Brigitte Feuillebois, infirmière et cadre de santé, est conseillère experte des professions paramédicales au ministère de la santé. Elle représente aussi, depuis quelques mois, les infirmiers français au niveau national et européen.
ActuSoins consacre une série de trois articles à Brigitte Feuillebois, conseillère experte des professions paramédicales au ministère de la santé et représentante des infirmiers au niveau européen.
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Volet 1 – Brigitte Feuillebois, une experte pour représenter les infirmiers
C’est comme une quête, un désir d’analyser, de comprendre le système dans lequel évoluent les professionnels de santé. De l’améliorer aussi. « Dès mon premier stage en qualité d’étudiante en soins infirmiers (en 1990, ndlr), les choses se sont révélées à moi comme une évidence. Je me suis retrouvée face à des encadrants assez maltraitants et je me suis dit qu’être IDE, cela ne devait pas être ça ».
Les années ont passé avec le sentiment permanent que le rôle social des infirmiers n’était pas valorisé à sa juste valeur et que ces situations récurrentes que rencontrent les étudiants et les infirmiers en poste, traduisaient finalement la reproduction d’un mécanisme maltraitant envers eux-mêmes. « Cela peut être l’expression de la perception que nous avons de la manière dont on est traités », analyse Brigitte Feuillebois.
Dès le départ, dans le cadre de son travail de fin d’études notamment, elle s’interroge : c’est quoi une infirmière en France ? « C’est un sujet qui m’anime et qui me passionne, encore aujourd’hui. Pour en saisir les contours, un long travail historique et sociologique peut être nécessaire ».
Autre point d’accroche : la conception des soins. « J’ai toujours ressenti le besoin d’avoir une vision diversifiée du système de santé et des soins. C’est ce qui a motivé mon choix de travailler d’abord aux urgences, adultes, puis pédiatriques, pendant quelques années. Aux urgences, on est à la frontière entre la société et le système de santé, car on prend en charge des personnes plus ou moins vulnérables, des précaires, des enfants… J’ai ensuite exercé en secteur pénitentiaire pour toucher du doigt ce qu’est être infirmière dans un secteur où les êtres humains ne sont plus vus comme des êtres humains. La suite était logique : je devais diversifier mon expérience pour avoir une vision la plus exhaustive possible. »
C’est ainsi que Brigitte Feuillebois a parfois fait « le grand-écart » : après plusieurs mois en gérontologie, elle passe en crèche. « Il y a une logique, s’enthousiasme-t-elle : la santé publique ! ».
“Un enchaînement d’opportunités”
La suite, c’est un « enchaînement d’opportunités », estime l’experte. « On m’a proposé de faire l’IFCS. J’étais très surprise au début car je suis plutôt de nature très réservée. Il n’empêche que j’ai relevé le challenge et que j’ai développé des compétences supplémentaires ».
Pendant cette reprise d’études, Brigitte Feuillebois exerce en qualité de « faisant fonction de cadre de santé » dans un Ehpad, encadrant une équipe de soixante personnes. Son diplôme de cadre en poche, elle se tourne vers la pédagogie et le conseil : formation initiale et continue des infirmiers puis accompagnement des établissements gérontologiques pour proposer des actions d’amélioration de leur organisation. « Je me suis surtout consacrée à la construction d’un cursus professionnalisant pour les infirmiers coordinateurs en Ehpad et en SSIAD. Cela m’a permis de construire le DU des infirmiers coordinateurs », indique-t-elle.
Souhaitant revenir dans le service public, elle intègre ensuite le service de formation continue de l’AP-HP, en qualité de responsable pédagogique de la formation continue des soignants. « Là encore, j’avançais, mais avec la frustration des limites : on ne pouvait pas aller aussi loin que l’organisation ou les acteurs souhaitaient aller. C’était trop restrictif pour moi. Ce qui m’intéresse, c’est le fonctionnement des organisations de soins. La formation continue est l’une des réponses aux besoins du système, mais ce n’est qu’une réponse partielle. J’ai eu envie d’aller vers les institutions qui élaborent les politiques publiques, pour avoir une vision plus macro ».
Retenue pour travailler sur le dispositif des protocoles de coopération à leurs prémices – après la loi Bachelot de 2009 – , Brigitte Feuillebois entre alors à l’ARS Île-de-France, en qualité de chargée de mission. Tout en suivant un master en sociologie sur la conduite du changement. Une suite de son travail d’étudiante en soins infirmiers, avec 30 ans d’expérience professionnelle en plus, en quelque sorte. « Mon mémoire portait sur les protocoles de coopération et surtout sur la transformation identitaire des infirmiers au regard de ce que les organisations dérogatoires permettent », précise-t-elle.
Son poste d’experte au ministère, on lui a proposé, mais elle ne l’a pas accepté tout de suite. « Déjà, parce que je suis quelqu’un de très loyale et je ne voulais pas mettre en difficulté l’ARS avec laquelle j’étais sous contrat. D’autre part, parce que je trouvais la marche un peu trop haute. Ce genre de poste est en général proposé à des directeurs de soins – ce que je ne suis pas – en fin de carrière… » . Quelques mois plus tard, après de multiples échanges avec ses pairs, elle a finalement candidaté et…a été retenue.
Cinq ans et un mandat de représentante des infirmiers français au niveau européen plus tard, Brigitte Feuillebois ne regrette rien. « J’ai encore beaucoup à apprendre. En qualité d’infirmière, j’ai notamment besoin de trouver les bons niveaux d’acculturation pour travailler de pair avec les politiciens, tout en faisant en sorte de ne pas me dénaturer moi-même ».
M.S
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