Les IPA toujours dans l’attente de la publication des textes sur l’accès direct et la primo-prescription

Les IPA toujours dans l’attente de la publication des textes sur l’accès direct et la primo-prescription

Cela fait bientôt un an et demi que la loi Rist a été adoptée. Depuis, les infirmiers en pratique avancée (IPA) attendent la publication des décrets d’application, nécessaires pour concrétiser les évolutions professionnelles prévues par cette loi. 
© New Africa / ShutterStock

« Toutes les structures représentatives des IPA partagent un objectif commun, à savoir que la loi soit enfin appliquée », souligne Julie Devictor, IPA et présidente du Conseil national professionnel (CNP) IPA.

« Aujourd’hui, nous attendons, regrette Emmanuel Hardy, président de l’Union nationale des infirmiers en pratique avancée (UNIPA). Nous sommes tributaires des récents changements ministériels. Nous prenons du retard et pendant ce temps, nous ne répondons pas aux besoins et aux attentes de la population pour garantir l’égalité d’accès aux soins de tous les usagers. »

Malgré l’attente, une lueur d’espoir subsiste :  certains conseillers du nouveau cabinet ministériel ayant déjà travaillé auprès des précédents ministres, maîtrisent bien le dossier, ce qui pourrait accélérer la mise en œuvre des mesures prévues.

Avancées actées par la loi

Promulguée en mai 2023, la loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, dite “loi Rist”, a été élaborée notamment pour pallier la pénurie de médecins.

Elle confère aux IPA de nouvelles responsabilités vis-à-vis des patients en prévoyant, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, dans les CPTS, qu’ils puissent prendre en charge directement les patients dans le cadre de structures d’exercice coordonné.

Les projets de décret et d’arrêté précisent les modalités de cet accès direct et les conditions de prescription initiale par les IPA.

Avis mitigés

Le projet de décret a déjà été soumis à la Haute Autorité de santé (HAS), qui a rendu un avis mitigé. Cette réponse reflète le fait que les propositions formulées ne sont pas en adéquation avec les idées de la loi.  L’instance souligne notamment « que la prescription médicamenteuse non symptomatique et sans diagnostic médical préalable ne peut être envisagée que par exception et avec le plus haut niveau de sécurisation ».

Elle considère également « qu’une primo-prescription sans diagnostic médical préalable, dans ce domaine, est incompatible avec la notion même de pathologie chronique stabilisée ».

Elle soutient par ailleurs que, dans le contexte de l’accès direct et de la prescription initiale par l’IPA, il est impératif de prévoir la formation initiale et continue à ces nouvelles compétences.

Cette position est également soutenue par l’Ordre des médecins qui, sous la plume de son président, le Dr François Arnault, dans l’édito du numéro de juillet/août 2024 du Bulletin de l’Ordre national des médecins, a affirmé que « les décrets et arrêtés d’application semblent ne pas respecter cet esprit de la loi et tentent d’attribuer aux autres professions des compétences non prévues par les textes législatifs […] Il s’agit de la santé des Français et nul ne peut s’affranchir de garantir la sécurité des soins en confiant des missions thérapeutiques sans diagnostic médical préalable à des professionnels de santé n’ayant pas reçu la formation spécifique. » Il prévient que l’Ordre utilisera tous les recours légaux pour obtenir la modification de ces décrets et arrêtés.

Texte à retravailler

« Je comprends que la HAS ait rendu un avis mitigé sur le texte », reconnaît Julie Devictor. « Ce projet de décret n’est en effet pas satisfaisant et nous l’avons déjà signalé à la Direction générale de l’offre de soins (DGOS). Le CNP a été mobilisé pour travailler à sa rédaction, réalisant un travail colossal d’argumentation en santé publique, de formulation de recommandations de bonnes pratiques et de recherche de données scientifiques. De leur côté, les CNP médicaux ont eu la même démarche. Pourtant, la DGOS a utilisé nos travaux pour élaborer une proposition qui inclut des primo-prescriptions, mais en dehors du cadre des bonnes pratiques. Ce n’est pas du tout ce que nous souhaitions. Nous l’avons fait savoir, mais le texte a été diffusé en l’état. »

Pour autant, sur le principe, face aux médecins récalcitrants, les IPA persistent : « Nous sommes complémentaires dans l’intérêt de la population et, surtout, nous intervenons dans le cadre d’une équipe de soins coordonnés, rappelle Emmanuel Hardy. C’est écrit dans la loi. Nous ne travaillons pas seuls, et nous tenons à le souligner »

Le texte doit encore être soumis à l’Académie de médecine et au Conseil d’État. « Mais nous ne savons pas où en est le circuit d’examen, ni si le texte peut être modifié et sur quelle base », fait savoir Julie Devictor.

En attendant, les instances représentatives poursuivent leur action de lobbying. Le CNP sera reçu par le cabinet de la ministre dans les prochains jours.

Laure Martin

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