L’aventure débute en 2013, lorsque Christelle Cuinet, par ailleurs enseignante, devient biographe hospitalière auprès d’adultes hospitalisés dans le service de soins palliatifs de l’hôpital. « Soudain, il m’est venu à l’esprit qu’il existait aussi des enfants suivis en soins palliatifs. Aurai-je la force de travailler avec eux ? Je m’interrogeais beaucoup mais je souhaitais faire quelque chose. »
Ces patients s’avèrent souvent trop petits. Elle offre donc ses services à l’unité d’hématologie-oncologie pédiatrique. La démarche est bienvenue. « Personne ne leur propose de projets innovants : la maladie de l’enfant fait peur. Mon rôle est de le brancher sur son héros personnel. »
Alors il quitte le seul état d’objet de soins pour devenir créateur. « Car ces jeunes malades passent parfois plus d’un an sur leur lit, raccordés à une potence qui délivre de la chimiothérapie, entourés d’actes techniques… Les enfants hospitalisés sont à la merci des soignants. »
Trêves dans la maladie
Les petits patients peuvent participer à cette activité dès l’âge de six ans. La biographe écrit sous leur impulsion, sans rien censurer. L’enfant demeure maître de son projet, qui se poursuit ou s’arrête à son gré.
Mais tous ne sont pas tentés. En réunion d’équipe, éducatrices et infirmières repèrent les enfants qui voudraient en bénéficier. Ceux qui en ont besoin surtout. « La maladie reste difficile à accepter. Ce livre se révèle un outil complémentaire et ludique au travail des psychologues », estime Marjorie, infirmière dans l’unité.
« Cela peut aussi être des enfants qui ne communiquent plus avec les soignants et refusent de s’alimenter, complète Christelle Cuinet. Thomas* m’a raconté que ce livre avait été sa bouée de sauvetage. »
Des récits comme trêves dans la maladie. Pour s’évader de son histoire, extérioriser ses émotions… « Lorsque nous entrons dans la chambre pour faire un soin alors que l’enfant travaille sur son livre, il nous vire ! Ces patients ont besoin de ce moment privilégié. C’est magique pour eux », constate Marjorie. L’exercice est salutaire. La fierté des enfants, immense.
Existence précaire
Une fois l’ouvrage achevé, Christelle Cuinet en fait tirer dix exemplaires par une imprimerie associative, à l’intention du jeune auteur et de son entourage. Quatre nouveaux livres sont en cours d’écriture, et quatre autres enfants attendent leur tour.
Christelle Cuinet exerce seule. Et faute de subventions suffisantes, l’existence de Traces de vies demeure précaire. « Mais je me refuse à faire payer les familles !
* Le prénom a été modifié
Emilie Lay
Traces de vies ; 4, rue de Vittel, 25000 Besançon ; tél : 06 08 06 72 15
http://www.tracesdevies.fr/
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