A quoi vont servir les assistants médicaux ?

L’un des points phares du plan « Ma Santé 2022 », présenté par le président de la République en septembre dernier et qui doit faire l’objet d’une loi courant 2019, est la création de postes d’assistants médicaux pour épauler les médecins de ville. Mais le rôle exact que ces nouveaux professionnels vont jouer est encore en discussion.

« Une provocation ». C’est ainsi que les treize organisations infirmières qui appelaient à la mobilisation du 20 novembre dernier avaient qualifié dans un communiqué de presse diffusé en amont des manifestations la création du métier d’assistant médical. 4000 de ces nouveaux professionnels subventionnés par l’Assurance maladie devraient d’après le plan « Ma Santé 2022 » travailler dans les cabinets de médecine libérale, et certains soignants ont peur de les voir empiéter sur les prérogatives des infirmières. Des craintes que rien ne permet pour le moment de justifier, pour une raison simple : le contenu exact du nouveau métier reste encore à définir.

Le plan « Ma Santé 2022 » est en effet assez peu loquace sur les tâches que devront exécuter les assistants médicaux. Il se borne à indiquer que leur objectif sera de « redonner du temps aux médecins », et à lister certaines des missions qu’ils pourront effectuer : accueil des patients, recueil de certaines constantes ou informations relatives à l’état de santé, vérification de l’état vaccinal et des dépistages, mise à jour des dossiers, gestion de l’aval de la consultation… « Ma lecture, c’est que les médecins réclament une secrétaire médicale, et qu’ils ajoutent à ce poste une composante sanitaire pour le rendre éligible à un financement par l’Assurance maladie », décrypte cyniquement Philippe Tisserand, désormais ex-président de la Fédération nationale des infirmiers (FNI, syndicat leader chez les infirmières libérales).

Moitié secrétaire, moitié aide-soignante

Une vision que ne partagent bien entendu pas les médecins, à commencer par le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF, principal syndicat de médecins libéraux). Ce dernier défend en effet une approche plus équilibrée du métier d’assistant médical. « Celui-ci dans sa globalité comportera une partie de formation à l’accueil et au secrétariat, et une partie de formation à la prise en charge d’un patient sur délégation du médecin », indique le syndicaliste.

Il précise par ailleurs que les détails concernant la formation et les conditions d’exercice des assistants médicaux seront fixés lors de négociations dans le cadre de la convention collective des personnels de cabinets médicaux qui doivent selon lui aboutir fin mars.

En attendant la conclusion de ces négociations, Jean-Paul Ortiz peut tout de même dire que les assistants médicaux pourront être spécialisés : l’assistant d’un cabinet de dermatologie n’aura probablement pas les mêmes tâches que celui d’un cabinet de médecine générale. Côté formation, ils pourront provenir de deux horizons. « Le premier cas de figure, ce sera d’avoir quelqu’un qui a une formation de secrétariat médical et que nous allons former à un certain nombre d’éléments utiles dans la phase de préparation à la consultation médicale », explique le médecin. « L’autre type de métier qui pourrait assurer cette fonction, ce sont des aides-soignantes, qui ont déjà un contenu métier vis-à-vis du patient, et qui vont acquérir un minimum de compétences en matière de secrétariat. »

Et Jean-Paul Ortiz de préciser que dans les deux cas, la formation pourrait durer « un peu moins d’une année scolaire », pourrait se faire par Validation des acquis de l’expérience (VAE) et pourrait être assurée par les institutions qui forment déjà les secrétaires médicales et les aides-soignantes.

Et l’argent dans tout ça ?

Côté financier, l’embauche de ces assistants médicaux sera subventionnée par l’Assurance maladie selon des modalités à définir lors de négociations conventionnelles qui s’ouvriront avec les médecins libéraux courant janvier, et qui doivent elles aussi aboutir en mars. La Sécu et le gouvernement ont déjà fait savoir que le financement devrait selon eux être réservé aux médecins exerçant en groupe, et qu’il serait soumis à des contreparties (augmentation de la patientèle suivie, réduction des délais de rendez-vous, indicateurs de qualité…). Les praticiens devront par ailleurs se partager les assistants médicaux.

Reste la question des effectifs. Le gouvernement prévoit 4000 assistants médicaux d’ici 2022. Le dernier Atlas de la démographie médicale du Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) ayant recensé 83 899 médecins libéraux en activité régulière, cela fait moins d’un assistant médical pour 20 praticiens. Bien sûr, la mesure n’entrera en vigueur que progressivement : Jean-Paul Ortiz compte au maximum 1 000 assistants médicaux fin 2019, soit moins d’un pour 80 médecins. Dans ces conditions, il n’est pas sûr que l’effet sur le temps dont disposeront les médecins soit immédiatement perceptible par les patients.

Adrien Renaud

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