L’interdiction du cumul d’emploi pour les agents fonctionnaires date de 1983. Le principe, amendé par la loi de modernisation de la fonction publique de 2007 a toutefois prévu quelques dérogations.
N’y figurent ni la possibilité d’exercer sur ses jours de repos en intérim, ni celle de prendre des vacations dans un autre établissement.
Et pourtant, certains soignants n’hésitent pas à “cumuler”, y voyant une bonne opportunité de compléter un revenu jugé insuffisant.
Afin d’essayer d’évaluer les cumuls irréguliers d’activité des agents de l’AP-HM, l’URSSAF PACA a traité un échantillon de 341 titulaires infirmiers nés en 1986 et 1987, rémunéré par l’AP-HM en 2018, explique le rapport de la Cour des comptes.
Dans ce groupe, 23 infirmiers, soit presque 7% du total, ont travaillé pour d’autres employeurs que l’AP-HM sur cette période.
Cumuls dans un établissement privé
Le plus fréquemment, ces agents se sont dirigés vers des vacations dans des établissements privés.
L’étude des homonymies a été utilisée par la Cour des comptes pour chiffrer et évaluer l’ampleur du cumul, dans un des établissements privés de Marseille : le contrôle a révélé qu’entre 27 et 35 agents de l’AP-HM (principalement des infirmiers) étaient concernés, “le chiffre ne garantissant pas l’exhaustivité des recoupements en raison, notamment d’une possible divergence entre les noms d’épouses et les patronymes des femmes mariées.”
Si la plupart n’ont effectué que quelques périodes de travail par an pour cet établissement privé, certains ont enchaîné les périodes de disponibilités sur des durées plus longues atteignant plusieurs mois, voire une année complète.
Rapportés au nombre total de périodes couvertes par des contractuels aides-soignants ou infirmiers dans l’établissement privé, les agents de l’AP-HM ont assurés entre 2,97% et 4,23% des contrats de cet établissement.
Cumul irréguliers sur congés de maladie
Si ces pratiques, bien qu’interdites, peuvent mettre en avant le besoin de revenu complémentaire pour les soignants, d’autres interrogent davantage.
La Cour a en effet identifié des situations de cumul lors de congés maladie : c’est le cas, par exemple, d’un aide-soignant en congés maladie à l’AP-HM du 16 avril au 25 mai 2018, qui a réalisé sur cette même période trois contrats dont le premier a débuté le 22 avril et le dernier s’est achevé le 23 mai.
Lors de l’entretien de fin de contrôle, le secrétaire général de l’AP-HM s’est dit conscient du phénomène, sans être en capacité de l’évaluer avec précision, et surtout sans possibilité de le contrer, l’URSSAF ayant refusé d’accéder à la demande de l’établissement de vérifier la pluriactivité des agents soupçonnés de cumul irrégulier, rapporte la Cour des comptes.
Risque d’atteinte à la santé et à la sécurité
Face à ces constats, deux des syndicats de l’AP-HM ont soulevé comme une critique de l’organisation du travail en 12 heures, la possibilité induite pour les agents de cumuler des activités pendant leur temps de récupération, rapporte la Cour des comptes.
Une situation à risque, pointée aussi par la Cour des comptes. Donnant l’exemple d’une infirmière qui exerce à l’hôpital de la Timone, elle alerte sur le risque pris par la soignante pour elle et pour ses patients : cette infirmière a cumulé des périodes de disponibilité allant de 169 à 301 jours de travail annuel dans l’établissement privé, alors qu’elle a travaillé pour son employeur 79 jours et 60 nuits.
Le cumul des périodes travaillées excédant largement 365 jours, “elle a nécessairement réalisé plusieurs cycles nycthéméraux complets sans aucun repos entre les vacations. Si cette situation est avérée, elle présente un risque important d’atteinte à la santé de l’agent et à la sécurité des patients. Sinon, elle est révélatrice d’un défaut de contrôle de la présence de cette personne soit à l’AP-HM, soit dans l’établissement privé“, soulève la Cour.
Les agents qui réalisent le plus de jours en cumuls irréguliers sont majoritairement positionnés sur plannings de 36h de jours ou de 32h30 de nuit avec des vacations de 12h, note-t-elle.
Rédaction ActuSoins
Des agents intérimaires de l’AP-HM pour le compte de leur employeur principal
Le phénomène semble beaucoup plus marginal, mais il existe.
La Cour des comptes, en confrontant les homonymies entre les fichiers de paye de l’AP-HM et les registres du personnel des sociétés de travail temporaire, a mis en évidence neuf situations de cumul d’activités concernant des agents de l’AP-HM titulaires ou stagiaires ayant été employés pour le compte de l’AP-HM via des sociétés d’intérim.
Il s’agit d’agents qui, pendant leur période d’emploi à l’AP-HM ont également travaillé via une société d’intérim pour leur employeur principal.
L’AP-HM a indiqué, dans sa réponse aux observations provisoires de la Cour des comptes, avoir revu ses procédures internes et ajouté une clause au marché de prestations d’intérim rappelant l’obligation du prestataire de contrôler le cumul irrégulier d’activité.
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