La profession infirmière unie contre « le corporatisme médical »

La profession infirmière unie contre « le corporatisme médical »

Comme sur un champ de bataille, deux camps se sont affrontés, hier, le 14 février : d’un côté, dans la rue, des médecins anti-loi Rist, de l’autre, sur les réseaux sociaux, les infirmiers montés au créneau pour dénoncer le "corporatisme médical".

Les sénateurs ont adopté le 14 février, la proposition de loi Rist, accordant ainsi l’accès direct et la primo-prescription aux infirmiers en pratique avancée (IPA) dans le cadre d’un exercice en structure coordonnée [le texte doit désormais être examiné en commission mixte paritaire avant son adoption définitive, NDLR].

#InfirmiersPasTroufions

C’est notamment contre ce texte de loi que 4500 médecins ont manifesté le même jour (voir encadré), pour exprimer ouvertement leur mécontentement.

Depuis plusieurs semaines maintenant, ils multiplient les communications pour exprimer leur opposition à l’attribution de nouvelles compétences aux IPA.

Un membre du collectif « Médecins pour demain », a même estimé, sur France Info, qu’avec les mesures prévues dans le texte de loi Rist, « n’importe quel troufion avec trois mois de formation pourra renouveler les ordonnances ».

Il n’en fallait pas plus pour provoquer l’ire de la profession infirmière. En réponse au mouvement médical, les infirmiers ont dégainé un hashtag #Infirmierspastroufions sur Twitter.

« On a lancé le hashtag #InfirmiersPasTroufions car les infirmiers sont dénigrés et insultés depuis des semaines par des médecins, qui sont minoritaires parmi les médecins, mais qui font beaucoup de bruit notamment dans les médias et les réseaux sociaux. On ne peut pas laisser faire ! », explique sur Twitter Vincent Lautard, infirmier et juriste [également collaborateur d’ActuSoins, ndlr].

Depuis hier, le hashtag est largement repris et les témoignages associés s’intensifient. « Aujourd’hui les médecins s’élèvent contre nous #idel #Ide #Ipa. Pourtant qui assure les soins aujourd’hui aux patients ? Le dimanche ? Les fériés ? La nuit ? Qui appelle le médecin quand il y a problème ? Qui gère pour ne pas déranger pour rien ? », interpelle un infirmier.

« Je suis infirmier, j’ai réussi un concours avec 10% de pris. J’ai une licence, un master et des DU. Je suis étudiant pour devenir IPA.  Et @MedPourDemain ose dénigrer mes qualités professionnelles et intellectuelles, m’insulter et me moquer.  #InfirmiersPasTroufions », lance un autre.

Une cinquantaine d’associations infirmières alliées

Dans ce combat, l’ensemble de la profession est uni.

Infirmiers en soins généraux, IPA, infirmiers anesthésistes (Iade), infirmiers de bloc opératoire (Ibode), infirmiers puériculteurs, cadres : tous ont décidé de faire front, en soutien à la proposition de loi Rist.

Cinquante organisations représentant l’ensemble des composantes de la filière infirmière ont également signé un communiqué de presse commun rappelant leurs revendications. « Depuis de nombreuses années, les infirmier.es de tous secteurs d’exercice, et tous niveaux universitaires confondus, ne sont pas reconnu(e)s à hauteur de leurs compétences et responsabilités. Les 700 000 professionnels infirmiers sont bridés par une législation et réglementation d’un autre temps qui empêche la reconnaissance comme acteur de premier recours », dénoncent les organisations.

Elles regrettent l’opposition « systématique médicale à toute évolution des professions de santé non médicales, allant à l’encontre de la prise en charge des patients dans ce contexte de pénurie médicale et d’accès aux soins », considérant que « les postures d’un corporatisme médical séculaire et autoritaire n’ont jamais fait progresser la santé de nos concitoyens. ».

Elles vont même plus loin en plaidant pour la permanence des soins assurée par les infirmiers afin d’offrir un accès de qualité à la santé pour la population française, et pour l’accès direct aux 700 000 infirmiers, afin de réduire les pertes de chance et de fluidifier le parcours patient.

Des demandes – parmi d’autres – qu’elles souhaitent mener en concertation avec les organisations médicales. « Élever et reconnaître les compétences des infirmiers dans toutes leurs spécificités est un élément de résolution indispensable du défi qu’on nous demande aujourd’hui de relever dans l’amélioration de l’accès aux soins et du parcours », concluent-elles.

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