Maladie chronique caractéristique des pays développés, l’hypertension artérielle (HTA) figure parmi les premiers facteurs de risque de maladies cardio-vasculaires et d’accidents vasculaires cérébraux (AVC). Elle est considérée comme un « tueur silencieux » car elle ne se manifeste à travers aucun symptôme particulier et ces répercussions sur l’organisme sont nombreuses. En France, environ quinze millions de personnes sont hypertendus.
Hypertension artérielle : Rappel physiologique
Qu’est-ce que la pression artérielle ?
Lorsque le coeur et plus particulièrement le ventricule gauche (VG) se contracte, le sang est propulsé vers les artères, créant ainsi une pression sur la paroi des artères appelée pression artérielle (PA).
Cette pression s’élève au moment de la systole (contraction du VG) et diminue au moment de la diastole (phase de repos du VG). Elle s’exprime en centimètres (cmHg) ou millimètres de mercure (mmHg).
La pression artérielle systolique (PAS) est la pression maximale atteinte lors de l’éjection ventriculaire et sa valeur est environ de 130 mmHg. La pression artérielle diastolique (PAD) est la pression minimale obtenue pendant la diastole juste avant l’éjection ventriculaire, lorsque le coeur est au repos entre deux battements pour se remplir, et se situe aux environs de 70 mmHg.
La pression artérielle moyenne (PAM) est la pression qui s’exercerait en permanence sur les parois vasculaires si l’écoulement sanguin était continu. Elle est calculée selon la formule suivante : PAM = (PAS + 2 x PAD) / 3 et sa valeur est environ de 80-90 mmHg.
Le terme commun de « tension artérielle » (TA) est donc le rapport de ces mesures (rapport de la PAS/PAD). Une TA anormalement élevée sera appelée hypertension artérielle (HTA).
La PA peut se mesurer en discontinu de manière non invasive (PNI) à l’aide d’un brassard (méthode auscultatoire ou oscillométrique).
Elle peut aussi être mesurée en continue de manière invasive grâce à un cathéter artériel radial ou fémoral. Le transducteur transforme le signal hydraulique en un signal électrique. Les indications sont une surveillance continue de la PA pour une chirurgie lourde, en service de réanimation (état de choc, décompensation cardiaque, traitement par catécholamines…) ainsi que la possibilité d’effectuer des bilans sanguins artériels itératifs (gaz du sang, ionogramme, numération formule plaquettaire…).
La mesure correcte de la PNI (Pression artérielle non invasive)
Le brassard doit :
- avoir une largeur qui dépasse de 20 % la circonférence du bras,
- recouvrir les 2/3 de la longueur du bras,
- être posé à deux travers de doigts au-dessus du pli du coude.
- Un brassard trop grand comprime l’artère brachiale pour de faibles pressions, sous estimant la pression artérielle. A l’inverse, un brassard trop étroit surestime la pression artérielle.
- Le membre sur lequel est mesuré la PNI doit être tendu et non comprimé.
- Seul le site de mesure de l’artère brachiale est fiable.
- Les valeurs sont faussées en cas de taille inadaptée du brassard, d’arythmie, d’hypotension majeure ou lors de mouvements du patient.
La régulation de la PA (Pression artérielle)
Elle est sous le contrôle du système nerveux autonome – sympathique (Σ) et parasympathique (para Σ) – et humoral, lié à la production de substances chimiques qui vont se diffuser dans l’organisme et agir ainsi à distance. Il existe plusieurs mécanismes de régulation à court, moyen et long terme, qui interagissent ensemble avec des vitesses de réponse différentes.
A court terme, le mécanisme est immédiat et la réponse est instantanée. Il dépend du système nerveux autonome, via des baro-chémo et volorécepteurs situés au niveau du sinus carotidien et de la crosse de l’aorte, et agit sur la fréquence, le débit cardiaque et les résistances périphériques.
En cas d’altération prolongée de la pression artérielle, la régulation à moyen et long terme intervient.
A moyen terme, le mécanisme est basé sur des transferts liquidiens au niveau des capillaires et sur la libération de substances vasoactives :
- des substances vasoconstrictrices (noradrénaline, adrénaline) libérées par les surrénales,
- des substances vasoconstrictrices du système rénine- angiotensine-aldostérone,
- des substances vasodilatatrices (kinine, monoxyde d’azote et prostaglandines).
A long terme, la régulation fait intervenir le rein et les hormones responsables de la balance hydrosodée : l’hormone antidiurétique (ADH) et l’aldostérone.
Le système rénine-angiotensine
La rénine est synthétisée et stockée dans l’appareil juxta-glomérulaire du rein. Lorsque la pression de perfusion rénale ou la natrémie diminue, elle est libérée dans la circulation. Dans le foie, elle transforme l’angiotensinogène en angiotensine I. Celle-ci est transformée en angiotensine II grâce à une enzyme appelé l’enzyme de conversion. L’angiotensine II est un puissant vasoconstricteur et stimule la réabsorption du sodium au niveau du tube contourné distal.
Qu’est-ce que l’hypertension artérielle (HTA) ?
Le diagnostic
Le diagnostic d’HTA (hypertension artérielle) est posé après trois mesures successives de la pression artérielle au repos, lors de deux consultations. La mesure de la pression artérielle doit être réalisée aux deux bras, à l’aide d’un brassard adapté à la morphologie du patient.
Dans 95 % des cas, l’HTA hypertension artérielle est dite « essentielle », c’est à- dire liée à une augmentation isolée des résistances vasculaires artérielles. L’HTA hypertension artérielle est « secondaire » à une autre pathologie dans seulement 5 % des cas : pathologie rénale, surrénalienne (phéochromocytome, syndrome de cushing), grossesse, coartation de l’aorte…
Facteurs de risque
D’apparition parfois brutale ou d’évolution lente, l’HTA hypertension artérielle est liée à plusieurs facteurs, certains pouvant être corrigés, d’autres non. L’âge est le premier facteur : plus nous vieillissons, plus nos artères se rigidifient, plus la TA augmente. L’hérédité multiplie par deux le risque d’HTA hypertension artérielle.
Quelles sont les complications de l’HTA hypertension artérielle ?
Elles sont nombreuses. L’HTA hypertension artérielle altère de manière plus ou moins réversible la paroi des artères. Afin de résister à la pression, les artères se rigidifient et leur paroi s’épaissit. La lumière du vaisseau se rétrécit d’autant plus avec le développement des plaques d’athérome. Lorsqu’une plaque d’athérome se détache, l’artère se bouche et entraîne un accident cardio-vasculaire ou un accident vasculaire cérébral (AVC).
Plus précisément, au niveau cardio-vasculaire, l’HTA hypertension artérielle accélère la fatigue du coeur en augmentant le travail du muscle cardiaque qui va se dilater (hypertrophie du ventricule gauche et insuffisance cardiaque), devenir moins performant et s’épuiser.
Le cœur étant plus sollicité, il consomme donc davantage d’O2 apporté par les artères coronaires, plus ou moins obstruées par des plaques d’athérome (angor et infarctus du myocarde). L’aorte peut être fragilisée par l’augmentation de pression sur ces parois (dissection aortique) mais également tout le réseau artériel (artériopathie des membres inférieurs, insuffisance rénale chronique, néphropathie, rétinopathie hypertensive).
Au niveau neurologique, les nombreuses lésions de vaisseaux sanguins qui irriguent le cerveau entraînent une perte lente et progressive de la mémoire et d’autres facultés (démence) et favorisent la survenue d’AVC ischémique (par thrombose) ou hémorragique (rupture des vaisseaux dû à la pression).
Hypertension artérielle : le traitement médicamenteux de la maladie hypertensive
Ce qui n’est qu’un facteur de risque devient, au fil des années, une véritable maladie chronique aux conséquences multiples.
L’HTA se soigne très bien mais ne se guérit pas. Il est impératif pour le patient, d’accepter cette maladie chronique sans symptôme apparent mais nécessitant un traitement quotidien et une hygiène de vie saine.
La cible tensionnelle sous traitement est aux environs de 120-130 / 70-79 mmHg chez les patients de moins de 65 ans. Elle est aux alentours de 130-140 mmHg / < 80 mmHg chez les insuffisants rénaux et chez les patients plus âgés si le traitement est bien toléré. Il existe plusieurs classes médicamenteuses qui agissent de manière différente sur le coeur, le rein ou les vaisseaux. Quelquefois, il sera nécessaire d’associer deux ou trois médicaments de classes différentes afin de contrôler l’HTA (bi ou trithérapie). Afin d’équilibrer et stabiliser la TA, l’observance thérapeutique est cruciale.
A noter, en prévision d’une chirurgie, certains traitements comme les bétabloquants et les inhibiteurs calciques sont maintenus. D’autres sont stoppés comme les diurétiques (contrôle de la kaliémie) ou les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (arrêt 12 à 24 h avant l’intervention) car le risque d’hypotension artérielle est majoré par l’anesthésie.
Les diurétiques
Ils augmentent l’excrétion urinaire en augmentant l’élimination d’eau et de sel. Le volume sanguin circulant dans les artères diminue et la pression qui s’exerce sur leur paroi est réduite.
Il est conseillé de les prendre le matin et ils sont souvent associés à d’autres antihypertenseurs (inhibiteurs de l’enzyme de conversion, antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II…).
La conséquence est une diurèse augmentée, plus ou moins associée selon les molécules utilisées à une fuite de potassium. La kaliémie ainsi que la fonction rénale devront donc être surveillées régulièrement.
Liste des médicaments diurétiques : Esidrex®, Eurelix®, Furosémide (Lasilix®), Indapamide (Fludex®), Modamide®, Spironolactone (Aldactone®), Tenstaten®.
Les bêtabloquants
Ils agissent sur le coeur et les vaisseaux. Ils ralentissement la fréquence cardiaque et diminuent la force de contraction du coeur entraînant une baisse de la TA. Ils sont particulièrement indiqués en cas de cardiopathie ischémique associée.
Les effets secondaires le plus fréquemment rencontrés sont une sensation de fatigue, des troubles digestifs, une sensation de pieds et de mains froids, des troubles du sommeil et des troubles de l’érection.
Liste des médicaments bêtabloquants : Acébutolol (Sectral®), Artex®, Aténolol (Ténormine®), Bisoprolol (Detensiel®), Céliprolol (Célectol®), Corgard®, Métoprolol (Lopressor®, Seloken®), Nébivolol (Nebilox®, Temerit,®), Propranolol (Avlocardyl,®), Timacor®, Trandate®, Visken.
Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC)
Ils combattent la stimulation du système rénine-angiotensine- aldostérone et bloquent la production de l’angiotensine II et de l’aldostérone. Ils vont donc réduire la vasoconstriction normalement induite par l’angiotensine II ainsi que la réabsorption de l’eau provoquée par l’action de l’aldostérone sur le rein. Ils entraînent donc une vasodilatation ainsi qu’une diminution de la volémie.
Les IEC sont utilisés chez des patients hypertendus qui présentent également une insuffisance cardiaque. Ils sont formellement contre-indiqués en cas de grossesse et en cas de projet de grossesse. Un changement de traitement sera alors envisagé.
Liste des IEC : Bénazépril (Briem®, Cibacène®), Captopril (Noyada®, Lopril®) Cilazapril (Justor®), Énalapril (Renitec®), Fosinopril, Lisinopril (Zestril®, Prinivil®), Périndopril (Coversyl®), Quinapril (Acuitel®), Ramipril (Triatec®), Tanatril®, Trandolapril (Odrik®, Zofenil®).
Les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARA2 ou sartans)
Classe thérapeutique récente, très bien tolérée et entraînant peu d’effets indésirables, les ARA2 bloquent directement les récepteurs de l’angiotensine II, responsable de la vasoconstriction des vaisseaux.
Liste des ARA2 : Candésartran (Atacand®, Kenzen®), Aprovel®, Losartan (Cozaar®), Micardis®, Olmetec®, Teveten®, Valsartan (Tareg®).
Les inhibiteurs calciques (IC)
Ils freinent l’entrée du calcium dans les fibres musculaires lisses artérielles responsables de la contraction des artères et entraînent la baisse de la TA par relâchement des artères. Ils sont également utilisés pour traiter l’angine de poitrine.
Liste des inhibiteurs calciques : Amlodipine (Amlor®), Caldine®, Diltiazem (Mono-Tildiem®), Félodipine (Flodil®), Icaz®, Iperten®, Lercanidipine (Lercan®, Zanidip®), Nicardipine (Loxen®), Nifédipine LP (Adalate®LP, Chronadalate®), Vérapamil (Isoptine ®).
Les associations d’antihypertenseurs
Cette classe de médicaments associe deux familles d’antihypertenseurs à faibles doses afin de limiter les effets indésirables. Ils ont un mode d’action complémentaire : les bêtabloquants, les IEC et les ARAII peuvent ainsi être associés aux diurétiques ou aux IC.
Autres hypertenseurs
D’autres traitements existent comme les antihypertenseurs centraux ou les vasodilatateurs mais leur usage est ponctuel ou de courte durée. Les antihypertenseurs d’action centrale diminuent le tonus sympathique vasoconstricteur (Aldomet®, Catapressan®).
Les vasodilatateurs dilatent les vaisseaux sanguins, veines et artères en relâchant les muscles lisses des parois des vaisseaux (Alpress®, Eupressy®l, Médiatensyl®, Minipress®).
Hypertension artérielle : les mesures hygiéno-diététiques
Ces mesures peuvent retarder la survenue de l’HTA hypertension artérielle et prévenir la mise en place d’un traitement antihypertenseur. Le patient doit mesurer sa pression artérielle régulièrement et suivre attentivement le traitement (prise quotidienne à heure fixe).
Il est indispensable d’adopter un mode de vie sain en privilégiant une alimentation équilibrée avec consommation de fruits, de légumes et d’acides gras insaturés, de limiter une alimentation trop riche en graisse et en sel (inférieur à 5 g/jour), de modérer sa consommation d’alcool et de stopper la réglisse et le tabac. Il est essentiel de limiter les excès de poids (IMC entre 20 et 25 kg/m2), de pratiquer une activité physique régulière (30 min/jour et au moins 3 fois par semaine) et d’éviter tout stress grâce aux diverses techniques de méditation, relaxation…
L’observance thérapeutique ainsi que l’éducation, le soutien et le suivi par les acteurs de santé (IDE, médecin, pharmacien…) sont cruciaux pour une prise en charge optimale des patients hypertendus afin de limiter et retarder les conséquences de cette maladie chronique.
Laurence PIQUARD,
Infirmière anesthésiste à l’Institut Curie
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