La création d’un « parcours spécifique » raccourci pour les aides-soignants qui veulent suivre la formation en Ifsi a conduit plusieurs organisations infirmières à déposer un recours auprès du Conseil d’État.
Les textes qu’elles contestent, un arrêté du 3 juillet et une instruction du 2 août 2023, prévoient la mise en place d’une « formation accélérée destinée à des aides-soignants expérimentés [puis] une dispense totale et automatique de la première année de formation en soins infirmiers ».
Cette formation durerait trois mois et serait accessible aux aides-soignants ayant exercé ce métier plus de trois ans durant les cinq dernières années.
Certains y voient une valorisation du métier d’aide-soignant et un accès plus facile et rapide au diplôme d’IDE.
Mais pour les signataires du recours – la FNESI, le Cefiec, l’ANPDE, les syndicats Convergence infirmière et SNPI ainsi que le CEEPAME – il s’agit d’une grave erreur.
Une année superflue ?
« Autant on est pour le fait de favoriser la promotion professionnelle des aides-soignantes, qui représentent d’ailleurs 20% des effectifs en IFSI, autant l’idée de supprimer une année de formation nous paraît scandaleux. Depuis toujours, les infirmières ont suivi la totalité de la formation », s’offusque Thierry Amouroux, porte-parole du SNPI. Selon lui, leur formation et leur expérience, aussi riches soient-elles, ne peuvent remplacer la première année d’étude.
« Le référentiel d’un aide-soignant n’a rien à voir avec celui qui est enseigné en première année, poursuit le porte-parole. Tout ce qui concerne la biologie, la pharmacologie, la méthodologie de la recherche… C’est extrêmement grave d’enlever à ces étudiants un tiers des cours. » Les cours de biologie ou de raisonnement clinique en IFAS ne sont pas les mêmes que ceux qui sont dispensés en IFSI, souligne aussi Michèle Appelshaeuser, présidente du Cefiec.
« La première année est une année fondamentale, insiste aussi Manon Morel, la présidente de la Fnesi. On y enseigne les matières de base sur lesquelles les étudiants ont souvent le plus de difficultés, y compris ceux qui sont en reconversion professionnelle. Nous avons même demandé un accompagnement renforcé de ces étudiants », qui n’a pas été obtenu.
Sans cette première année, les aides-soignants du parcours spécifique risquent fort, selon ses opposants, de se trouver encore plus en situation d’échec. « Cela revient à les envoyer au casse-pipe », estime Thierry Amouroux.
Plus grand risque d’échec
« On se bat pour que les personnes en promotion professionnelle aident des validations de leurs acquis et des simplifications pour faire valoir leur formation et leurs acquis, poursuit la présidente de la Fnesi, mais ce n’est pas mis en place aujourd’hui » et le parcours spécifique prévu ne répond pas non plus à cet enjeu, estime-t-elle.
Surtout, ajoute Manon Morel, « il n’est pas conforme à l’intégration universitaire de la formation infirmière » en cours : par exemple, la décision de permettre à une aide-soignante d’entrer dans ce parcours spécifique et donc en deuxième année d’Ifsi directement sera prise par leurs employeurs et non par une autorité académique, déplore-t-elle.
Envisager la possibilité que des étudiants se passent d’un an d’étude dévalorise également, selon elle, la formation et la profession, alors même que tous les acteurs du monde infirmier travaillent à leur revalorisation.
Les organisations infirmières du groupe de travail ministériel sur la réingénierie de la profession se sont tous opposés au projet, en vain. « Il est prévu que le métier d’infirmière évolue vers des tâches plus complexes et plus de responsabilités, observe Michèle Appelshaeuser. Le fait que certains étudiants puissent entrer plus rapidement dans la formation et la profession me questionne » car cela paraît en contradiction avec l’évolution recherchée.
Aussi, poursuit-elle, le parcours spécifique s’inscrit dans la formation telle qu’elle est régie par le référentiel de 2009 alors même que de sa réingénierie est en cours. Il risque fort d’être mis en place très peu de temps avant que la formation en Ifsi soit complètement remaniée… Selon la présidente du Cefiec, « les choses sont faites à l’envers ».
Contradiction
Il s’agit pour les employeurs de disposer d’infirmières « plus rapidement et à moindre coût », estime Michèle Applesheuser, sous la pression de ceux du secteur privé lucratif, précise Thierry Amouroux, pour n’avoir à payer les aide-soignants en formation que deux ans au lieu de trois. Selon la présidente du Cefiec, les premiers intéressés n’ont pas été consultés.
Le Cefiec va lancer prochainement une enquête auprès des ex-aide-soignants qui ont suivi la formation complète pour savoir si la première année d’études leur a semblé superflue. Et les organisations signataires du recours – et celles qui voudraient les rejoindre, indique le porte-parole du SNPI, vont lancer une campagne de communication à destination des patients et des familles sur le sujet.
Selon lui, une formation plus courte ne peut qu’avoir des conséquences négatives sur la qualité des soins.
Géraldine Langlois
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