Son fil d’actualité est chargé. Sur le réseau social Linkedin, dès qu’elle a un peu de temps, elle aime, elle partage, elle commente.
Elle se filme également « en live », analysant des projets, évoquant des situations sanitaires ou politiques à remettre en question. Elle sait aussi bien dénoncer « en douceur » les aberrations du système de santé que présenter des initiatives positives. C’est d’ailleurs pour ça que le réseau social l’a remarquée.
« Je suis suivie par 24 000 personnes, explique-t-elle. Mais ce n’est pas ce qui compte pour Linkedin. Le nombre de followers importe peu, c’est la qualité des échanges qui compte et l’interaction avec son réseau. Je pense que celui-ci a aimé ma mentalité. Je suis honnête et je veux le bien, sans en tirer de profit personnel. C’est tout ce qui compte pour moi ».
Une voix qui compte
Une infirmière parmi les meilleurs influenceurs de l’année d’un réseau suivi par 16 millions de personnes en France ? « Ça ne se voit d’habitude, sourit-elle. J’en profite donc pour mettre en lumière ce que les infirmiers et infirmières peuvent faire et ce qu’ils vivent. Car, avec les patients, nous sommes souvent les oubliés du système. Nous manquons de lobbying, c’est certain ».
Parce qu’elle est suivie et que sa voix compte, elle entretient régulièrement des discussions avec des représentants du ministère de la santé. On la connaît un peu partout finalement. C’est ainsi que Laila a pu faire basculer des situations.
Quand les urgences de l’hôpital de Tonnerre (89) dans lequel elle exerce ont été menacées de fermeture, elle n’a pas hésité à se servir du réseau pour attirer la presse et les autorités.
« J’ai posté beaucoup de messages à cette époque. La télé est venue, la presse quotidienne régionale… Bref, ça a fait beaucoup de bruit. La pression était grande. Finalement, nous avons réussi à convaincre que la fermeture du service des urgences coûterait plus cher que son maintien et que l’une des promesses de nos décideurs était l’égalité aux soins à tous. Au final, les urgences n’ont pas été fermées », se réjouit-elle.
Un projet innovant
Sa notoriété sur le réseau social a aussi permis à Laila de faire connaître un projet de e-santé qu’elle porte en parallèle de son emploi à plein temps dans le service de médecine polyvalente de l’hôpital de Tonnerre.
Ce projet, établi dans un premier temps en binôme avec un médecin avec qui Laila a suivi, en 2017, un DU en santé connectée, est maintenant exclusivement entre ses mains.
Elle l’a remanié… adapté… présenté lors de conférences et de tables-rondes, notamment à l’ARS Bourgogne-Franche-Comté. « Je voulais monter un projet ou m’associer à un projet innovant existant qui soit en phase avec les besoins de la population. La e-santé est parfois déconnectée de la réalité car elle ne prend pas en compte les attentes des patients qui, eux, ne demandent pas forcément d’outils technologiques, ni d’applis sur smartphone. Dans le contexte d’une maladie, ils espèrent un accompagnement humain avant tout », analyse-t-elle.
Elle a donc pensé allier les avantages des nouvelles technologies aux attentes « humaines » des patients.
L’idée ? La télémédecine et le télé-soin à domicile dans des domaines non expérimentés jusqu’alors. « Ça pourrait aller de la polysomnographie à l’électocardiogramme par exemple, explique-t-elle. Dans mon dossier, je prends en compte tous les versants pour montrer l’intérêt du projet : soins, ETP, prévention, post-opératoire, temps médical, télé-soin, économie… ».
C’est ainsi qu’une infirmière libérale pourrait, si le projet se concrétise, se rendre au domicile des patients pour des soins ou des examens dont les résultats seraient à télé-transmettre au médecin traitant ou au spécialiste de façon synchrone ou asynchrone.
« Cela éviterait notamment de multiples déplacements pour les patients. Il faut savoir que dans les déserts médicaux, il n’est pas rare de voir des patients faire 100 km pour être reçus par un spécialiste pendant quinze minutes. Si l’infirmière ou le médecin traitant pouvait se charger de l’examen et de la télé-transmission, tout le monde serait gagnant : le patient car il ne perdrait pas sa journée et serait entouré des professionnels qu’il connaît déjà, le spécialiste qui gagnerait du temps, et l’infirmière car on lui ajouterait des actes de télé-soins, alors-même que les infirmières libérales sont en train de perdre une partie de leurs actes les plus communs», explique Laila, faisant référence notamment à la vaccination, désormais pratiquée aussi par les pharmaciens.
Aujourd’hui, Laila a bon espoir. Elle pourrait, après la constitution des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), être détachée de son service pour déployer une phase d’expérimentation de son projet car l’ARS est intéressée.
Celle qui croit fermement à « l’intelligence collective » espère pouvoir fédérer les professionnels autour de son programme. En utilisant les réseaux sociaux ? « Pourquoi pas ! », s’exclame Laila.
Malika Surbled
Laila Hamdouni en plusieurs dates
1998, 2000, 2002 : obtient un BEP gestion, puis un bac informatique, puis le niveau BTS comptabilité-gestion.
2004 : travaille en qualité de secrétaire médicale et découvre l’univers du soin.
2011 : passe son concours d’entrée en IFSI, elle a 30 ans.
2015 : obtient son Diplôme d’Etat d’Infirmière, puis exerce en médecine polyvalente et au pool.
2017 : obtient son DU Plaies et cicatrisation, son DU en santé connectée et porte depuis son projet e-santé.
2018 : est élue parmi les meilleurs influenceurs de l’année du réseau Linkedin.
Cet article est paru dans le N°33 d’ActuSoins Magazine (juin-juillet-août 2019).
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