Il a presque 40 ans, mais en paraît plutôt 20. Il a une expérience professionnelle qui pourrait en inspirer plus d’un, mais ne semble pas vraiment s’en rendre compte. Et quand il parle de son métier, il reste humble, tout en étant déterminé à partager son combat.
Engagé depuis ses débuts d’infirmier auprès de personnes démunies, François a opté pour un exercice libéral en adéquation avec les valeurs qu’il défend. « Nous travaillons sur la notion de territoire et nous allons là où les autres ne vont pas », explique-t-il en guise de présentation.
« Nous faisons la tournée des cités de Belleville et travaillons aussi en collaboration avec les foyers de l’association Les petits frères des pauvres et les hôtels sociaux du quartier. La prise en charge de nos patients est complètement différente des prises en charge habituelles effectuées par les libéraux », ajoute François.
Avec un rapport à la santé qui diffère en effet selon les classes sociales et les soins qui ne sont pas toujours considérés comme une priorité par les plus démunis, les soignants de la maison de santé dans laquelle François exerce, usent régulièrement de stratagèmes pour se faire accepter.
« Le concept n’est pas seulement de résoudre un problème ponctuel de santé, précise-t-il, mais d’évaluer les besoins réels à plus long terme. L’idée, c’est donc d’accrocher avec un soin technique quelconque dont ces personnes auraient besoin, comme par exemple un pansement, puis de prendre le temps du dialogue et de l’écoute. On évalue alors s’il y a des bilans de santé à faire, s’il faut mettre nos patients en relation avec les médecins avec lesquels on travaille parce que l’on suppose un diabète ou une autre maladie chronique non diagnostiquée. Nous voulons avant tout lutter contre les inégalités sociales de santé face à l’accès aux soins ».
Une coordination indispensable
Pour François, l’essentiel se joue dans la coordination : « malheureusement, quand tu es libéral, tu n’es pas payé pour cela. Or, nos patients ont besoin de coordination. Souvent ils renoncent aux soins car tout leur semble difficile et hors de portée : appeler un service hospitalier ou une ambulance, remplir des papiers, prendre un rendez-vous auprès d’une secrétaire médicale… Nous prenons le temps qu’il faut pour voir comment les aider au mieux. Pour nous, hors de question donc, de prendre 70 patients par jour ! »
Soigner. Prendre soin. Collectiviser aussi. Pour François, il était important de rejoindre une maison de santé dont le modèle économique et hiérarchique sortait de la pratique courante.
« Un infirmier libéral est payé à l’acte, ce qui est bête puisqu’il peut passer cinq minutes comme une heure sur le même soin, selon les besoins annexes de la personne soignée. Nous avons décidé de partager les ressources en parts égales, proportionnellement au nombre de journées travaillées. Ainsi, on prend vraiment le patient comme il vient et l’on s’affranchit de tout choix stratégique », explique François.
Le retour aux sources
« Je me perdais à la fin » : lorsqu’il évoque son parcours, François n’a pas de regret. Il a passé plus de 10 ans de sa vie professionnelle au service du Samu Social de Paris. Après avoir été directeur des soins avec sous sa responsabilité plus de deux cents personnes, il a décidé de « redonner du sens » à son métier.
« Je ne considère pas le fait de re-devenir infirmier comme une régression. À la base, j’avais fait ma formation d’infirmier pour travailler avec les mains et ça me manquait. En qualité de directeur des soins, j’avais un poids hiérarchique et politique qui s’abattait sur moi. J’ai eu besoin de réfléchir à tout ça pour me lancer de nouveau et re-trouver ma voie », souligne cet infirmier.
Les populations dont François s’occupe maintenant aussi sont différentes. Et cette différence lui fait du bien : « je me retrouve davantage à soigner ces gens qui sont plutôt dans une précarité modérée. Ce sont des gens du quartier. Des gens qui sont juste un peu plus défavorisés que d’autres et qui sont très touchants. On peut parler d’égal à égal avec eux. Alors qu’avec les grands exclus dont nous nous occupions au Samu Social, les relations étaient vraiment particulières. Il s’agissait de survie et non de mieux-vivre ». Affaire à suivre.
Malika Surbled
Publié dans ActuSoins n°13
François Raymond en 7 dates :
1999 : obtient son D.E puis effectue son service civil au sein de l’association Migrations Santé.
2000 : intègre le Samu Social en qualité d’infirmier
2002 : devient coordinateurs de maraudes
2005 : devient responsable de lits (cadre)
2007 : obtient une licence professionnelle de management des établissements de santé puis devient directeur des services de soins infirmiers, toujours au Samu Social
2009 : devient administrateur et trésorier bénévole de l’association FIT (une femme, un toit).
2012 : Intègre en qualité d’IDE le projet de création de la maison de santé pluridisciplinaire Pyrénées-Belleville.
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…C’est pas nouveau ! çà a toujours été le cas
Il fait du socio-libéralisme quoi
L’infirmière libérale prend aussi du temps pour l’écoute et le dialogue.Les rendez vous avec les médecins ,les laboratoires,les ambulanciers sont pris par les infirmieres.Récuperer les médicaments à la pharmacie ou faire des commandes aussi.Ramener le journal ou une baguette,changer une ampoule ou tout simplement chercher un document égaré,poster du courrier,lire un courrier etc….. c’est courant! et tout ça benevolement.Je ne connais pas beaucoup d’infirmieres libérales qui ne rendent pas services .De quelle précarité parle t-on ? certains sont même pris en charge à 100%.Je n’ai jamais entendu parler de différence entre patients riches et pauvres!