Lettre ouverte à un étudiant infirmier

Je vais te tutoyer, si tu me le permet. Ce n'est pas par condescendance, ni par mépris mais c'est comme ça, dans le métier nous nous tutoyions (presque) tous. Que nous soyons professionnels ou en devenir, nous sommes soignants dés le premier jour où nous mettons les pieds dans un institut de formation.

mainVoilà dans ce billet ce que j'aimerais te dire, ce que j'aimerais partager avec toi avant que tu ne te lances, tête baissée dans ces études, certes courtes mais denses et intenses.
Tu as surement suivi les actualités, la grogne justifiée du personnel des hôpitaux, l'expression du ras-le-bol, de la fatigue voir du burn-out que génèrent des conditions de travail de plus en plus difficiles.
Ta position d'étudiant est d'autant plus délicate car tu sais que tu vas passer une bonne partie de ta formation sur le terrain, en stage et te frotter à cette réalité bien sombre.
En avoir conscience est important mais je sais qu'au départ, la motivation reprend le dessus et le désir d'apprendre est une force qu'il ne faut pas quitter des yeux. Jamais. Même une fois diplômé, garde cette soif, toujours, ainsi que celle de te former continuellement aux nouvelles techniques de soin. C'est essentiel.

Ces techniques font partie des piliers de la formation et s'acquièrent de manière basique : apprentissage, observation, pratique. À L'IFSI, on va t'enseigner les plus courantes puis tout au long de ta carrière tu pourras les parfaire et en découvrir de nombreuses autres. Tu auras surement tendance à te focaliser dessus ainsi que sur la théorie qui les accompagnes. Cela représente souvent une source de stress importante pour les étudiants car les soins sont nombreux, très nombreux et souvent spécifiques aux différents services et spécialités médicales. Il est difficile de tout maitriser en trois années seulement. Mais en ayant les connaissances suffisantes des principes techniques des soins, l'expérience, les années de pratiques feront le reste, ne t'inquiètes pas.

C'est normal et important mais n'oublie pas de garder un oeil sur tout le reste. Parce-que si l'aspect technique de notre métier est essentiel, la réflexion éthique l'est au moins autant sinon plus. Tu apprendras rapidement que nous ne sommes pas seulement des techniciens même si l'on veut trop souvent nous réduire à de simples exécutants.
Ne néglige pas cet aspect, ne le met pas de côté te disant que tu auras tout le temps d'y penser une fois le diplôme passé. Ne fait pas ça.
L'éthique que tu te construiras t'aideras à dire " non " à l'inacceptable qu'on te proposera trop souvent et cela non seulement pour le bien de la personne ou du groupe de personne que tu as en charge mais aussi ton propre bien-être qu'il soit physique ou moral.
Elle est immatérielle, inquantifiable mais c'est elle, c'est cette éthique qui sera ta colonne vertébrale de soignant. Celle qui te portera pour t'aider à garder la tête haute, les yeux bien droits te permettant de ne jamais perdre de vue la façon dont tu voudras exercer et l'orientation que tu auras choisi pour ta carrière.

Tu es étudiant, futur infirmier diplômé d'état, tu es l'avenir de notre métier. Sache que même si une partie des professionnels que tu croises en stage n'est pas très accueillant voire désagréable, tu restes pour nous tous l'espoir que demain les soignants sauront tirer leur profession vers le haut. Et cela grâce à une réflexion éthique mûrie et construite autour du refus de soigner l'humanité sur des bases comptables et tendant toujours plus vers le profit.
J'ai confiance en toi, nous avons confiance en toi.

Mais tu as raison, tout ne repose pas sur tes épaules. Nous sommes des milliers de soignants diplômés, en exercice...

Alors à nous, d'abord, de t'ouvrir la voie et d'éclaircir le chemin.

ActuSoins remercie Anne pour ce partage. D'autres articles - des tranches de vie, des réflexions,...- à lire (presque tous les jours) sur son une infirmière à la maison.

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Réactions

31 réponses pour “Lettre ouverte à un étudiant infirmier”

  1. gg dit :

    Oui, belle lettre. Bon sinon deception en lien avec certains commentaires…
    Il n’y a pas les gentils etudiants d’un coté et les mechants professionnels aigris de l’autre…. Ceux qui savent prendre en charge et les maltraitants. Ce n’est pas si simple !!!!!!!!!!!!
    Le monde des soignants est une petite societe à elle seule avec ses bons , ses cons, ses truands, ses faibles et ses forts….
    J’ai aussi vu de mauvais etudiants qui feront de mauvais pro s’ils passent entre les mailles, et il en passe toujours entre les mailles….

  2. 15 ans de diplôme
    Un changement vers Idec
    Déception déception
    Marre……
    Le travail en ehpad est de la maltraitance….. lever traitement petit dej toilette attente repas midi changé sieste goûter animation repas coucher tôt. ….
    On nous bassine avec les bonnes pratiques la personnalisation mais quel ehpad peut le faire???
    Je ne me reconnais plus.
    J’ai honte de ce que mon métier me fait faire.
    Nous sommes complices de cette maltraitance collective.
    Bref…..

  3. Plum dit :

    C’est bien écrit oui, il faut le reconnaître. Une belle idéalisation du métier, probablement nécessaire mais… Car oui il y a toujours un « mais ».
    Je suis jeune diplômé, pas plus tard qu’il y a quelques mois et je peux vous assurer qu’en stage des infirmières comme ça je n’en ai pas croisé une seule. Non, bien au contraire. J’ai plutôt vu des infirmières aigries (oui les conditions sont difficiles), incapables de se remettre en question, considérant que « c’était mieux avant » (surtout la formation et la grande déesse MSP), avares de partager avec toi leurs « petits trucs » ; et j’en passe.
    Ce que j’ai appris à ces contacts, c’est l’infirmier que je ne voulais pas être, le tuteur de stage que je ne voulais pas être. Alors oui, je me reconnais comme professionnel dans cette lettre et au contact des étudiants je tente de leur apporter toutes mes connaissances, mon petit savoir faire, mes techniques, ma façon de prendre en charge, le relationnel que j’installe avec les patients et surtout, quand ils le méritent, je n’oublie jamais de valoriser leur travail, leur évolution et leurs acquis.

    • Un peu abusé comme résumé tu ne pas pas avoir eu ton diplôme sans avoir reçu le savoir faire des ides lors de tes stages

    • Plum dit :

      En effet, tout autant que cette fameuse lettre de l’IDE à l’élève …

    • Les MSP c était la vie ca ! Un peu de stress, de remise en question, de boulot de préparation, des DSI à peaufiner un maximum, en quelque sorte une mise en situation de rigueur, ce qui manque beaucoup aujourd’hui…. Évidemment je ne fais aucune généralité mais maintenant beaucoup de leche, de fayotage, et le porte folio comme bible…. C était peut être pas plus mal avant !

  4. C’est trop beau j’arrête pas de chialer….dans la série « cul-cul la praline » on est très forts dans la profession. Allez expliquer ca à une infirmière qui est seule avec plusieurs dizaines de patients et qui n’a même pas le temps de pisser. Bienvenue dans la vraie vie.

  5. Regine Antier dit :

    Soyons reconnaissants à toutes ces personnes qui sont dévouées à leur prochaine . Merci

  6. Julien Pignol dit :

    Bien écrit et tellement vrai, merci de remettre l’homme, avec une grand H, au centre de la préoccupations soignante.

  7. Le lien ne fonctionne pas pour moi. Pourriez vous faire une capture d’écran ?

  8. Merci pr cette lettre ca redonne l’envie et le courage de continuer !

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