Sport sur ordonnance

Sport sur ordonnance

Que ce soit pour mieux vivre un traitement lourd, pour se maintenir en forme ou pour se rééduquer, le sport s’avère être le partenaire idéal des patients. Bien entendu, l’activité physique adaptée (APA) doit être encadrée. Tour d’horizon de quelques initiatives où les infirmières ont un rôle déterminant.
© Caraman/Dreamstime.com
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« Pour les personnes qui ont du diabète, l’activité physique régulière permet de diminuer les doses d’insuline, et elle permet aussi de stabiliser les hypertendus », souligne le Dr Bruno Burel, du Pôle Santé Sport, à Rouen (Haute-Normandie), qui développe une prise en charge autour de l’activité physique pour les patients ayant des problèmes de santé.

L’activité physique permettrait également, chez les femmes atteintes d’un cancer du sein, de mieux supporter le traitement et de diminuer de 50 % le taux de rechute. Mais elle doit bien entendu être adaptée à l’état de chaque patient.

« Le but est de maintenir une activité sportive régulière, souligne le Dr Estelle Salignat, médecin du sport qui a ouvert une consultation « femme et sport » au CHU de Saint Etienne (Rhône-Alpes). Chez la femme, l’activité physique entraîne une baisse des facteurs de risques cardiovasculaires et une réduction des risques d’ostéoporose, limite la prise de poids ou le diabète gestationnel.

« J’ai mis en place cette consultation spécifique afin que les femmes sachent où aller lorsqu’elles veulent reprendre le sport », indique le Dr Salignat. Et d’ajouter : « La consultation a moins d’un an et si elle a du succès, je souhaiterais me mettre en lien avec une infirmière qui fasse l’interrogatoire sur la pratique sportive, l’enquête alimentaire, le bilan infirmier et pourquoi pas un suivi diététique. »

 Rééducation individuelle encadrée

Au CHU de Rennes (Bretagne), le professeur de médecine de sport a mis en place en 2008, un programme d’entrainement pour les malades chroniques. L’année suivante, une collaboration a été instaurée avec le Centre régional de lutte contre le cancer Eugène Marquis (CEM). Désormais, le CHU propose aux patients un programme encadré par une infirmière, un médecin et un éducateur sportif.

« Tous les professionnels médicaux et paramédicaux ont été sensibilisés au fait que l’activité physique procure un bien-être aux personnes malades, rapporte Régine Denoual, infirmière. De fait, les patients hospitalisés au CHU et ceux du CEM se voient proposer une activité physique. « Dans le cadre de la consultation infirmière, nous évaluons l’autonomie du patient, sa qualité de vie, nous recueillons ses souhaits et ses attentes vis-à-vis du sport », ajoute-t-elle.

« Dans le cadre de la consultation infirmière, nous évaluons l’autonomie du patient, sa qualité de vie, nous recueillons ses souhaits et ses attentes vis-à-vis du sport »
Puis, le patient bénéficie d’une consultation médicale avec le médecin du sport qui évalue sa condition physique, teste sa capacité à l’effort et prépare un programme de ré-entrainement en échangeant avec l’éducateur sportif.

Les patients sont alors encouragés à effectuer pendant la semaine, de la course à pied, de la marche, du vélo, de la natation, des exercices d’assouplissement ou encore du renforcement musculaire. Ils peuvent également bénéficier d’activités proposées par la Ligue contre le cancer (gymnastique douce ou marche) ou par des fédérations sportives (canoé, dragon boat, escrime ou athlétisme), qui collaborent avec le CHU.

Les patients sont orientés dans ces différentes activités en fonction de leur test à l’effort. « Ils sont suivis une fois par semaine, et nous avons des retours très positifs, indique Régine Denoual. Il y a beaucoup plus de femmes, atteintes de cancers du sein, que d’hommes qui participent. Elles retrouvent de l’énergie, certaines se remettent à faire des activités, elles sortent de l’isolement, retrouvent une vie sociale et reprennent confiance. »

Pratique du sport en établissement

Le CH de Valencienne (Nord-Pas-de-Calais) a également mis en place une activité de sport adaptée, rattachée au service oncologie, organisée au sein même de l’établissement et encadrée par un médecin, un kinésithérapeute, un psychologue et un infirmier.

« A l’origine, nous avons mis en place une activité sport pour les patientes atteintes d’un cancer du sein, explique Sandrine Paix, infirmière à la consultation. Puis, nous avons élargi à tout type de cancers. »

Cette activité est proposée lors d’une consultation d’annonce thérapeutique. « Lorsque les patients acceptent, j’organise le recrutement et le rendez-vous avec le kinésithérapeute pour voir s’ils peuvent intégrer l’activité sport », précise Sandrine Paix. Celle-ci a lieu au CH, une fois par semaine pendant 1h30. Ils peuvent choisir entre le tapis de marche, le vélo d’appartement, la gymnastique de renforcement musculaire et les abdominaux.

Ainsi, après que l’infirmière a pris leur tension, ils bénéficient d’un échauffement. Vient ensuite le temps des étirements, de la relaxation et de nouveau la prise de tension. Les patients peuvent bénéficier de dix séances renouvelables deux fois, et généralement, ils vont au terme des trente séances.

« Cette activité leur permet d’avoir une approche de ce qu’ils peuvent faire à l’extérieur et les sort du contexte de la maladie », constate l’infirmière.

« Cette activité leur permet d’avoir une approche de ce qu’ils peuvent faire à l’extérieur et les sort du contexte de la maladie »
L’Unité de rééducation cardiaque et d’éducation thérapeutique (URCET) du Centre hospitalier de Dax-Côte d’Argent (Aquitaine) offre pour sa part une activité physique, sur prescription médicale, aux patients ayant besoin d’une rééducation cardiaque. Ils commencent par effectuer avec l’équipe médicale un test à l’effort et un test de marche, puis effectuent un point sur leurs habitudes alimentaires et leurs habitudes de vie.

« Nous recevons dix à douze patients par jour, précise Françoise Lasalle, infirmière. Ils viennent en moyenne trois fois par semaine et bénéficient de vingt-et-une séances remboursées. »

Ainsi, le patient arrive le matin pour la prise de ses constantes, puis il fait une demi-heure de réveil musculaire avec un kinésithérapeute, suivie de quarante minutes d’ergométrie sur un tapis ou un vélo. « On leur impose un niveau d’effort calculé, sous scope et sous la surveillance d’une infirmière ou du médecin », indique l’infirmière.

S’en suit une séance de musculation, d’abdominaux ou de gymnastique au sol. Après la pause déjeuner, les patients font environ une heure de marche, avant de suivre un atelier d’éducation thérapeutique.

« Avec cette rééducation, les patients constatent qu’ils peuvent continuer à vivre normalement, note Françoise Lasalle. Ils ne sont plus isolés et nous les encadrons en permanence, nous les rassurons, les accompagnons et les faisons progresser. »

Bien-être psychiatrique

L’activité physique peut également servir pour certains patients, à retrouver un équilibre dans la société. Par exemple, à l’hôpital de jour du Bas Landreau à Rezé (Loire-Atlantique), l’activité physique s’adresse, sur prescription, a des patients de 18 à 87 ans ayant des troubles psychiatriques.

« Les patients ont des psychoses, des problèmes d’addiction à l’alcool, ils sont dépressifs ou névrosés », fait savoir l’infirmière, Virginie Harscoët. Une fois par semaine, ils vont venir jouer à des sports collectifs : basketball, handball, futsal ou encore ultimate.

Les professionnels élaborent avec le patient un contrat de soins et toutes les quatre semaines, ils font une évaluation avec l’infirmière référente et le médecin psychiatre.

“Le patient ne voit plus le soignant comme un cadre de soin mais comme un coéquipier. Cela favorise la relation de confiance. »
« On travaille avec le sport collectif car il y a une dynamique d’équipe, explique Virginie Harscoët. Nous aussi, soignant, on participe et pendant l’activité, on a tous un regard différent les uns sur les autres, et le patient ne voit plus le soignant comme un cadre de soin mais comme un coéquipier. Cela favorise la relation de confiance. » Actuellement, une vingtaine de patients participent à cette activité.

« On travaille sur la convivialité, ajoute l’infirmière. Dans les sports collectifs, il y a une dynamique de compétition, mais là ils sont attentifs les uns aux autres et c’est valorisant. » Et de conclure, enthousiaste : « Il y a également une dynamique du dépassement de soi. C’est vraiment une belle expérience collective, les patients prennent plaisir à jouer et à construire quelque chose ensemble. »

Laure Martin

L’activité physique et sportive adaptée est l’un des fils conducteurs du Programme national nutrition santé (PNNS) 2011-2015. Ce plan prévoit de réduire la sédentarité des adultes et de promouvoir l’APA chez les populations en situation de handicap, défavorisées, âgées ou atteintes de maladies chroniques. Les avancées de la recherche ont en effet précisé le rôle que jouent l’inadéquation des apports nutritionnels et l’insuffisance d’activité physique dans le déterminisme de nombreux cancers et maladies cardio-vasculaires, qui représentent plus de 55 % des 550 000 décès annuels en France.

 

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