Je suis infirmière en établissement public hospitalier. Ma hiérarchie m’informe que je vais devoir intégrer un nouveau service dans lequel je ne connais aucun des patients ; en outre l’ambiance y est délétère. On ne m’a pas demandé préalablement mon accord. Puis m’y opposer, quels sont mes droits ?
De manière générale, il importe de souligner qu’en l’absence de modification importante dans la nature de ses fonctions, le changement d’affectation d’un agent public dans l’intérêt du service constitue pour les tribunaux administratifs et le Conseil d’Etat une simple mesure d’organisation interne, laquelle est insusceptible de recours contentieux.
Dès lors que l’emploi d’affectation de l’agent est un de ceux qui correspond à son grade et dans la mesure où il n’est pas porté atteinte à ses attributions professionnelles, il a été jugé que l’agent ne peut contester cette mesure (Conseil d’Etat, 27 janvier 2011, req. n°335271 ; Conseil d’Etat 4 avril 1997, req. n° 142881).
Ainsi, la jurisprudence considère qu’un agent public n’a aucun droit acquis à son maintien dans son service, voire dans ses anciennes fonctions et peut être appelé à tout moment à de nouvelles missions, dès lors qu’il conserve les responsabilités attachées à son grade.
Il a ainsi été jugé que la contestation des consignes d’accueil et de l’organisation mise en place par la direction de l’établissement se heurtait nécessairement au principe d’irrecevabilité des recours des agents du service public contre une mesure d’organisation du service (Tribunal Administratif de Lyon, jugement du 26 septembre 2001 ; Conseil d’Etat, arrêt du 26 oct. 1956).
Se conformer aux instructions
Aux termes de l’article 28 de la loi du 13 juillet 1983, « tout fonctionnaire, quel que soit son rend dans la hiérarchie…doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas ou l’ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public… ».
Aucune disposition légale ou réglementaire ne prévoit par ailleurs que l’autorité hiérarchique doive préalablement requérir l’accord d’un agent avant un changement de service et l’intérêt général l’emporte sur les contraintes personnelles de tel ou tel fonctionnaire.
En droit, un changement d’affectation dans l’intérêt du service sans déclassement ni perte de traitement ni aucun autre préjudice ne constitue pas une sanction disciplinaire (Conseil d’Etat, 15 avril 1988, Vallar c/ CH de Lisieux) et dans ce cas, cette décision n’a pas à être motivée.
L’intérêt du service est entendu de manière large par le juge et selon la jurisprudence l’attitude d’un agent peut justifier un changement d’affectation dans l’intérêt du service.
Le motif le plus fréquent à l’origine d’un changement de service sera d’ailleurs lié aux besoins en personnels dans tel ou tel service.
Toutefois, sont également de nature à justifier un changement d’affectation les dissensions que provoque un agent dans le service (Conseil d’Etat, 21 juin 1968, req. n° 64584) ou l’incompétence du fonctionnaire dans les fonctions confiées que celles-ci soient d’ordre technique ou traduise une inaptitude relationnelle (Conseil d’Etat, 10 juillet 1996, req. n°119886).
Ainsi, l’administration peut charger un agent de tâches différentes ou le placer dans un autre environnement de travail sans que cette mesure soit pour autant considérée comme une sanction disciplinaire déguisée (Cour Administrative d’Appel de Lyon, 20 novembre 1998, req. n°95LY00769).
… à moins de prouver un abus de pouvoir
Ceci étant, l’on ne peut écarter les situations dans lesquelles l’usage du pourvoir hiérarchique traduit un véritablement détournement de pouvoir.
Ainsi, il ne résulte d’aucune disposition ni d’aucune règle que la vie commune entre praticien et infirmier(ère), ou infirmiers et infirmières entre eux, justifie un changement de service, hormis l’hypothèse où cette relation personnelle affecte le service (l’exemple des dissensions, cité plus haut, peut bien évidemment être transposé à un couple).
Bien plus, une telle décision non caractérisée par les nécessités du service serait alors susceptible de constituer un abus de pouvoir caractérisé, voire de constituer une atteinte délibérée à la vie privée : la difficulté majeure repose cependant sur la preuve, la charge de prouver l’abus de pouvoir caractérisé incombant alors à l’agent public ; à fortiori, cette difficulté se double d’une autre : démontrer l’absence de nécessités de service ayant prévalues à la décision de changement d’affectation.
Dès lors, il va de soi que toute démarche devra être envisagée avec diplomatie pour être conciliée avec le nécessaire maintien des relations avec la hiérarchie.
En premier lieu, l’agent pourra solliciter un entretien, soit avec la direction des soins infirmiers, soit même avec la direction des ressources humaines de son établissement.
En l’absence de réponse à la demande d’entretien ou si la situation persiste, il serait alors judicieux de transmettre un dossier complet à un conseil juridique.
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