Oubliées, les petites guéguerres qui ont traditionnellement cours au pays des syndicats de médecins libéraux ! La proposition de loi de Stéphanie Rist semble avoir rétabli contre elle une certaine harmonie entre les différentes organisations. « Madame la députée, avez-vous pensé aux patients, interrogeait dans un communiqué diffusé en décembre le Dr Franck Devulder, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF). La CSMF vous demande de ne pas inventer une santé à deux vitesses, celle de ceux de nos concitoyens qui auront un médecin, celle de ceux qui auront un officier de santé. »
Du côté du rival MG France, le ton est moins menaçant, mais la détermination tout aussi implacable. La loi Rist « repose sur la tentation d’une dérégulation totale des soins primaires » et « doit être rejetée », affirmait l’organisation de généralistes lors de ses vœux début janvier.
Même hors du champ syndical, on n’observe pas de divergence chez les libéraux. C’est ainsi que le collectif « Médecins pour demain », dénonçait le 10 janvier dernier dans une lettre ouverte « l’erreur initiale » de la loi Rist, qui « partant du constat d’un déficit de médecins, propose que des actes médicaux soient réalisés par des professionnels non-médecins ».
« Ces professionnels auraient accès aux champs de compétence et de prescription en toute autonomie via le statut d’Infirmier en pratique avancée qui se substituerait au médecin traitant, poursuit cette organisation née sur les réseaux sociaux. Cette disposition créera de fait un accès aux soins inégalitaire et sera source de perte de chance dès la porte d’entrée dans le système de soin. »
Pas des troufions !
Une telle unanimité syndicale contre la loi Rist a conduit les organisations infirmières à répliquer. « Les IPA ne sont pas des “troufions avec trois mois de stage”, s’indignait hier matin sur Twitter l’Unipa en réaction à un reportage diffusé sur France info. « Nous rappelons que la formation en vue du DE IPA se déroule en 2 ans de niveau master (bac +5), à la faculté de médecine, selon les connaissances et compétences définies par le CSP [Code de la santé publique, ndlr]. »
« Halte à la désinformation ! », s’exclamait l’Ordre infirmier dans un communiqué diffusé en fin de semaine dernière. Dénonçant « des messages manipulateurs, de dénigrement, voire injurieux » véhiculant « des informations erronées et orientées pour disqualifier les IPA », la principale institution représentant la profession a cherché à mettre les points sur les i.
Non, soulignait l’Ordre, les IPA n’effectuent pas des « consultations longues et complexes comme les médecins », mais assurent des activités strictement définies dans le décret qui encadre leur pratique : « activités d’orientation, d’éducation, de prévention ou de dépistage », « actes d’évaluation et de conclusion clinique, des actes techniques et des actes de surveillance clinique et paraclinique », etc.
Non, la pratique avancée n’est pas synonyme de médecine à deux vitesses, c’est au contraire aujourd’hui qu’il existe des différences inacceptables « entre ceux de nos concitoyens qui ont accès à une offre de santé en proximité d’une part, et les 6 millions de Français qui n’ont aucun accès à un médecin traitant, ni à une solution de remplacement d’autre part ».
Et l’Ordre d’en appeler à « tirer les conséquences », s’appuyant sur l’avis de l’Académie de médecine qui recommandait le 27 octobre dernier « d’optimiser les délégations à d’autres professionnels de santé, parmi lesquels les infirmiers, les IPA…»
« Aucun corporatisme ne justifie de retarder la réforme nécessaire du système de santé qui doit permettre de répondre enfin aux besoins des patients et de résorber les graves inégalités territoriales en matière d’accès aux soins », conclut l’Ordre.
Adrien Renaud
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