Un patient peut-il quitter un service des urgences sans avoir été pris en charge par un médecin ?
Aux urgences, il peut arriver qu’un patient soit réorienté vers la ville ou renvoyé à domicile par un infirmier ou un infirmier en pratique avancée, sans avoir été examiné par un médecin. Pourtant, cette pratique n’est pas légale.
Cet article a été rédigé par un juriste en droit de la santé, pour ActuSoins.com
Quand un patient arrive aux urgences, il peut être pris en charge par un infirmier assurant une fonction d’accueil et d’organisation, l’IOA (Infirmier organisateur de l’accueil), qui « met en œuvre, par délégation du médecin présent dans la structure, les protocoles d’orientation et coordonne la prise en charge du patient, le cas échéant jusqu’à l’hospitalisation de ce dernier » (article D6124-18 du code de la santé publique).
Le rôle de cet infirmier consiste principalement à effectuer un tri parmi les patients, permettant à ceux dont l’état nécessite une prise en charge urgente, d’être dirigé prioritairement vers un médecin. Cela ne signifie pas qu’il peut se substituer au médecin et prendre la décision d’hospitaliser le patient, ou même de le renvoyer chez lui. Car l’infirmier ne pose ni diagnostics, ni conclusions cliniques.
L’IPA aussi concerné
En 2021, le champ d’intervention de l’infirmier en pratique avancée mention « urgences » a été établi. Conformément à l’article R4301-3-1 du code de la santé publique, cet IPA peut intervenir directement auprès de patients aux urgences pour « des motifs de recours et les situations cliniques présentant un moindre degré de gravité ou de complexité ».
Contrairement à l’IDE, l’IPA peut donc, dans ce cas de figure, établir des « conclusions cliniques » sans que le patient ait été examiné par un médecin. Cependant le médecin de la structure des urgences doit intervenir au cours de la prise en charge. Cela implique que le médecin voit le patient avant son départ.
Seule exception : le refus de prise en charge
Il convient également de préciser qu’il existe une exception, mais que celle-ci découle d’une décision prise par le patient lui-même et non par l’infirmier. Un patient majeur, sans troubles cognitifs ni troubles psychiatriques importants, a en effet le droit de quitter la structure de sa propre initiative sans avoir vu de médecin. Dans ce cas, l’infirmier doit le laisser partir, après avoir essayé de le convaincre d’accepter d’être examiné par un médecin. L’infirmier devra informer ce dernier de la décision du patient.
Enfin, notons que, quelle que soit la situation, l’effectif de l’équipe médicale de la structure de médecine d’urgence doit comprendre un nombre de médecins suffisant pour qu’au moins l’un d’entre eux soit présent en permanence (article D6124-3 du code de la santé publique).
Vincent Lautard Infirmier et juriste en droit de la santé
Il y a quelques années, le Centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Tours a été condamné à verser plusieurs dizaines de milliers d’euros en réparation d’un préjudice moral à la famille d’une patiente décédée en 2008 à la suite de son passage aux urgences.
Cette personne se plaignait depuis plusieurs jours de douleurs à l’épaule, au bras et à la poitrine du côté gauche, ainsi que d’essoufflement. Elle a été prise en charge par une IOA des urgences de l’hôpital. Cette dernière, après s’être entretenue avec le médecin urgentiste, a demandé à la patiente de rentrer chez elle, et de contacter son médecin traitant. Peu de temps après, la patiente a été retrouvée morte chez elle des suites d’une embolie pulmonaire secondaire à une phlébite.
Le CHRU a été condamné pour défaut d’organisation car la patiente n’avait pas été prise en charge par un médecin.
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Entre l'afflux croissant de patients et la difficulté de trouver des lits d'aval pour hospitaliser ceux qui le nécessitent, les infirmiers, épuisés, se serrent les coudes et espèrent voir évoluer leur rôle mais, dans certains services, les effectifs commencent à manquer sérieusement.
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