ou réci- divants sont les suivantes : des causes psychologiques (nervosité, stress, trac avant un examen) ou psychiatriques (anorexie mentale, boulimie), certaines chimiothérapies ou les intolérances alimentaires (au lactose par exemple).
Les signes de gravité
Si en plus des vomissements, d’autres signes ou tableaux apparaissent, il est indispensable d’avoir un avis médical plus ou moins rapidement.
Avis médical en extrême urgence |
• Signes de déshydratation (oligo-anurie, soif intense, pli cutané et sécheresse des muqueuses…) • Perte de poids supérieure à 5 % • Autres troubles digestifs (diarrhée, constipation…) • Apparition d’une polypnée • Vomissements en jet, état confusionnel, photophobie, céphalée et hyperthermie (suspicion de méningite) • Vomissements de sang rouge ou noir (hématémèse), ou fécaloïde (suspicion d’occlusion) • Après un trauma crânien (signe d’une hypertension intracrânienne) • Douleur dans la poitrine (suspicion d’IDM) |
Avis dans les 24 heures | • Fortes douleurs accompagnées de fièvre • Lors de la prise de médicament • Si les vomissements ne cèdent pas |
Complications des nausées et vomissements
Elles sont multiples et sont dépendantes de la cause initiale et de l’âge du patient.
Des vomissements excessifs peuvent provoquer une déshydratation avec hypokaliémie et hypochlorémie (particulièrement redoutable chez le jeune enfant ou la personne âgée) et risquent d’affecter gravement l’équilibre électrolytique et acido-basique de l’organisme. En effet, ils entrainent une grande perte d’acide chlorhydrique que l’estomac tente de compenser, ce qui rend le sang alcalin et risque de provoquer des troubles du rythme cardiaque liés à l’hypokaliémie.
D’autres complications peuvent survenir comme la pneumopathie d’inhalation (syndrome de Mendelson) particulièrement chez la personne âgée ou fragilisée.
Enfin, la déchirure du cardia ou la rupture de l’œsophage liées aux efforts de vomissements restent exceptionnels.
Nausées/Vomissements : moyens de prévention et traitements médicamenteux
La première étape est d’identifier la cause.
En dehors du traitement de la cause, des mesures hygiéno-diététiques peuvent aider à soulager comme prendre l’air ou s’allonger, respirer profondément pendant quelques minutes…
Après les vomissements, il est préférable de se réhydrater (boisson prise en petite quantité et fréquemment), de prendre éventuellement un repas léger et de manière graduelle (plutôt froid que chaud en évitant les aliments gras, épicés, l’alcool, le café et le tabac).
Si le patient est hospitalisé, l’infirmier(e) met à disposition un haricot (ou vomibag), des lingettes, un change éventuel ainsi qu’une sonnette à proximité et installe confortablement le patient. Il est aussi nécessaire de quantifier les vomissements (nombre, quantité, nature), de surveiller l’apparition de complications, de tenir informé le médecin, d’appliquer les prescriptions médicales et de surveiller l’efficacité du traitement. Toutes les informations recueillies sont notifiées dans le dossier de soins.
Les traitements médicamenteux antiémétiques sont prescrits en fonction de la pathologie.
Les vomissements bénins ne nécessitent pas de traitement car ils s’arrêtent spontanément dès que l’estomac est vide.
Lorsque les N/V persistent, des antiémétiques peuvent être prescrits et il en existe différentes familles :
Antagoniste de la dopamine |
Dropéridone (Motilium®), Métroclopramide (Primpéran®) Métopimazine (Vogalène®)Risque de troubles neurologiques |
Famille des Sétrons Puissant antiémétique N/V liés à la chimiothérapie et la radiothérapie N/V post-opératoires |
Ondansétron (Zophren®)
Risque d’allongement du QT |
Antihistaminiques Prévention du mal des transport |
Nausicalm® |
Il est indispensable de respecter la posologie, la durée du traitement, les contre-indications et les interactions médicamenteuses.
Conclusion
Face à ces symptômes extrêmement désagréables, il existe aujourd’hui de nombreuses thérapeutiques qui permettent de soulager le patient très rapidement.
Quel que soit l’origine de ces N/V, notre vigilance et notre surveillance infirmière doivent toujours rechercher les signes de gravité permettant une prise en charge optimale et rapide.
Laurence PIQUARD,
IADE Infirmière anesthésiste
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Cet article a été publié dans ActuSoins Magazine
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