Le programme Équilibres, article 51, organisé selon un exercice infirmier en libéral, redonne un souffle aux professionnels. Avec ce nouveau mode organisationnel en équipe et ce nouveau mode de facturation simplifié et basé sur la confiance envers les infirmiers, patients et soignants s’y retrouvent.
J’ai toujours en mémoire ce jour de juillet 2019 où l’on m’a envoyé le texte paru sur Légifrance autorisant l’expérimentation Équilibres, issue de l’article 51 de la LFSS de 2018. En le comparant à l’avenant 6 qui venait de paraître, j’ai vu l’opportunité d’exercer autrement ma pratique d’infirmier à domicile.
Initialement, je voulais totalement changer de métier et vendre ma patientèle. Je me suis laissé cette chance en me disant que de toute façon je ne craignais rien : ou ça fonctionnait ou j’arrêtais.
Trois années de recul
Trois ans après la mise en route de l’expérimentation Équilibres, je suis motivé pour continuer d’exercer ma profession. C’est comme ça que j’ai toujours voulu soigner les patients : être à leur écoute, leur tenir la main, être au plus proche d’eux, leur permettre de gérer le reste de leur vie du mieux possible, et enfin « remettre l’humain au cœur du soin ». Cela me manquait.
Depuis trois ans, beaucoup de choses ont changé, à commencer par moi-même. Positivement. Le patient est redevenu la clé de voûte de mon activité. Je lui accorde le « juste temps » pour ses soins, son accompagnement et tout ce qui peut graviter autour de sa prise en charge. Je mets en valeur mes deux diplômes universitaires qui, jusqu’alors, ne l’étaient pas vraiment.
Ce qui ne change pas : je reste libre de gérer le flux de ma patientèle en fonction des disponibilités.
Ensemble
Pour la première fois en vingt-trois années de libéral, je ne me sens plus seul : le cabinet est passé de deux titulaires avec une remplaçante à quatre titulaires.
De fait, nous travaillons sur deux tournées, et, au moindre problème (chute d’un patient, retard lié à un soin plus long que prévu…), je peux compter sur la collègue en binôme.
Nous rencontrons régulièrement notre coach, accompagnateur d’équipe, appelons-le comme nous voulons. Son rôle est de nous faire défocaliser des problèmes d’équipe et de nous aider à trouver la ou les solutions.
Ce rôle facilitant ne peut être effectué que par une personne extérieure, distante du problème. La messagerie interne à l’expérimentation mettant en lien les cabinets infirmiers dans Équilibres, nous permet également d’échanger sur les divers protocoles en place et sur le « vous feriez quoi, là, à notre place ? »
La valorisation des compétences par le paiement au forfait
Exit la NGAP et ses interprétations tant approximatives que aléatoires, retour au décret de compétences infirmières et à l’intégralité des soins qu’il autorise. Fini les parkinsoniens s’exerçant à la délicate instillation de collyre, ou à la personne âgée laissée devant l’impossibilité de poser ses bas de contention seule. Ceci n’est qu’une infime partie des soins que permet ce changement.
Comment sommes-nous payés, me direz-vous ? Le plus simplement du monde : 0,899€ la minute, soit 53,96€ brut par heure sur un mode déclaratif.
Que ceux qui y voient un forfait se détrompent : si je reste 10 minutes, je suis payé 10 minutes, et si je reste 1h30, je suis payé 1h30. Je vous laisse vous amuser à faire les calculs pour une prise de sang d’un patient dont la veine joue à cache-cache avec l’aiguille, ou la situation d’une personne dans l’incompréhension de ce qui lui arrive et qui a besoin d’explications dans les moindres détails sur sa pathologie. Mais là aussi, ça change, car si vous décelez quelque chose d’important dans l’énumération exhaustive de ses déboires médicaux, la coordination avec le médecin, tout comme votre rôle éducatif ou préventif, est, lui aussi, valorisé. Une seule condition : que cela se déroule devant le patient et que cela soit tracé dans le dossier de soins.
Simplification quand tu nous tiens : les déplacements et les fériés sont inclus dans ce tarif. Seul hic : le tarif de nuit n’existe pas… il fallait bien trouver un inconvénient quand même !
Pour continuer sur les choses « agréables », je paye toujours mes cotisations à la CARPIMKO et à l’URSSAF. Je suis, comme vous tous, impacté par la réforme des retraites et d’autres soucis du quotidien de l’infirmier libéral que nous sommes tous ! Les avantages et inconvénients de cumuler ces deux beaux métiers d’infirmier et de chef d’entreprise…
En résumé, peu de choses ont changé mais les choses qui ont changé ont tout changé.
David Balesse – infirmier libéral
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