Vers une pratique avancée pour les infirmières hygiénistes ?

Vers une pratique avancée pour les infirmières hygiénistes ?

Une proposition du rapport Pittet sur l'évaluation de la gestion de la crise sanitaire suggère de créer une pratique avancée infirmière en prévention et contrôle de l’infection, qui correspondrait à une évolution du rôle des infirmières hygiénistes. Un projet soutenu par la Société française d'hygiène hospitalière, qui le défend auprès des pouvoirs publics.
Vers une pratique avancée pour les infirmières hygiénistes ?
©ShutterStock

Les représentants des infirmières hygiénistes sont très motivés pour faire avancer leur projet de pratique avancée, repris dans le rapport final de la mission indépendante nationale sur « l’évaluation de la gestion de la crise Covid-19 et sur l’anticipation des risques épidémiques », publié le 18 mai.

Lui donnera-t-il le coup d’accélérateur qu’ils attendent ? La Société française d’hygiène hospitalière (SF2H) l’espère.

La proposition n°17, du rapport, auquel Pierre Parneix, ancien président de la SF2H a contribué, préconise en effet de « créer, par analogie avec la formation spécialisée transversale (FST) médicale, une pratique avancée infirmière en prévention et contrôle de l’infection ». Il s’agirait ainsi de « renforcer, au-delà du corps médical, l’expertise appliquée en prévention et contrôle de l’infection » (PCI).

Renforcer l’expertise

Le développement d’une pratique avancée de ce type fait partie des projets de la SF2H depuis plusieurs années. « Avec l’arrivée des IPA, nous nous sommes demandés si les pratiques des infirmières hygiénistes correspondaient à des pratiques avancées », rappelle Nouara Baghdadi, cadre de santé et administratrice de la SF2H.

« Nous avons monté un groupe de travail et nous avons pu démontrer que les infirmières hygiénistes ont des compétences particulières en matière de gestion de crise, de consultation, de prise de leadership, de recherche scientifique, d’enseignement, qui entrent complètement dans les missions d’une infirmière de pratique avancée. »

La SF2H a produit en 2018 un rapport sur le sujet qu’elle a transmis au ministère de la Santé et qui demandait l’ouverture d’un domaine de compétence en pratique avancée spécifique à la prévention des infections. Une demande qui est restée sans suite alors même que « des programmes nationaux (sur le sujet, NDLR) ont placé l’antibiorésistance comme une priorité absolue », poursuit la cadre de santé. Et que des postes d’infirmiers en infectiologie sont créés en intrahospitalier.

Les compétences des potentielles IPA en PCI pourraient, selon la SF2H, compenser une partie des compétences médicales rendues moins disponibles du fait de la pénurie de médecins infectiologues… La société française d’hygiène hospitalière s’est rapprochée de la Société de pathologie infectieuses de langue française (Spilf) à ce sujet.

La pratique avancée en prévention et contrôle de l’infection pourrait comprendre des consultations et le suivi de patients sous antibiothérapie au long cours, la prescription d’examens de dépistage en microbiologie ou de précautions complémentaires comme l’isolement, la pose de cathéters midline pour les antibiothérapies au long cours, mais aussi la recherche et l’enseignement dans ces domaines.

Des compétences « indispensables »

La SF2H, auditionnée par les auteurs du rapport Pittet, a souligné que la crise sanitaire a révélé que certaines compétences de infirmières hygiénistes étaient « indispensables dans la gestion des risques infectieux émergents », indique Nouara Baghdad.

« Depuis un an et demi, poursuit-elle, elles ont accompagné les équipes, au départ principalement en intrahospitalier puis hors les murs, jusque dans les établissements médicosociaux, et elles ont produit des recommandations scientifiques et réalisables, qui ont du s’adapter aux connaissances qui évoluaient de manière quasi quotidienne, sur les risques liés au coronavirus et aux établissements… »

Le rapport de la mission nationale a remis en avant, selon elle, la nécessité de miser sur les compétences des infirmières hygiénistes, de les développer, et d’envisager des délégations d’actes médicaux.

« Jusqu’à présent, dans certains secteurs, la PCI n’étaient pas vraiment prise en compte, ou alors de manière marginale, souligne Pascale Chaize, vice-présidente non médicale de la SF2H. La recommandation du rapport permet de les mettre plus en évidence. »

D’ailleurs, « la prévention du risque infectieux se centre beaucoup sur les soins infirmiers », insiste Nouara Baghdadi. La société d’hygiène, saisie par le ministère de la Santé sur les missions et les rôles des professionnels de santé en hygiène (médecins, pharmaciens et IDE) souhaite promouvoir le sujet des IPA dans ce domaine.

Si cette perspective était validée par l’Etat, il faudrait alors modifier le décret de compétence des IPA (décret du 18 juillet 2018 ) puis créer une filière d’enseignement supérieur spécifique. La SF2H se dit prête à s’engager dans cette voie..

Géraldine Langlois

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