En Lozère, l’importance du maillage territorial pour l’accès à l’IVG

En Lozère, l’importance du maillage territorial pour l’accès à l’IVG

Alors que l'IVG sera peut-être inscrite dans la Constitution française dans les prochains mois, son accès n'est pas égal sur tout le territoire français, notamment dans les ruralités. En Lozère, un travail de fond a permis un véritable maillage territorial entre le planning familial, les soignants libéraux et le centre hospitalier de Mende.
© fizkes / ShutterStock

“Pour nous la préoccupation majeure c’est la prise en charge des femmes, l’accès à des rendez-vous médicaux très rapidement, un accueil non jugeant…”, expliquent Elsa Lescure et Lena Kumurdjian, salariées au Planning familial de la Lozère.

La structure est un Evars (Espaces Vie Affective, Relationnelle et Sexuelle), autrement dit non médicalisée. Elle redirige les Lozériennes qui souhaitent avoir recours à une IVG vers le centre hospitalier de Mende ou vers les sages- et médecins généralistes libéraux du territoire, conventionnés pour l’interruption volontaire de grossesse médicamenteuse (jusqu’à 9 semaines d’aménorrhées).

Dans un portrait de territoire publié en décembre 2022 par le Creai-ors Occitanie et l’Agence régionale de santé on peut lire qu’en moyenne en Lozère “185 IVG sont réalisées par an, soit 13,2 IVG pour 1 000 femmes de 15 à 49 ans”.  Et si dans le département, la majorité des femmes a recours à une IVG médicamenteuse, elles se dirigent également majoritairement vers le centre hospitalier. L’étude montre que “près de 9 IVG sur 10 sont réalisées à l’hôpital (86,8 %) contre 70,2 % dans la région et 76,3 % en France métropolitaine.”

Il faut dire qu’il y a quelques années, le service d’orthogénie de l’hôpital de Mende était le seul endroit du territoire à pratiquer les IVG. Mais l’arrivée de sages-femmes et médecins conventionnés en libéral a changé la donne et un maillage s’est opéré entre tous les acteurs de la santé : “Le planning familial est en lien avec les professionnels qui pratiquent l’IVG, que ce soit au niveau du libéral ou de l’hôpital”, expliquent les salariées de l’association.

 

Former un réseau solide

 “Nous sommes impliquées dans un groupe de travail en Lozère”, détaille Elsa Lescure. Ce travail de fond permet un accès à l’IVG médicamenteuse beaucoup plus simple. Aujourd’hui quatre sages-femmes et deux médecins généralistes libéraux sont conventionnés pour les avortements médicamenteux sur le territoire.

Parmi eux, Noémie Morin, sage-femme à Florac installée en libéral en 2015 après avoir travaillé dans l’hospitalier. C’est en 2017 qu’elle a été conventionnée pour donner accès à l’IVG médicamenteuse à ses patientes, une nécessité selon elle : “L’idée est de pouvoir accompagner les femmes de façon digne et honnête”, explique-t-elle.

La sage-femme s’est formée avec le réseau Reivoc (Réseau pour favoriser la prise en charge de l’IVG et de la Contraception en région Occitanie Pyrénées Méditerranée) qui agit sur toute la région pour former les et rediriger les patientes vers ces professionnels de santé.

De son point de vue, la Lozère a avancé sur le sujet : “Il y a eu un effet boule de neige, nous étions seulement deux à être conventionnées avec le docteur Prunier, qui est dans la même maison de santé que moi. Les femmes venaient du nord du département, de l’Ardèche et devaient parcourir parfois jusqu’à deux heures de route pour une consultation. “

 

Des disparités territoriales

 Le changement législatif qui n’impose plus un délai de réflexion d’une semaine facilite également le travail de la sage-femme : “Parfois je prescris aux patientes les médicaments dès la première visite car elles ont fait leur choix”, explique-t-elle. Seule une prise de sang en amont et après la prise de médicaments est nécessaire et réalisable en laboratoire d’analyses médicales ou via une infirmière libérale.

Mais de nombreux départements ruraux ne bénéficient pas du même maillage que la Lozère, comme le montre un rapport de l’Assemblée nationale paru en 2020. Dans les ruralités, les éloignements géographiques de certains pôles de santé ou soignants, mais aussi le manque d’anonymat dans certains territoires et le manque d’accès à des rendez-vous dans des départements en situation de désertification médicale peuvent restreindre l’accès à l’IVG.

Certains territoires font également face à la multiplication des clauses de consciences de professionnels qui ne souhaitent pas pratiquer les IVG.

Aujourd’hui les Lozériennes bénéficient non seulement du choix de la méthode d’avortement, médicamenteux ou chirurgical (pratiqué seulement à l’hôpital, jusqu’à 14 semaines d’ahménorrée) mais aussi du choix du lieu : “Ça permet de répondre au plus près aux besoins des personnes”, analysent les salariées du Planning familial.

Pour mieux communiquer auprès des patientes, une plaquette recensant toutes les informations concernant l’avortement dans le département a été éditée, de quoi gagner en lisibilité et valoriser un travail de longue haleine.

 

Elodie Potente

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