« En mathématiques, certains étudiants ne maîtrisent pas les opérations simples. En français, la syntaxe et le vocabulaire ne sont pas toujours bien intégrés », explique Michèle Appelshaeuser, présidente du Comité d’entente des formations infirmières et cadres (Cefiec) et directrice des Ifsi/Ifas de Brumath.
Depuis quelques années, des initiatives locales visant à soutenir les étudiants en soins infirmiers, voire à éviter leur décrochage en cours de cursus se développent.
Des Ifsi ont ainsi fait appel au projet Voltaire, un service de formation en ligne pour pallier des lacunes en français. « D’autres embauchent des professeurs de mathématiques et de français ou organisent, et c’est le cas chez nous, des groupes de lecture. Les livres ne sont pas nécessairement en lien avec la profession. L’idée est de donner le goût de la lecture et à travers cela, d’enrichir la langue française, d’améliorer l’expression orale et écrite », poursuit Michèle Appelshaeuser.
Il existe aussi des processus d’auto-formation, par le biais de séances s’apparentant à du tutorat. « Nous mettons à disposition le matériel en fonction des travaux pratiques que les étudiants volontaires souhaitent revoir. Ils se réunissent hors des heures de cours, plutôt en soirée et révisent ensemble. Les équipes font preuve de créativité pour porter, jusqu’à une certaine limite bien sûr, les étudiants vers la réussite. Cela vaut la peine de soutenir ces initiatives. Il est très encourageant de voir des étudiants qui étaient en difficulté, sortir diplômés de l’Ifsi », ajoute-t-elle.
Entraide
Dans d’autres Ifsi, les étudiants s’engagent dans des projets de tutorat par le biais des associations étudiantes.
Le tutorat repose sur le soutien par les pairs, généralement des années supérieures vers les années inférieures.
L’objectif est, en amont des partiels, de faciliter l’assimilation des connaissances abordées en cours.
Fiches de révision, quizz sur Instagram, jeux, ateliers, séances organisées en vue des rattrapages et des partiels blancs en première année, les idées ne manquent pas et sont déployées en collaboration avec l’équipe pédagogique.
Cette dernière peut d’ailleurs mettre à disposition les salles et le matériel pour que ces tutorats se développent. « Nous échangeons avec la direction de l’Ifsi pour identifier les matières qui posent le plus de difficultés. Les calculs de doses font partie des aspects récurrents à revoir. Les étudiants se réentraînent aussi aux actes de soins », précise Malorie Dupont, vice-présidente en charge du tutorat à la Fédération nationale des étudiants en sciences infirmières (Fnesi). Le tutorat ne remplace en aucun cas un cours. Il est surtout là pour aider les étudiants de premières années à trouver leur méthodologie de travail. C’est un soutien au moment de l’entrée dans l’enseignement supérieur, pour s’adapter au nouveau rythme de formation, aux cours magistraux, etc. Cela favorise aussi la cohésion entre les promotions. »
Le tutorat est une action bénévole, à la participation libre des tutorés et, pour l’instant, déployé localement dans des Ifsi. « À la Fnesi, nous travaillons au développement de contenus de tutorats qui pourraient bénéficier à tous les étudiants, en particulier à ceux qui n’ont pas d’association étudiantes », annonce Malorie Dupont.
Programme d’accompagnement à la réussite
Développé depuis peu, un dispositif pédagogique basé sur le volontariat, s’adresse à des étudiants dont les prérequis dans les matières académiques – français, mathématiques et ouverture culturelle -, sont un peu faibles pour pouvoir poursuivre le parcours sans aide extérieure.
Des formateurs externes travaillent ainsi, avec les étudiants volontaires, le français par le biais d’articles de presse ou revoient les calculs de doses de façon plus personnalisée, hors des cours obligatoires. « J’ai eu une proposition émanant du Centre de la formation et du développement des compétences (CFDC), pour mettre en place un dispositif déjà expérimenté l’année précédente à l’Ifsi Charles-Foix, rapporte Karine Corbrion, directrice de l’Ifsi Bicêtre. J’ai saisi l’occasion car cela faisait déjà quelques années que je percevais, en début de cursus, le faible niveau de certains étudiants. Je m’interrogeais sur ce qui pouvait être fait, en termes d’actions, pour ne pas être uniquement dans le constat mais pour être proactive par rapport à une situation que l’on pouvait potentiellement améliorer. »
L’objectif est de ne pas rester dans l’immobilisme, de tendre la main aux étudiants dès le début du cursus. « C’est aussi une manière de contractualiser un contrat de confiance et de reconnaître que notre structure qui s’adresse à de nombreux étudiants – 700 étudiants à l’Ifsi Bicêtre -, a aussi l’agilité à se positionner sur un segment plus personnalisé de soutien, se réjouit Karine Corbrion. Mon vœu le plus cher serait que cet accompagnement puisse être proposé dans tous les instituts de formation parce que l’on va très probablement, à l’issue des bilans qui seront faits, confirmer qu’un certain nombre d’étudiants évitent, grâce à ce dispositif, le décrochage scolaire. »
Élise Kuntzelmann
Tutorat : des témoignages plus qu’encourageants
Ewin Voltzenlogel, étudiant tutoré à l’Ifsi de la Robertsau (Strasbourg), raconte : « Lors de ma deuxième année, j’ai assisté à quelques séances de tutorat. Elles m’ont permis de réviser en prévision du rattrapage. L’amphithéâtre était toujours plein avec près de 100 tutorés présents. Cela a été un franc succès. Le fait d’avoir des pairs en face de nous a beaucoup d’impact. Grâce à ces séances, je suis arrivé plus serein et avec des connaissances plus solides que lors de la première session de l’examen sur le processus obstructif. » Certaines unités d’enseignement (UE) peuvent, en effet, se révéler compliquées.
« Je pense notamment à tout ce qui est lié au corps et à son fonctionnement : les différents systèmes (respiratoire, urinaire, cardiaque, etc.), la pharmacologie ou encore les processus traumatologiques, détaille Aurélie Garceau, étudiante dans le même Ifsi, qui a été, lors de sa deuxième année, tutrice auprès des étudiants de première année. « En échangeant avec la Fnesi, j’ai pris connaissance de l’existence du tutorat et nous l’avons mis en place pour la première fois cette année dans notre Ifsi. Outre les séances en amphithéâtre, nous avons aussi, avant les partiels, posté des quizz en story sur Instagram et des vidéos pour les UE pratiques. Être tutrice m’a permis de remobiliser mes connaissances de première année. C’est très valorisant d’avoir ces bons retours de la part des étudiants tutorés. Et cela créé des interactions entre les promotions. »
É.K
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