L’apprentissage émotionnel dans la formation en soins infirmiers

L’apprentissage émotionnel dans la formation en soins infirmiers

En charge de l’enseignement de la démarche relationnelle à l’ISFI du Centre Hospitalier d’Ardèche Méridionale (Rhône-Alpes), Geneviève Vernet Guihard s’est intéressée à la gestion des émotions des étudiants, dans le cadre d’un mémoire de Master qui lui a permis de remporter l’un des prix des thèses et mémoires de la Fondation MACSF.

L’apprentissage émotionnel dans la formation en soins infirmiersDans le cadre de son enseignement, Geneviève Vernet Guihard a constaté que les étudiants présentaient fréquemment des difficultés dans la gestion de leurs émotions, lors de la rencontre avec les patients mais aussi avec les équipes.

« Je me suis interrogée en tant que formatrice sur comment mieux accompagner les étudiants et les aider dans l’apprentissage de cette gestion émotionnelle », explique-t-elle. Et d’ajouter : « Ce que j’avais mis en place, les TD, les jeux de rôle, ne semblait pas idéal car manquait parfois de lien avec la réalité rencontrée. »

A partir de 2009, le nouveau référentiel de formation en soins infirmier a modifié l’approche de la formation en mettant l’accent sur la réflexivité et la gestion des émotions. « On m’a alors proposé de suivre une formation de Master 2 en Sciences de l’éducation, indique Geneviève Vernet Guihard. Pour mon travail de recherche, j’ai tout naturellement pensé à la problématique de l’apprentissage émotionnel. »

 Des émotions incomprises

Sa question de départ a été de savoir de quelle manière les professionnels de santé qui encadrent les étudiants, que ce soit les formateurs ou les tuteurs, prennent-ils en compte les émotions dans les situations d’apprentissage ?

Geneviève Vernet Guihard a mené une enquête exploratoire sur trois promotions d’étudiants de l’IFSI, puis interrogé des tuteurs et enregistré des séquences d’analyse de pratique avec des formateurs.

« Mon travail montre que les professionnels ont des difficultés avec leurs propres émotions, qui prennent parfois le pas sur celles des étudiants, fait-elle savoir. Comme ils doivent gérer leurs émotions, il leur est parfois difficile d’identifier celles des étudiants et donc de travailler dessus. »

Et de poursuivre : « Il est pourtant indispensable de reconnaitre et d’accepter ses émotions pour pouvoir les gérer, et entrer ensuite dans un processus d’empathie avec l’autre. »

Dans l’exercice professionnel, les émotions non-identifiées peuvent « inonder » la personne, altérer le raisonnement clinique, voire conduire au burn out« D’où l’importance de les travailler pour la qualité des soins et pour la prévention des risques psycho-sociaux chez les soignants », précise Geneviève Vernet Guihard.

Elle propose donc d’optimiser cet apprentissage émotionnel par la mise en place d’une formation « intégrée », visant à mieux accompagner les professionnels et les futurs infirmiers. « J’ai organisé pour les étudiants des ateliers de théâtre d’improvisation avec l’aide d’un comédien, afin d’apprendre à faire face à des situations imprévues, très pourvoyeuses en émotions », rapporte-t-elle.

Pour les tuteurs, qui font assez facilement le rapport entre la relation d’aide et la relation pédagogique, elle a intégré le groupe de coordination du tutorat du Centre Hospitalier, et projette d’inclure l’analyse des pratiques dans l’accompagnement des tuteurs. Pour les formateurs, un dispositif interne d’analyse des pratiques pédagogiques est en cours de réflexion à l’IFSI.

 Laure Martin

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