Coopération professionnelle : toujours plus de protocoles

Coopération professionnelle : toujours plus de protocoles

A défaut de vraiment avancer sur le terrain du LMD, le métier d’infirmière évolue au coup par coup via les protocoles de coopération ponctuellement autorisés par les ARS et la HAS. La moitié des protocoles autorisés à ce jour concerne des infirmiers ou infirmières. Ils ne font pas l’unanimité du côté des médecins ni des soignants.

Coopération professionnelle médecins infirmières : toujours plus de protocolesDepuis que la loi HPST du 21 juillet 2009 et son article 51 ont ouvert la possibilité aux professionnels de santé de proposer des coopérations professionnelles, la HAS, qui statue sur les projets en dernier ressort, a analysé 61 dossiers, dont 38 impliquent au moins un infirmier.

Pour la quasi totalité d’entre eux, il s’agit d’une coopération médecin-infirmier. Seule un projet associe un infirmier et une aide-soignante.

Les coopérations proposées « vont de la pratique d’un acte normalement réalisé par un médecin et délégué à un autre professionnel de santé, comme le bilan uro-dynamique, par exemple, à la prise en charge clinique  comme dans le protocole de suivi des pathologies chroniques Azalée, en passant par des actes comme la vaccination des voyageurs ou les suivis de protocole de chimiothérapie orale ou d’insulinothérapie », souligne le Dr Jean-François Thébaut, membre du collège de la HAS et président de la Commission d’amélioration des pratiques professionnelles et de la sécurité des patients.

Valorisation ?

Il distingue deux catégories de coopération. La première concerne des actes techniques spécifiques qui pourraient, secondairement être ajoutés au décret de compétence. Cela a par exemple été le cas pour les orthoptistes dans la rétinopathie des diabétiques, une coopération à présent valorisée financièrement par l’assurance maladie. « Cela n’a pas encore été le cas pour les infirmières mais cela pourrait déboucher pour elles aussi par la suite », souligne le président de la commission.

La seconde catégorie porte sur des pratiques avancées qui pourraient aboutir à une nouvelle compétence voire à une nouvelle forme du métier dans l’optique de la prise en charge clinique, une qualification supplémentaire, en quelque sorte.

Sur les 61 projets, quatre ont été retirés par leur promoteur, et « sur les 57 dossiers restants, huit ont été refusés, soit pour une question de sécurité, parce que nous avons estimé que la sécurité des patients n’était pas garantie, soit parce qu’ils nous paraissaient inutiles au regard des besoins de santé publique ou pour des questions éthiques », explique Jean-François Thébaut.

Quelque 19 dossiers sont en cours d’instruction. L’un d’eux concernent par exemple, indique-t-il, le traitement des plaies chroniques à domicile par une infirmière qui prend des photos avec une tablette et les transmet à un médecin spécialiste et prend en charge l’ordonnance.

« Ce type de coopération soulève des questions, poursuit le président de la commission de l’amélioration des pratiques, car il n’est pas prévu de dérogation pour le remboursement des prescriptions » réalisées par des infirmières… La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) 2014 prévoit un décret à ce sujet mais il n’est pas encore paru.

Evaluation

Au total, 30 projets ont obtenu l’aval de la HAS, pour moitié en ambulatoire et pour moitié en établissement. Prévue au départ après 12 mois de pratique et repoussée aujourd’hui à 18 mois, l’évaluation de quatre coopérations a eu lieu on est en cours : le projet Azalée, la coopération sur le bilan-urodynamique, celle sur la réalisation d’échographies cardiaques par des infirmières et d’échographies par des manipulateurs en électroradiologie médicale.

Seule cette étape permet aux projets de se poursuivre voire, dans un deuxième temps, d’intégrer la pratique à un décret de compétence. Une nouveauté avec la dernière LFSS : une évaluation médico-économique s’ajoutera à l’évaluation sur le plan de la santé publique.

Imaginées pour pallier la réduction constante du « temps médical disponible », les coopérations ne sont pas toujours perçues favorablement par les professionnels. Les syndicats d’anesthésistes-réanimateurs, par exemple, se sont élevés contre l’expérimentation de la pose de voie veineuse centrale par une infirmière au centre de lutte contre le cancer Léon Bérard de Lyon.

De son côté, le SNPI s’inquiète face à des coopérations autorisées alors que les conditions de sécurité ne sont pas garanties et pourraient aboutir à une perte de chance pour les patients, indique Thierry Amouroux, son secrétaire général.

Il s’alarme également face à la proposition d’un rapport du Sénat de laisser aux seules ARS la responsabilité d’autoriser ou non les projets de coopérations et d’étendre les autorisations, jusqu’à présent individuelles, aux équipes.

Olivia Dujardin

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