Le mouvement infirmier serait-il en panne ? Quelques parapluies et une dizaine d’infirmières ce 12 mai devant le ministère de la Santé à Paris, à l’appel du collectif des Ni Bonnes ni nonnes ni pigeonnes (NB3NP). Le mouvement donne des signes d’épuisement.
Certes la pluie n’a guère favorisé le rassemblement.
Les mots d’ordre sont-ils trop généraux ? Le collectif appelle à ne pas « renoncer à soigner éthiquement et dignement ». Il cherche à rassembler ceux et celles qui sont « en conflit dans (leurs) valeurs de soins », qui sont convaincus « que le patient n’est pas un marché ».
De fait de nombreux soignants adhèrent à ces mots d’ordre – les NB3NP ont 80 000 amis sur facebook ! – mais quand il s’agit de braver le bitume et la pluie, le nombre de raréfie.
Les infirmières prêtes à accepter n’importe quoi ?
« Les infirmières se mobilisent peu. On a l’impression qu’elles sont prêtes à accepter tout et n’importe quoi », lance Marie, une infirmière, avant de modérer ses propos : « en fait elles n’ont qu’une envie, c’est de se reposer après une journée harassante. Mais du coup, tout se passe derrière l’ordinateur. »
Le collectif qui se voulait revendicatif se transforme ainsi lentement en plateforme de discussion et d’échange.
Autre frein : la peur du gendarme. « Je ne donne pas mon vrai nom, j’ai peur des représailles. Qui sait, ils seraient capables de refuser ma prochaine demande de mise en disponibilité », indique Marie, dont le prénom a été modifié.
Enfin « personne n’est capable de se mobiliser ensemble », s’exclame Aurélie. De fait, Resilience a décidé de manifester le 22 mai avec les infirmières scolaires. Les syndicats traditionnels appellent de leur côté à descendre dans la rue le 15 mai avec les agents de la fonction publique. Encore un mois de mai sous le signe de la dispersion…
Le ministère écoute mais n’entend pas
Tandis qu’une dizaine d’infirmières tenait la banderole sous la pluie, d’autres portaient les revendications de la profession au ministère de la Santé. “Nous avons été écoutées une heure par deux représentantes, l’une des ressources humaines, l’autre du service exercice et déontologie, mais a-t-on été entendues”, se demande Monia Brun, infirmière libérale et représentante du collectif.
Ce dernier a une fois de plus développé les principales revendications de la profession : “nous avons demandé la mise en place d’un ration soignant/soigné, rappelé qu’une infirmière pour 90 résidents en Ehpad, cela devient inhumain et dangereux pour les patients”, explique-t-elle.
La délégation des NB3NP a également réclamé “une meilleure reconnaissance salariale” pour la profession et “la reconnaissance du burn-out comme maladie professionnelle”.
Quand le management industriel entre à l’hôpital
Le collectif refuse également la méthode de management Lean utilisée dans la construction automobile qui a fait son entrée à l’hôpital. “Une cadre de santé a expliqué à une infirmière que le café se prend debout pendant la pause pour être plus vite d’attaque. Pareil pour les transmissions, elles doivent se faire debout pour éviter les pertes de temps”, s’indigne Monia Brun.
Le collectif fait aussi entendre la voix des libérales : “il est urgent de remettre à plat la nomenclature qui est désuète. Le système du deuxième acte gratuit et du troisième gratuitement, comme chez Carrefour, ne nous permet de passer du temps suffisant auprès du patient. Cela n’est pas en accord avec la déontologie et le métier que l’on veut exercer”, ajoute la représentante du collectif.
La voix des salariées et des libérales
Les libérales s’inquiètent également de la montée en puissance accélérée de l’ambulatoire que veut porter Marisol Touraine.
“Une réhospitalisation si le patient sort très vite, trop vite, cela coûte cher et cela ne va pas dans le sens de la qualité des soins. Nous avons demandé à ce que les professionnels du terrain soient consultés dans le cadre de ce projet”, ajoute Monia Brun.
“Il va falloir que cela bouge. les soignants ont besoin d’actions palpables”, conclut-elle. Pas de petites mesurettes.
Cependant, face à la faible mobilisation, le ministère ne prend pas de risques à faire la sourde oreille !
Cyrienne Clerc
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