Infirmiers et aides-soignants : ils ont quitté leur région pour contribuer à la lutte contre le coronavirus

De nombreux soignants ont tout quitté, travail et famille, pour aller renforcer les équipes hospitalières de l'est et d'Ile-de-France qui faisaient face au plus fort de la crise du coronavirus, fin mars début avril. Une aide-soignante et trois infirmiers, dont une libérale, racontent.

Infirmiers et aides-soignants : ils ont quitté leur région pour contribuer à la lutte contre le coronavirus

© Olrat/ iStock

Au plus fort de la crise du coronavirus, et encore aujourd'hui, des soignants sont partis prêter main forte à leurs collègues dans les régions les plus impactées par l'épidémie de coronavirus.

Beaucoup n'ont pas pensé à se manifester auprès des agences d'intérim locales, qui ont croulé sous les missions. Mais les soignants ont saisi d'autres moyens.

Véronique Fernet, infirmière libérale sur la Côte d'Azur s'est inscrite auprès de la Réserve sanitaire courant mars dans le but de prêter main forte aux équipes débordées. « J'ai pensé que je serais plus utile là-bas », explique-t-elle.

Elle se porte volontaire pour une mission dès qu'elle reçoit les premières offres. Les établissements de l'Est recherchent des IADE et son profil d'infirmière anesthésiste, dans une vie professionnelle antérieure, a dû « jouer en sa faveur » car elle est retenue immédiatement. Le 25 mars, raconte-t-elle, « on m'a appelée pour me dire que je serais en mission du 30 mars au 8 avril », soit 10 jours au total. Direction le CHR de Metz, à plus de 800 kilomètres, avec sa voiture personnelle ! 

800 km

Merlin Descours, infirmier aux urgences de l'hôpital de Toulon, s'est inscrit, ainsi que sa compagne, également infirmière, sur la plateforme #renforts-covid ouverte au départ par l'ARS d'Ile-de-France et l'AP-HP. « Nous avions une semaine de congés programmée début avril, se rappelle-t-il, mais nous ne nous voyions pas rester à ne rien faire » pendant que les soignants d'autres régions étaient débordés.

« C'était de la solidarité interhospitalière, précise l'infirmier. Si cela avait été dans l'autre sens, on aurait été contents. »

48 heures après leur inscription ils ont été sollicités : il s'agissait de renforcer pendant quatre jours les équipes de l'hôpital Bichat à Paris, début avril, sous un contrat de vacation. La circulation réduite des trains et des avions (ils sont allés à Paris en TGV) les ont empêchés d'y passer plus de temps. 

Aïcha Bkhout, aide-soignante, et Valérie Gret, infirmière, ont toutes deux répondu positivement, « dans le quart d'heure », au SMS de la direction de la clinique Kennedy, à Montelimar, qui proposait à ses soignants d'aller aider leurs collègues du même groupe (Ramsay) en région parisienne. « J'avais envie d'aider mais je ne voyais pas vraiment comment, raconte l'infirmière. Alors quand j'ai reçu le message, je ne me suis pas vraiment posé la question. Je n'en ai pas parlé à mon mari ni à mes enfants. J'ai dit oui. »

Elles sont parties deux jours plus tard, à six de la même clinique et vers la même clinique, à Trappes (Yvelines). Elles y sont restées une semaine (certaines sur leurs congés). Au sein de ce groupe privé, plus de 200 soignants de plusieurs régions - dont 43 de Lille - se sont rendus en Ile-de-France pour aider leurs collègues. « Trois équipes différentes de notre clinique sont parties successivement », indique Sylvie Robin, sa directrice.

Un oui immédiat

Un transporteur sanitaire a prêté aux soignantes de Montelimar des véhicules qu'elles ont conduits de Lyon à Trappes et utilisés pour leurs déplacements sur place, et elles ont été logées, toutes ensemble dans un gîte. Merlin Descours et sa compagne ont été nourris et logé par l'AP-HP dans un hôtel tout proche de l'hôpital.

Sur place, les soignants ont découvert leur affectation. Valérie Gret, habituellement de nuit en chirurgie viscérale, a travaillé aux urgences « covid » (de nuit aussi), Aïcha Bkhout en médecine « covid », Merlin Descours dans plusieurs services (maladies infectieuses, pneumologie, etc.) et Véronique Fernet en réa polyvalente « covid ».

De par leur profil, ces professionnels n'ont pas été très déstabilisés par ce changement de cadre professionnel, certes parfois en mode « dégradé » voire « médecine de guerre ».

Comme leurs collègues en poste sur place et comme ceux « des quatre coins de la France » qu'ils ont rencontrés dans ces services, ils se sont adaptés. « Au début, on se sent un peu étudiant, on observe tout pour aider au plus juste », souligne Valérie Gret.

« Les gestes reviennent », remarque Véronique Fernet. Ils ont fait avec les moyens disponibles, notamment en matière d'équipements de protection, suffisants ici, pas vraiment là... Ces soignants en renfort ont par ailleurs souvent travaillé de nuit (et au départ en binôme avec des confrères ou consoeurs habitués au service).

Solidarité / solitude

Pour les équipes en place, déjà très impactées par la crise sanitaire, accueillir des « nouveaux » qui ne connaissent pas les lieux ni l'organisation du service n'est pas forcément facile. Mais Merlin Descours a observé une « grande solidarité » au sein des équipes où il a travaillé. Ceux qui sont partis en groupe sont aussi revenus plus soudés, observe Aïcha Bkhout.

Ce qui a frappé l'infirmière libérale et son confrère hospitalier de Toulon, en revanche, c'est la solitude tout à fait inhabituelle, « anormale », des patients. L'absence de visites auprès des patients, ceux qui décèdent seuls. La fin de vie de certains sans leur famille à leurs côtés et dans des conditions différentes de celles d'un service de soins palliatifs ordinaire...

A leur retour, les soignantes de la clinique sont restées pendant un temps en quarantaine avant de revenir travailler. Elles ont aussi ont été testées : une de leur collègue a contracté le coronavirus. Merlin Descours et sa compagne sont retournés travailler à la fin de leurs congés et s'astreignent aux même précautions et à la même surveillance de leur santé qu'avant. Quand à Véronique Fernet, elle a repris sa tournée sans délai, « fatiguée mais heureuse d'avoir participé à l'effort collectif et aidé ses collègues ».

Géraldine Langlois

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