« Le e-learning se développe très lentement dans le milieu hospitalier. Il n’est pas encore ancré dans la culture de formation des professionnels de santé », explique en guise de présentation Lisette Cazellet, consultante en formation pour l’association Formatic Santé.
Pourtant, dans d’autres milieux, l’utilisation des nouvelles technologies et d’Internet pour se former est chose plus commune. « Les laboratoires pharmaceutiques, les banques, les assurances, les grands comptes comme EDF ou La Poste proposent depuis longtemps des formations e-learning à leur personnel », ajoute-t-elle.
La cause de ce retard d’usage des nouvelles technologies pour la formation des soignants, c’est, selon Lisette Cazellet, le manque d’offres de formation par les structures de formation du secteur : « C’est un cercle vicieux. N’ayant pas d’offres, peu sont les soignants qui savent ce qu’est la formation en e-learning. Seuls les férus d’informatique ou les gens très connectés se lancent en autonomie, sans passer par leur service de formation et arrivent ainsi à se débrouiller en trouvant leurs propres enseignements en ligne ».
Un panel de méthodes adaptées
L’idée du e-learning ? Avoir tout un panel de formats d’apprentissage à disposition du soignant. Cours en ligne, vidéos, tutoriels, serious games, forums interactifs, MOOC (cours en ligne gratuits ouvert à tous)… Autant de méthodes mais aussi d’outils qui peuvent répondre aux besoins et aux attentes des professionnels. « Le e-learning est plus adapté à l’activité actuelle des personnes. Les professionnels ne peuvent pas forcément se déplacer pour une formation ou n’ont pas le temps pour cela », explique Pierre Trudelle, de la Haute autorité de Santé, pilote d’un guide sur l’amélioration des pratiques pour le e-learning.
Pas de barrière géographique donc. Pas de barrière organisationnelle non plus. « J’ai pu faire le programme à mon rythme et je gérais mon temps de façon autonome », témoigne Alice, une infirmière qui a suivi un enseignement en ligne sur les plaies et la cicatrisation. C’était instructif, complet, pédagogique et ludique. Les vidéos et les documents proposés étaient plus intéressants à mon sens que ce qui aurait pu être donné dans une formation classique. Néanmoins il m’a un peu manqué l’aspect humain, malgré le forum interactif qui permettait aux participants et aux intervenants d’échanger entre eux ».
L’atout des formations mixtes : le côté humain
Un aspect humain qui ne disparaît pas totalement néanmoins avec le e-learning. « La plupart des formations sont mixtes. Il est évident que pour certains enseignements très techniques, il est nécessaire de suivre une partie en présentiel. L’avantage du e-learning dans ce cas, c’est qu’il apporte dans un premier temps toute la partie théorique et réduit ensuite le temps de présence en salle pour la pratique avec des mises en situation non virtuelles », explique Pierre Trudelle de la HAS.
D’ailleurs, si l’avenir de la formation réside dans le numérique, impossible d’évaluer à quelle vitesse cela se fera, ni à quel rythme les professionnels suivront le mouvement. « Ce qui est certain, c’est qu’il y aura encore beaucoup plus d’échanges par voie électronique et qu’il y aura aussi davantage d’outils pour se connecter », ajoute le chef de projet.
« On the job training » : le plus autodidacte
Si certaines méthodes de formation en e-learning sont déjà bien définies, avec des programmes délivrant des diplômes, des certificats et/ou répondant au cahier des charges pour valider son obligation de formation via le DPC (Développement Professionnel Continu), d’autres sont encore à l’état hybride et devront trouver leur place dans le système de formation continue des professionnels de santé.
C’est le cas notamment de toutes les connaissances acquises par le professionnel sur son lieu et à son poste de travail. Chercher dans un protocole de service via un logiciel le comportement à adopter face à une situation précise, demander à une application une recommandation concernant un geste technique, vérifier le dosage d’un traitement… « On pourrait imaginer que dans le futur, toutes ces acquisitions du quotidien soient considérées comme de la formation », explique Pierre Trudelle, s’appuyant sur le modèle du portfolio anglo-saxon. En Angleterre, les soignants peuvent lister et recenser toutes ces actions individuelles. Cela leur permet de faire le point plus facilement sur leurs connaissances, mais aussi sur ce qui leur reste à apprendre. Ils relatent alors tout cela lors de leur entretien d’évaluation annuel ».
Ce serait donc une façon d’optimiser la formation. Ne garder en formation présentielle ou en formation en ligne que ce qui n’a pas pu être acquis de façon autodidacte. Mais pour cela, précise le chef de projet, « il faut que les cadres, les chefs de services et autres encadrants puissent recenser les besoins des soignants et puissent mettre à leur disposition tous les outils nécessaires ».
Malika Surbled
Cet article est paru dans le numéro 20 d’ActuSoins magazine
(mars /avril /mai 2016).
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Un guide de recommandations à l’usage des concepteurs de programmes
En avril 2015, la HAS a sorti un guide* de conception de formation ouverte et à distance dans le monde de la santé. Ce document est destiné à toute personne impliquée dans l’élaboration et la mise en place de programmes de formation par e-learning pour les professionnels de santé en France dans le cadre de la formation continue ou du développement professionnel continu.
« Proposer du e-learning, ce n’est pas simplement mettre des cours en ligne », explique Pierre Trudelle, chef du projet. Cela nécessite une ingénierie pédagogique réelle et spécifique. Ce guide a pour but de proposer des outils, des moyens, des méthodes, pour élaborer des programmes plus fiables et mieux construits ».
Blended learning, embedded e-learning, formation hybride, formation multimodale… Modèles par simulation, par apprentissage autonome, ou encore en « on the job training », MOOC… Le guide aborde les tendances actuelles et futures, le processus d’élaboration d’un dispositif de e-learning, le niveau technique et les moyens mis à disposition pour développer une pédagogie efficace, l’évaluation de l’efficacité des programmes ainsi que des aspects économiques et juridiques.
Autant d’informations et d’orientations importantes à connaître pour élaborer un programme en e-learning. Un « plus » pour les curieux et les passionnés du numérique aussi…
Pour aller plus loin : formation continue DPC pour les infirmières et infirmiers libéraux
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