Soins des détenus : les droits fondamentaux non respectés

La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, Adeline Hazan a pointé les mauvaises conditions d’accès aux soins des détenus, dans un avis paru au Journal officiel du 16 juillet. Elle émet une série de recommandations pour que les droits fondamentaux de ces patients soient respectés et l'accès aux soins amélioré.

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"Les personnes détenues sont menottées et entravées lors du transfert, mais aussi durant les consultations et examens médicaux, voire parfois même pendant les interventions chirurgicales", déplore Adeline Hazan, contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL).

Des entraves ou menottes systématiques alors que les détenus doivent être menottés ou entravés en fonction de leur niveau de dangerosité, évalué de 1 à 4. De même, les conditions d'escorte doivent être individualisées «au regard du comportement de la personne».

Non respect du secret médical

La présence des personnels de l’escorte lors des consultations ou examens médicaux pose également problème car elle ne permet pas la préservation du secret médical.

Un devoir absolu pour le médecin, rappelle la CGLPL qui recommande que "les consultations médicales se déroulent hors la présence d’une escorte et que la surveillance soit indirecte".

Adeline Hazan fait aussi état de consultations gynécologiques, durant lesquelles les détenues étaient entravées et en présence d'agents femmes. Ce qui est contraire au respect de la dignité des femmes détenues, comme le souligne la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009.

Des chambres sécurisées non conformes "à la logique des soins"

"L’aménagement et l’équipement des chambres sécurisées répondent trop souvent à des seuls critères de sécurité et ressemblent alors davantage à un lieu de détention qu'à un lieu de soins".

L’avis cite notamment l’exemple d’un établissement du Centre de la France où le bouton d’appel, placé au bout d’une cordelette, est retiré aux personnes détenues hospitalisées pour des raisons de sécurité. Le patient ne pouvant alors pas prévenir l’équipe médicale en cas d’urgence. Seul le système d’interphone et de vidéosurveillance permet de contrôler l’état du patient.

Concrètement, les détenus n'ont pas accès au téléphone, ne peuvent pas envoyer de courrier ni recevoir les visites de leurs proches ou de leur avocat. Pourtant,"les visites, les correspondances et les appels téléphoniques doivent être autorisés selon les mêmes règles que celles applicables au sein des établissements pénitentiaires".

En outre, la CGLPL regrette que "dans la quasi-totalité" des chambres, il n'y ait ni télévision, ni radio, ni presse. Enfin, "dans certains établissements, la configuration des locaux sanitaires ne permet pas le respect de l'intimité des patients", dénonce-t-elle, citant "l'absence de rideaux isolant les sanitaires du reste de la chambre" et "les portes laissées ouvertes en permanence".

Améliorer l'accès aux soins dans les unités sanitaires des prisons

Le nombre d'extractions médicales, serait trop élevé selon Adeline Hazan qui préconise "le renforcement de la présence de spécialistes au sein des unités sanitaires" des établissements pénitentiaires .

Elle suggère aussi "une réflexion au sein de chaque établissement pénitentiaire entre les différents services concernés [...] afin que les personnes détenues remplissant les conditions légales puissent bénéficier de permissions de sortir pour se rendre seuls dans un établissement de santé".

Elle cite le cas d'un établissement pénitentiaire de la région des Pays-de-la-Loire qui a fait ce choix, et où, en 2014, pour 207 consultations ou hospitalisations, ont été comptabilisées 154 escortes et 47 permissions de sortie.

La contrôleure estime aussi que "les personnes détenues souffrant de pathologies lourdes devraient pouvoir bénéficier d'un protocole individuel de prise en charge lorsque leur état de santé nécessite de nombreuses extractions médicales, indépendamment de la possibilité d'octroi d'une suspension de peine pour raison médicale".

Adeline Hazan regrette aussi l'absence "de circuit dédié" permettant aux détenus d'accéder sans temps d'attente aux consultations et d'éviter le contact avec le public.

Elle cite en exemple le centre hospitalier de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques) qui a mis en place un "chemin" spécifique grâce auquel les personnels chargés des extractions assurent "que les personnes détenues font désormais l'objet d'une prise en charge rapide et de meilleure qualité".

Accroître la télémédecine

Autre solution : accroître le recours à la télémédecine. L'avis cite deux expériences pilotes menées à la maison d'arrêt de Bois-d'Arcy (Yvelines) et au centre pénitentiaire de Lannemezan (Hautes-Pyrénées). Dans le cas de l'unité sanitaire de Bois-d'Arcy, "109 consultations en dermatologie ont été réalisées en 2013 et 98 en 2014 via la télémédecine".

Selon les chiffres de la direction générale de l'offre des soins, "le taux d'extractions médicales pour la maison d'arrêt de Bois-d'Arcy est de 29 % des personnes détenues, alors qu'il est de 34 % pour la moyenne des maisons d'arrêt d'Ile-de-France", relate Adeline Hazan.

 

Cyrienne Clerc avec Le Figaro, Allodocteurs.fr et APM

Pour aller plus loin, lire notre article dans le dernier magazine ActuSoins (chez vous sur abonnement) : 

Prisons : Le secret médical mis à mal 

Alors que la politique sécuritaire tend à s’accentuer dans les prisons, les soignants y exerçant sont de plus en plus invités à livrer des informations médicales sur les détenus (...)

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Réactions

5 réponses pour “Soins des détenus : les droits fondamentaux non respectés”

  1. Ma Nue dit :

    Rien sur le secret médical et les infs

  2. Actu soins ils arrivent un peu après la guerre mdr

  3. Camille Ripp dit :

    C’est gentil de penser à nous ahah

  4. Julie Josef dit :

    Ma Nue Camille Ripp Estelle Bailly Guillaume Fortmann Céline Muller Frederic Fernandes (… Et tout les autres )ca me fait penser à vous

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