Crise de l’ONI : Une « défaillance de l’Etat » pour les autres Ordres

Crise de l’ONI : Une « défaillance de l’Etat » pour les autres Ordres

S’il a évité de justesse la cessation de paiement, l’Ordre national infirmier reste en sursis. Une situation inédite qui inquiète les ordres médicaux et paramédicaux.

Crise de l’ONI ordre national des infirmiers : Une « défaillance de l’Etat » pour les autres OrdresLe 29 juillet dernier, l’Ordre national infirmier (ONI) a évité de justesse le dépôt de bilan. Mais il n’a obtenu qu’un sursis de courte durée. La Bred, son partenaire financier, a accepté de reporter le remboursement de ses dettes jusqu’au 30 août.

Dans quelques jours, l’ONI va donc devoir convaincre la banque de la pertinence de son plan de restructuration, sous peine de se voir couper les vivres.

Face à cette situation, les ordres médicaux et paramédicaux oscillent entre compassion et consternation. « Nous sommes désolés de ce qui arrive à l’Ordre des infirmiers » assure Marie-Josée Keller, présidente du Conseil national de l’Ordre des sages-femmes. Selon elle, « la profession gagnait beaucoup à être structurée au sein d’un Ordre, ainsi que les patients ».

« Boîte de Pandore »

Concernant les causes des difficultés financières rencontrées par l’ONI, Marie-Josée Keller considère que l’ordre infirmier « n’a pas reçu le soutien des pouvoirs publics ». Un avis partagé par l’Ordre national des pédicures-podologues (ONPP). « Je suis fortement choqué par le recul du gouvernement sur cet Ordre. Créer l’ONI était une volonté de la profession et des pouvoirs publics, ils ont lâchement été lâchés par le ministère » s’insurge Bernard Barbottin, le président de l’ONPP. Pour lui, les syndicats sont à l’origine des difficultés de l’ONI. « Personnellement, je pense qu’ils ont torpillé ce projet par peur de perdre leur pouvoir » estime-t-il.

Le président de l’ONPP critique aussi le compromis d’une cotisation facultative pour les salariés. « Permettre aux salariés de ne pas cotiser à leur Ordre, c’est ouvrir une boîte de Pandore » juge-t-il, « je crains que cela crée un précédent fâcheux pour d’autres Ordres rassemblant aussi des salariés et des libéraux ».  Comme l’Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes par exemple…

Un mauvais augure pour l’Ordre des Kinés ?

Confronté à une fronde d’une partie de la profession, son président Jean-Paul David assure avoir surmonté le problème « grâce à des consultations harmonieuses et en étant patients ». L’OMK a surtout emprunté la voie judiciaire : les récalcitrants à l’Ordre sont désormais poursuivis en justice pour exercice illégal de la profession.

Son président regrette l’impasse où se trouve l’Ordre infirmier. « Je souhaite qu’il reparte en rassemblant toute la profession infirmière, parce qu’un Ordre ne peut exister qu’avec l’ensemble des professionnels. On ne peut pas séparer salariés et libéraux » estime-t-il, tout en pointant l’ambivalence des pouvoirs publics : « on peut se demander si le législateur a bien fait de proposer un Ordre pour une profession majoritairement salariée. Mais à partir du moment où la décision a été prise, il doit le soutenir ».

Moyen de pression

Chez Alizé, au contraire, on se réjouit. Ce syndicat de Masseurs-Kinésithérapeutes milite, entre autres, pour l’abolition de son ordre.  « Si l’ONI disparaît, cela servira de moyen de pression pour les opposants aux autres Ordres. L’asphyxie financière est une méthode efficace » salue Christine Erhmann, sa présidente. « Les infirmiers ont presque réussi à abolir l’ONI, mais ce n’est pas encore fini. C’est le feuilleton de l’été ! » s’amuse-t-elle.

Aperçu des affiliations aux autres Ordres

Ordre des Sages-Femmes : Créé en 1945, il compte 69% de salariées. Selon sa présidente, le nombre de réfractaires à l’Ordre est anecdotique : moins d’1% des 20.000 sages-femmes en exercice.

Ordre national des Pédicures-Podologues : Créé en 2006 pour rassembler 11.000 professionnels, il compte 98% de libéraux. Les réfractaires à l’Ordre sont poursuivis en justice pour exercice illégal de la profession.

Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes : Créé en 2004 pour une profession qui compte 80% de libéraux et 20% de salariés. Selon son président, 69% des salariés sont désormais inscrits à l’Ordre. Au 1er juin 2011, l’OMK comptait 64.512 inscrits, soit 91,4% de la profession.

Amélie Cano

Restez connecté ! Installez l'application gratuite ActuSoins