Les capacités d’hospitalisation ont bien diminué depuis 2019

Face aux chiffres alarmants qui ont circulé ces dernières semaines sur le nombre de lits fermés, le ministère de la Santé a présenté ce jeudi ses propres données. Il en ressort un tableau moins sombre qu’anticipé, mais qui ne lève pas toutes les interrogations.

Les capacités d’hospitalisation ont bien diminué depuis 2019

© Benjamin Clapp / ShutterStock

Il y a, en France, 20 % de lits fermés, faute de soignants, s’alarmait début octobre le conseil scientifique covid 19 du Pr Jean-François Delfraissy.

Un pourcentage qui, pour ce qui concerne l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris, serait plutôt de 13 %, si l’on en croit les propos de son directeur général Martin Hirsch sur BFMTV début décembre. Au niveau national, la Fédération hospitalière de France (FHF) situerait plutôt le taux de fermeture à 6 %, selon une enquête dévoilée dans le JDD début novembre.

La ronde des chiffres faisant danser les inquiétudes, le ministère de la Santé avait promis de présenter une étude afin d’y voir plus clair. C’est chose faite depuis jeudi. Résultat : le nombre de lits ouverts a selon l’avenue Duquesne diminué de 2 % depuis 2019… reste à savoir si on parle vraiment de la même chose.

Le travail effectué par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) du ministère de la Santé est issu d’un questionnaire envoyé à 2300 établissements, toutes activités et tous secteurs confondus : public, privé à but lucratif ou non lucratif, Médecine, chirurgie, obstétrique (MCO), psychiatrie, Soins de suite et réadaptation (SSR), Unité de soins longue durée (USLD), Hospitalisation à domicile (HAD)…

Environ 1100 (47 %) de ces établissements ont répondu, et les données portent sur les mois d’octobre et novembre 2021. On y apprend que si les capacités hospitalières ont diminué de 2 % par rapport à 2019, cette baisse cache des disparités importantes : -7 % en chirurgie conventionnelle, mais + 8 % en chirurgie ambulatoire et + 26 % en HAD, par exemple.

« Il y a évidemment des tensions, et la charge en soins reste extrêmement forte », reconnaissait jeudi la DGOS lors d’un point presse de présentation des résultats. Celle-ci s’empressait toutefois d’ajouter qu’il convient de « nuancer » les constats faits par le conseil scientifique, l’AP-HP ou la FHF.

D’ailleurs, ajoute le ministère, on ne parle pas tout à fait de la même chose, car les chiffres qui ont alarmé l’opinion comparent le nombre de lits effectivement ouverts à « une capacité théorique », une situation idéale « qui peut varier d’un moment à l’autre », tandis que ceux de la DGOS se réfèrent « à un point d’ancrage constant dans le temps ».

Pas d’hémorragie

En dehors des capacités hospitalières, l’autre constat effectué par le ministère de la Santé porte sur les ressources humaines. Et là encore, l’enquête présentée jeudi tend à nuancer les départs massifs de soignants dont témoignent nombre d’observateurs. « Rien ne permet de confirmer une quelconque hémorragie », avance la DGOS.

Sur l’ensemble des établissements qui ont répondu, le solde des entrées et des sorties de personnel, tous soignants confondus, sur le mois d’octobre est en effet négatif (-416 soignants), mais il n’est pas catastrophique, si on le compare aux centaines de milliers de auxquels se chiffrent les effectifs de ces hôpitaux.

La situation pour les infirmières est cependant plus préoccupante, avec un solde négatif de 784 professionnels. Les aides-soignants et auxiliaires de puériculture présentent quant à eux un solde positif de 363 professionnels sur la période.

Plus inquiétante, selon le ministère, est l’image de l’absentéisme que donnent les établissements qui ont répondu à l’enquête. Celui-ci est en effet supérieur en moyenne d’un point à la situation observée en 2019, et il augmente dans toutes les catégories de personnel. « Vu la charge en soins qu’affrontent en ce moment les équipes, même un point d’absentéisme en plus produit des impacts », commente la DGOS, pour qui « c’est en partie ce facteur qui explique les tensions que peuvent rencontrer les établissements ».

Reste que derrière les chiffres donnés par les services d’Olivier Véran se cachent d’importantes interrogations, et notamment celle de la répartition par secteurs.

Car ces données portent sur des établissements aux statuts et activités bien différentes, ce qui a pour effet de masquer les types de structure (l’hôpital public) et les services (urgences, psychiatrie, etc.) qui connaissent les tensions les plus importantes. C’est pourquoi les chiffres présentés ce jeudi ne manqueront pas de sembler, aux yeux de certains soignants, légèrement à côté de la plaque.

Une chose est donc sûre : ce n’est pas avec cette étude que le ministère mettra fin à la guerre des chiffres sur la crise hospitalière.

Adrien Renaud

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