Santé mentale : un accès facilité aux soins avec l’expérimentation Sésame 

Santé mentale : un accès facilité aux soins avec l’expérimentation Sésame 

Afin d’améliorer le dépistage et la prise en charge des troubles mentaux, fréquents en médecine générale, l’Institut Montaigne porte l’initiative Soins d’équipe en santé mentale (Sésame), qui place les infirmiers au cœur du dispositif.

© Lee Charlie / ShutterStock

Pour aider les médecins généralistes à détecter les patients présentant des troubles psychiques, et ainsi permettre une rémission plus rapide, durable et une meilleure observance thérapeutique, l’Institut Montaigne a porté une initiative menée de 2020 à 2023 au sein de quatre établissements des Yvelines.

Aujourd’hui, elle est déployée dans le cadre d’une expérimentation article 51, dans 5 départements et 14 villes, avec un passage de 17 à 80 médecins généralistes, de 3 à 8 infirmiers et de 3 à 6 psychiatres.

L’objectif : proposer davantage de ressources humaines aux praticiens, avec l’intervention d’un infirmier « Sésame », salarié de l’association Quartet Santé, qui porte le dispositif, et d’un psychiatre, présent en téléexpertise.

Ainsi, lorsqu’il reçoit un patient adulte en consultation, le médecin n’a que deux questions à lui poser afin d’évaluer son humeur et une éventuelle anhédonie.

En fonction des réponses, il décide ou non, de l’adresser à l’infirmier après avoir recueilli son consentement. C’est ensuite l’infirmier qui contacte le patient pour lui proposer un premier rendez-vous pour une évaluation.

Le contexte

Pourquoi cette initiative ? Post pandémie de covid 19, « les troubles psychiques les plus fréquents (dépression, anxiété) ont considérablement augmenté notamment chez les femmes, les jeunes et les populations en situation de précarité, explique Johanna Couvreur, responsable des projets de santé à l’Institut Montaigne et directrice de Quartet Santé. Mais le système de santé est à bout de souffle et ne parvient pas à répondre à l’ampleur de ces nouveaux besoins. »

Face à la situation, l’Institut Montaigne s’est intéressé à la porte d’entrée de ces patients à savoir les médecins généralistes, dont 20 à 30 % de la patientèle est concernée par des troubles psychiques. Pour autant, face aux motifs de consultations qui augmentent, ils n’ont pas de temps à consacrer à cette prise en charge. « Ils ne disposent également que de très peu de liens avec la psychiatrie, la prise en charge en ville étant elle aussi saturée, rappelle Johanna Couvreur. Ils se retrouvent donc globalement démunis et isolés. »

Un suivi régulier par l’infirmier

Avec l’expérimentation Sésame, lors du premier rendez-vous, l’infirmier réalise un entretien d’évaluation d’environ une heure avec les patients. « L’objectif est de définir son contexte de vie actuel et plus ancien, d’identifier ses problèmes et la raison de son orientation par le médecin », souligne Sophie Leroy, infirmière salariée de Quartet Santé, qui a pris en charge environ 120 patients depuis novembre 2023.

Il prend en compte le patient dans toutes ses dimensions somatiques, sociales et médico-sociales, l’objectif étant d’éviter les pertes de chance, donc un éventuel passage à l’acte suicidaire ou la chronicisation d’une dépression.

Après avoir identifié les problématiques principales, l’infirmier peut ainsi travailler sur des objectifs identifiés et surveiller les risques iatrogéniques ainsi que l’observance en cas de prescription de thérapeutiques. « Nous disposons d’échelles d’évaluation pour objectiver la symptomatologie et ainsi réévaluer et réajuster la prise en charge », précise Sophie Leroy.

Il assure ensuite un retour au psychiatre avec lequel il travaille en binôme. Celui-ci assure les préconisations pour l’infirmier et le médecin généraliste, qui reste le prescripteur. L’ensemble des informations concernant les prises en charge sont partagées sur un logiciel. L’infirmier est amené à revoir le patient tous les 15 jours en moyenne et à solliciter le psychiatre si une situation l’interpelle. « Lors des séances, les infirmiers font aussi de l’éducation thérapeutique pour permettre aux patients de mieux comprendre les effets de leur trouble sur leur humeur », fait savoir Johanna Couvreur.

Des temps de coordination sont organisés entre le binôme infirmier/psychiatre (environ trois à quatre heures par semaine) ainsi que des réunions entre l’infirmier et les médecins environ tous les 15 jours.

Les infirmiers de l’expérimentation se réunissent également une fois par mois pour échanger sur leurs pratiques, leurs difficultés éventuelles, tandis que des réunions cliniques sont organisées entre tous les médecins généralistes impliqués, pour la construction d’une culture professionnelle commune.

« La limite, c’est que notre solution représente uniquement une brique du système de soin, conclut Johanna Couvreur. Il nous faut des solutions en aval ! »

Laure Martin

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