Hydrotomie percutanée : douze infirmiers sanctionnés

Après avoir pratiqué des actes « d’hydrotomie percutannée », une pratique de soins non reconnue ni validée scientifiquement, douze infirmiers ont été sanctionnés en appel par la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre infirmier.

Hydrotomie percutanée : douze infirmiers sanctionnésIl y a le temps des faits et le temps de la justice. Y compris en matière ordinale. Le 4 février 2022, la Chambre disciplinaire nationale de Paris examinait le recours de 12 infirmiers et infirmières mis en cause en 2020 dans une affaire d’hydrotomie percutanée, et sanctionnés en première instance (pour des sanctions allant du blâme à une interdiction d’exercer de 4 mois au cours d’une procédure disciplinaire menée par la chambre de l’ordre des infirmiers de Corse et de PACA). 

L’hydrotomie percutanée se présente comme une solution pour soulager les douleurs chroniques, mais pose de nombreux questionnements déontologiques : en effet, l’efficacité de cette technique n’a jamais été prouvée et a même fait l’objet d’un avis défavorable de l’académie nationale de médecine en 2021. Néanmoins, parce que, lors des faits datés de 2020, les infirmiers ne pouvaient pas encore avoir connaissance de cet avis, la pratique du charlatanisme n’a pas été retenue à l'encontre des professionnels par la chambre disciplinaire.

Devoir de prudence

Effets indésirables, risques allergiques ou toxicologiques, question de la responsabilité de l’infirmier alors-même que l’hydrotomie avait été prescrite par un médecin, devoir de prudence : lors de cette audience d’appel, la chambre disciplinaire nationale avait estimé utile d’entendre les trois experts désignés par l’Académie de médecine. 

Ainsi, dans la salle, un ancien professeur émérite des université évoquait « des éléments non recevables au regard des données actuelles de la science», ajoutant être « confronté à une thérapie à base d’injections eau et d’additifs (vitamines, minéraux, sodium, calcium…) dont nous ne connaissons pas les modalités d’administration », tandis qu’un épidémiologiste complétait : « Il faut des études biologiques sur des animaux, puis des études cliniques pour montrer un rapport risque/bénéfice favorable ». 

À cela un avocat répondait que les « professionnels de santé ont du mal à imaginer qu’ils puissent faire du mal à leurs patients. »

L’un des experts contextualisait : « beaucoup de nos patients se plaignent du caractère déshumanisé des soins qu’ils reçoivent à l’hôpital. Certains soignants ressentent cela douloureusement en ont envie de proposer autre chose. Il ne s’agit pas de jeter l’opprobre sur des soignants démunis face à la douleur et qui ont envie d’essayer autre chose, mais je ne comprends pas qu’ils le fassent avec autant de légèreté ». 

Pour avoir été inscrits - à leur insu, affirment-ils -, sur un annuaire en ligne de praticiens de l’hydrotomie percutanée, les infirmiers étaient aussi poursuivis pour avoir été « promoteurs » de la technique, ce qu’ils contestaient.

Après examen des différents arguments, le 11 mai 2023, la Chambre nationale disciplinaire a rendu sa décision : les sanctions envisagées contre les infirmiers en première instance ont été confirmées, pour avoir pratiqué des soins non validés par les instances scientifiques, avoir exposé leurs patients à un « risque injustifié » et pour publicité prohibée.

En juin prochain, 52 médecins devront également en répondre.

Delphine Bauer

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