Sous-effectif en service de soins : que dit la loi ? quelle responsabilité en cas de dommage ?

Le sujet des effectifs minimums de professionnels de santé dans les établissements sanitaires et médico-sociaux est épineux. Selon certains cadres ou certaines directions, il n'y aurait pas d'obligation légale en termes d'effectif ou de quotas, même en cas de surcharge de travail. L'argument ne tient pourtant pas la route. 

Cet article a été rédigé par un juriste en droit de la santé et de la protection sociale, pour Actusoins.com. 

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Sous-effectif en service de soins : que dit la loi ? quelle responsabilité en cas de dommage ?Effectif minimum : ce que dit la loi

Le nombre minimum de soignants dans un établissement de santé est une notion juridique floue. Il existe des textes de lois qui définissent un effectif minimum ou des obligations particulières mais ce n’est pas le cas pour l’ensemble des services de soins des établissements sanitaires ou médico-sociaux.

Dans certains domaines, il existe des obligations précises ou des obligations plus généralistes. On peut citer comme exemple la réanimation ou encore les urgences :

La réanimation :

L’article D6124-32 du code de la santé publique dispose :

 « Sous la responsabilité d'un cadre infirmier, l'équipe paramédicale d'une unité de réanimation adulte comprend au minimum :

- deux infirmiers ou infirmières pour cinq patients ;

- un aide-soignant pour quatre patients. »

Les urgences :

L’Article D6124-2 du code de la santé publique dispose :

« L'effectif de la structure de médecine d'urgence est fixé de façon que cette structure puisse assurer ses missions.

L'effectif est adapté au nombre d'appels adressés au SAMU, au nombre de sorties de la structure mobile d'urgence et de réanimation, dénommée SMUR, ou au nombre de passages de patients dans la structure des urgences.

L'effectif du personnel médical et non médical est renforcé pendant les périodes où une activité particulièrement soutenue est régulièrement observée. »

Une responsabilité engagée pour les établissements

Pour la plupart des autres services de soins, il n’y a aucune obligation légale d’effectif minimum de professionnels paramédicaux en fonction du nombre de patients. Cela ne veut pas dire que la direction de l’établissement ou le cadre de santé ne doit pas adapter le nombre de soignants en fonction de la charge de travail. 

Car même sans obligation légale concernant les effectifs, un juge pourra condamner un établissement de santé, un membre de la direction, voire un cadre, en cas de dommage sur le patient, si ce dernier résulte d’un défaut de prise en charge du fait d’un manque de soignants dans le service de soins.

On peut notamment citer l’article L6112-2 du code de la santé publique qui dispose que « les établissements de santé assurant le service public hospitalier (…) garantissent à toute personne qui recourt à leurs services :

1° Un accueil adapté, notamment lorsque la personne est en situation de handicap ou de précarité sociale, et un délai de prise en charge en rapport avec son état de santé ;

2° La permanence de l'accueil et de la prise en charge, notamment dans le cadre de la permanence des soins, ou, à défaut, la prise en charge par un autre établissement de santé ou par une autre structure en mesure de dispenser les soins nécessaires ;

3° L'égal accès à des activités de prévention et des soins de qualité ; »

S'adapter

Le professionnel de santé paramédical salarié intervient selon les moyens mis à sa disposition, qu’ils soient humains ou matériels. En cas de sous-effectif, il doit prioriser ses soins, en commençant par les plus urgents.

Si un dommage intervient sur un malade suite à un défaut de surveillance ou à un défaut de soins, la responsabilité du professionnel ne sera pas engagée, si ce dernier du fait d’une surcharge conséquente de travail n’a pas pu s’occuper de la personne.

En 2004 la cour d’appel de Rennes a statué dans le cadre d’une affaire concernant un dommage sur une patiente survenu dans un service de réanimation. Suite à plusieurs opérations intestinales et à un séjour en réanimation prolongé, la patiente s'est vue atteinte d'une paraplégie.

Même si les experts ont considéré que la surveillance n'a pas été optimale dans le service, l'infirmier qui était seul et très occupé, ayant une garde chargé la nuit où les complications sont survenues, n'a pas était condamné, considérant qu’avec les moyens dont il disposait, il n’a commis aucune faute.

Vincent Lautard
Infirmier et juriste en droit de la santé

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Réactions

1 réponse pour “Sous-effectif en service de soins : que dit la loi ? quelle responsabilité en cas de dommage ?”

  1. leilou dit :

    Encore une fois rien n’est clairement dit pour protéger le soignant dont la considération est aussi fragile que son diplôme et ce sera donc au bon vouloir et à l’appréciation souveraine du juge et je n’ose même pas imaginer le jour où l’on doit en tant que pot de terre, faire face au pot de fer que sont les médecins et leurs mauvaises habitudes pour certains de se reposer sur nous, ou l’institution, de répondre de nos actes alors que nous sommes aussi émoussés sinon plus, qu’un trocart qui aurait mainte fois servi …. Le quotidien de soignant aujourd’hui, tellement critiqué n’en est qu’un pauvre petit buisson qui cache la forêt de requins procéduriers qui nous voient comme du pain béni sur qui taper. L’on doit dès lors se résoudre à espérer la clémence et l’impartialité du juge mais une jurisprudence en l’absence d’un fondement juridique et légal vaut il quelque chose ?

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