L’étrange programme de la fédération de l’hospitalisation privée pour les études infirmières…

L’étrange programme de la fédération de l’hospitalisation privée pour les études infirmières…

Dans un communiqué, la Fédération de l’Hospitalistion Privée (FHP) constate la difficulté de ses établissements à recruter des infirmier. La faute à des études “trop sélectives” ou “trop longues” ? Des hypothèses qui en disent long sur la vision de cette profession.

L'étrange programme de la fédération de l'hospitalisation privée pour les études infirmières...
Cérémonie de diplôme de jeunes infirmières américaines en 1951 – © CC nurse pins

La fédération de l’hospitalisation privée veut plus d’infirmiers dans ses cliniques, et regrette un numerus clausus à l’entrée en IFSI sensiblement identique à celui de l’année précédente, soit.

Mais la FHP a d’autres idées radicales pour accélérer le processus, sobrement résumées dans le titre même du communiqué de presse : “Les hôpitaux ont du mal à recruter leurs personnels paramédicaux. Une réforme de la formation s’impose ! “

Un raccourci particulièrement malheureux.

Commençons par une citation : “au cours des trois années de formation, ce sont 10% des étudiants qui abandonnent leurs études soit de l’ordre de 2700 élèves. Il est légitime de s’interroger sur les raisons de leur abandon. Découragement ? Études trop sélectives ? ou trop longues du fait d’une formation en alternance encore fermée sur elle-même ?”

Incroyable ! 10 % des étudiants abandonnent en cours de formation. Comme si infirmier n’était pas un métier tout à fait comme les autres. Comme si la vision idyllique de l’infirmière par le grand public (et par les candidats au concours) n’était pas radicalement éloignée de la réalité de terrain. Réalité à laquelle tout étudiant est souvent violemment confronté lors de ses premiers stages.

Mais peu importe. Les études qui mènent au diplôme d’État infirmier seraient trop longues, et trop sélectives. Tirons en donc les conséquences directes : Supprimons tout concours d’accès , toute notation, préparons des infirmières en un an, voire deux. C’est amplement suffisant, et elles trouveront toujours un poste. Pour la qualité des soins, on verra plus tard.

Et puis qui sont elles, ces petites infirmières, pour oser négocier leur salaire et leur condition de travail ? Inversons rapidement l’équilibre entre l’offre et la demande, et offrons leur un SMIC à peine amélioré.

“L’ Hospitalisation privée appelle à une réforme de la formation des paramédicaux à laquelle elle souhaite prendre part.” Peu importe si les étudiants de la nouvelle licence infirmière ne sont même pas encore diplômés. Peu importe si l’intégration des études infirmières dans le cursus Licence – Master – Doctorat est acté au niveau européen. Une licence c’est bien trop long. Pour faire des piqûres et des pansements, franchement…

Dans le secteur privé lucratif,  une IDE peut très bien gagner sa vie, rencontrer des conditions de travail optimales dans un environnement qu’envieraient bien des structures publiques.

A l’inverse, il suffit de quelques minutes sur internet pour trouver des annonces de temps plein infirmier à 1500 euros bruts / mois. Que ces employeurs ne trouvent pas d’infirmières prêtes à brader leur diplôme, on ne peut que s’en féliciter, et les inviter à reconsidérer la qualité de leur offre d’emploi, avant de réclamer, des sanglots dans la voix, des infirmières plus nombreuses et plus dociles, avec une formation au rabais.

Thomas Duvernoy

NDLR : Ce communiqué a été envoyé aux rédactions le jour de l’ouverture de l’élection du président de la FHP. Jean-Loup Durousset a été élu pour un second mandat.