Ibode : les actes exclusifs toujours dans la tourmente

L’Union nationale des associations d’infirmi(ère)s de bloc opératoire diplômé(e)s d’Etat (Unaibode) monte au front. Depuis fin juin/début juillet, l’association envoie des courriers de mise en demeure aux établissements de santé, afin de les enjoindre à respecter la loi concernant l’exercice des actes exclusifs de la profession.

Ibode : les actes exclusifs toujours dans la tourmente

Pour comprendre la problématique des actes exclusifs des Ibode, un rappel historique des faits est nécessaire.

« Cela faisait déjà plusieurs années que la spécialité se battait pour obtenir une reconnaissance de son diplôme », rappelle Magali Delhoste, présidente de l’Unaibode.

Après des négociations avec le ministère de la Santé, un décret du 27 janvier 2015 relatif aux actes infirmiers relevant de la compétence exclusive des Ibode leur a attribué trois actes dédiés.

1°Dans les conditions fixées par un protocole pré-établi, écrit, daté et signé par le ou les chirurgiens :
a) Sous réserve que le chirurgien puisse intervenir à tout moment :

- l'installation chirurgicale du patient ;

- la mise en place et la fixation des drains susaponévrotiques ;

- la fermeture sous-cutanée et cutanée ;

b) Au cours d'une intervention chirurgicale, en présence du chirurgien, apporter une aide à l'exposition, à l'hémostase et à l'aspiration.

2° Au cours d'une intervention chirurgicale, en présence et sur demande expresse du chirurgien, une fonction d'assistance pour des actes d'une particulière technicité déterminés par arrêté du ministre chargé de la santé.

A la suite de ce décret de 2015, « les chirurgiens du secteur privé ont déposé un recours devant le Conseil d’Etat, expliquant qu’il n’y avait pas assez d’Ibode pour la réalisation de ces actes exclusifs, raconte Magali Delhoste.

Les actes du 1b principalement, étaient dans les faits réalisés par de nombreuses infirmières et aides opératoires, une situation qui devait selon eux perdurer pour maintenir l’ouverture des blocs. »

Après plusieurs années de négociations, il a cette fois-ci été acté par décret que les actes du 1a et du 2 restaient de la compétence exclusive des Ibode.

En revanche, pour les actes du 1b, des mesures transitoires ont été instaurées.

La mise en place de mesures transitoires

Le décret du 28 juin 2019 relatif aux conditions de réalisation de certains actes professionnels en bloc opératoire par les infirmiers et portant report d'entrée en vigueur de dispositions transitoires sur les Ibode prévoit en effet que les infirmières ayant au 30 juin 2019, au moins un an de pratique professionnelle à temps plein dans les blocs opératoires, et pratiqué régulièrement les actes du 1b, peuvent prétendre aux mesures transitoires.

C'est-à-dire que sous condition, elles peuvent effectuer les actes du 1b. « Nous avions demandé une expérience de deux ans et 21 heures de formation et finalement, sous la pression du secteur privé, il a été acté un an d’expérience professionnelle et 21 heures de formation », précise Magali Delhoste.

Pour permettre la mise en place de ce dispositif transitoire, tout en maintenant les activités et la qualité des soins au sein des blocs opératoires, l'exclusivité des Ibode sur les trois actes a été différée au 1er janvier 2020.

De juin à octobre 2019, les infirmiers ont donc pu déposer leur dossier à la Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS), pour examen par un jury. « L’année 2020 est normalement dédiée à la validation des dossiers, mais à ma connaissance, très peu de jurys se sont réunis », fait savoir la présidente de l’Unaibode. 

La profession a continué de travailler sur la revalorisation de son diplôme et a adressé des propositions à la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) en début d’année. « Elle nous a alors répondu en mars que pour mettre un terme à la problématique des actes exclusifs des Ibode et à la mésentente entre les fédérations publiques et privées et les associations, il a été décidé que les infirmiers concernés par les mesures transitoires allaient finalement pouvoir pratiquer l’intégralité des actes exclusifs des Ibode, après une formation de 56 heures », indique Magali Delhoste, précisant néanmoins que les textes concernant cette décision ne sont toujours pas parus, donc c'est toujours les mesures du décret du 28 juin 2019 qui s'appliquent.

« Bien entendu, nous sommes en opposition totale avec ces déclarations de la DGOS, ajoute-t-elle. Les 56 heures théoriques sont loin d’être suffisantes comparées aux 900 heures de notre formation. Mais depuis, avec la crise sanitaire, aucune suite ne nous a été donnée. »

Un rappel de la loi

Parallèlement à ces annonces, l’Unaibode a reçu des remontées de terrain d’adhérents, dénonçant les agissements de certains chefs d’établissements, qui imposeraient aux Ibode de leur structure de former les infirmières aux actes exclusifs, même celles ayant moins d’un an d’expérience.

« Pourtant, depuis le 1er  janvier 2020, il est strictement illégal d'organiser la pratique et de former des infirmières nouvellement arrivées dans les blocs opératoires, aux actes désormais réservés aux seuls Ibode, rapporte Magali Delhoste. Nous leur adressons actuellement des courriers pour leur rappeler le contenu du décret du 28 juin 2019 et l’obligation d’appliquer la loi. »

Si la situation perdure, l’Unaibode entend saisir la justice dès le mois de septembre. 

Laure Martin

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