Infirmiers : des conditions de travail qui s’améliorent (lentement) ?

Selon Le Panorama des établissements de santé publié par la DREES (Direction de la Recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques), les contraintes de rythme de travail ont globalement diminué depuis 2003 dans le secteur hospitalier.

Infirmiers : des conditions de travail qui s’améliorent (lentement) ?Ainsi si la part des professionnels hospitaliers déclarant avoir un rythme de travail imposé par des normes de production ou des délais à respecter en une heure au plus a fortement décru (de 48 % en 2003 à 30 % en 2013), cette proportion est aujourd’hui encore significativement supérieure à celle de l’ensemble des salariés français (27 %).

Parallèlement, la proportion de salariés du secteur hospitalier dont le travail dépend directement de leurs collègues ou qui est rythmé par les demandes exigeant des réponses immédiates est restée stable en dix ans.

En revanche, le fait d’avoir un rythme de travail soumis aux contrôles informatiques s’est considérablement accru depuis 2006, pour s’établir à 41 % environ en 2013, soit 6 points de plus que pour l’ensemble des salariés tous secteurs confondus. La hausse est particulièrement prononcée pour les aides-soignants, les infirmières et sages-femmes (+30 % en moyenne).

À l’exception du rythme de travail imposé par l’informatique, la diminution ou la stabilité des autres contraintes de rythme se concrétise par le nombre moins important de salariés déclarant devoir toujours ou souvent se dépêcher (passant de 68% à 64% entre 2003 et 2013, contre 46 % pour l’ensemble des salariés tous secteurs confondus).

Les aides-soignants sont ainsi 5 % de moins en 2013 à déclarer se dépêcher. Les infirmiers et sages-femmes sont cependant toujours aussi nombreux à exercer en urgence (environ 77 % en 2013).

 Travail morcelé

Le travail morcelé et la rotation interne au sein du service ont augmenté dans le secteur hospitalier entre 2003 et 2013 : 80 % des salariés du secteur hospitalier déclarent devoir fréquemment interrompre leur travail pour une autre tâche non prévue en 2013 (contre 72 % en 2003).

Les salariés des établissements privés sont plus souvent soumis à des rythmes et des délais pour réaliser des tâches en moins d’une heure, les infirmiers en particulier sont plus soumis à des obligations par des contraintes techniques ou encore par un contrôle ou suivi automatisé.

Ces différences (avec le secteur hospitalier) peuvent s’expliquer par la différence d’activités entre les hôpitaux publics et les cliniques privées. Ainsi, 74 % des hospitalisations partielles (de moins d’un jour) en chirurgie se déroulent dans un établissement privé.

Des contraintes horaires imposées

Les contraintes horaires se stabilisent, mais restent majoritairement imposées dans le secteur hospitalier. En 2013, 70 % des salariés du secteur hospitalier déclarent travailler le samedi, 64 % le dimanche et 33 % la nuit (entre minuit et cinq heures du matin).

S’agissant des heures supplémentaires, environ 30 % des salariés du secteur hospitalier travaillent au-delà de l’horaire prévu tous les jours ou toutes les semaines, en 2013 ; leur nombre était le double en 2003.

On constate cependant que ces dépassements horaires sont moins souvent compensés qu’auparavant : en 2013, 60 % des individus effectuant des heures supplémentaires déclarent en avoir fait compenser une partie ou la totalité en repos ou en salaire, alors qu’ils étaient 76 % en 2006.

Compte tenu de la complexité de la mise en place des plannings des personnels du secteur hospitalier (travail de jour, de nuit, le week-end), 77 % d’entre eux déclarent que leurs horaires de travail sont déterminés par l’établissement sans possibilité de modification (73 % en 2006 et 69 % en 2003.

Si les tensions avec les collègues ou la hiérarchie ont diminué entre 2003 et 2013 quelle que soit la profession du salarié dans le secteur hospitalier, la proportion de salariés ayant des rapports tendus avec le public (patients ou accompagnants par exemple) a augmenté, en particulier pour les professions les plus exposées : les agents d’entretien (19 % en 2003, 32 % en 2013), les aides-soignants (43 % en 2003, 56 % en 2013) et les infirmiers et sages-femmes (54 % en 2003, 66 % en 2013)

Moins de contraintes physiques

Entre 2003 et 2013, les personnels hospitaliers déclarent moins de contraintes physiques.

Ainsi, les difficultés liées aux mouvements douloureux ou fatigants ont diminué de 11 points, réduction qui est particulièrement ressentie par les infirmiers et sages-femmes ainsi que par les médecins salariés et assimilés (respectivement -13 points et -22 points).

Pour les agents d’entretien, les aides-soignants, les infirmiers et sages-femmes, même si les contraintes physiques diminuent, la proportion de salariés concernés reste encore très élevée, en particulier du fait de la spécificité de leur métier.

Les salariés des établissements publics déclarent plus souvent des nuisances environnementales que les salariés des établissements privés puisque sur les neuf items proposés, 46 % déclarent au moins trois nuisances contre 38 % dans le privé.

C’est entre les infirmiers du public et du privé qu’apparaissent les différences les plus importantes sur les conditions d’hygiène de l’environnement de travail. La moitié des infirmiers du public déclarent au moins trois nuisances contre 44 % des infirmiers du privé. En particulier, les nuisances sont plus élevées concernant les mauvaises odeurs (63 % contre 55 %), les courants d’air (30 % contre 27 %), ou le mauvais état des sanitaires (11 % contre 6 %).

Concrètement, les infirmiers sont 72 % à se sentir exploités contre 65 % pour l’ensemble des salariés travaillant à l’hôpital. De plus, 18 % des infirmiers déclarent toujours travailler sous pression, c’est 5 points de plus que pour l’ensemble des familles professionnelles du secteur hospitalier et 10 points de plus que pour les médecins.

Manque d’épanouissement

Quatre personnes sur dix dans le milieu hospitalier ne se sentent pas capables de faire le même travail jusqu’à leur retraite, et cette proportion atteint même la moitié des aides-soignants et des infirmiers. Enfin « devoir penser à trop de choses à la fois » est la composante qui est en moyenne la plus citée, par six personnes sur dix. Cet aspect de l’exigence au travail est plus mal vécu par les infirmiers (75 %) et les médecins (69 %).

Enfin, le manque de reconnaissance est plus prégnant chez les infirmiers (41 %).

Les infirmiers sont la famille professionnelle la plus exposée aux risques psychosociaux, en particulier pour l’exigence du travail et les exigences émotionnelles.

Parmi eux, rares sont ceux qui déclarent éprouver toujours un sentiment de « travail bien fait », vraisemblablement en lien avec ces exigences élevées. les personnels en contact direct avec les malades (médecins, infirmiers, sages-femmes et aides soignants) sont plus souvent exposés à des risques psychosociaux que l’ensemble des personnes en emploi, en raison notamment des exigences émotionnelles liées à leurs missions.

La conclusion reste sévère : quatre personnes sur dix dans le milieu hospitalier ne se sentent pas capables de faire le même travail jusqu’à leur retraite, et cette proportion atteint même la moitié des aides-soignants et des infirmiers.

Cyrienne Clerc avec la DREES (Panorama des établissements de santé)

 Lire le dossier "Les conditions de travail dans les établissements de santé"

Abonnez-vous à la newsletter des soignants :

Faire un don

Vous avez aimé cet article ? Faites un don pour nous aider à vous fournir du contenu de qualité !

faire un don

Réactions

21 réponses pour “Infirmiers : des conditions de travail qui s’améliorent (lentement) ?”

  1. J’entame ma 40è année de boulot + 3 ans d’études, j’avais 18ans , j’en ai 61 et j’en ai ras le bol…je pensais partir en sept 2015 , et bien non ! on en rajoute encore …4 mois de plus en prime …je ne pensais pas tenir aussi longtemps ! eh bien si …et d’autres comme moi … mais pris dans l’action ,vous suivez le mouvement ,…les chiens aboient , les caravanes passent …et le temps aussi !!!!

  2. Manou Mms dit :

    Apres 39 ans de goulag et 3 ans d etudes Il me reste 3 ans cela va etre tres tres tres long.et apres je me barre a la vitesse de la lumiere

  3. Lol non, ca ne s ameliore pas du tout.. Au contraire, je sais pas où on va.. Je suis de Toulouse, je travaille dans un super grand bâtiment qui a ouvert y a environ 1an et qui a coûté des millions. Aujourd’hui ca fait 15jours que mon service est fermé pour manque d activités et manque de personnel. Donc on nous trimballe dans d autre service. On viens d apprendre que ca allait etre comme ca pendant 1 an, qu ils vont fermé a tour dd role 4 services tous les 15jours pendant 1 an et trimbaler le personnel jusqu’a la fermeture definitive d un de ces services.. Avec les suppression de personnel que ca implique.. Donc non, c’est loin d aller mieux.

    • Et chez nous, il y a trop d’activité, tous les jours c’est la course pour trouver des lits. Ils ont fait un grand bâtiment, seul hic plus de blocs mais moins de lits et surtout arrivée de services d’autres hôpitaux qui n’étaient pas prévus quand ils ont fait les plans

    • Ha, nous c est l inverse. Pas assez de bloc par rapport aux lits d hospit et par rapport au nombre de chir. Du coup un service fermé et les autres blindé..

  4. La psychiatrie tant décriée et tant redoutée par les ide qui soi disant veulent faire du soin technique, devraient venir bosser en psychiatrie, car on embauché beaucoup mais surtout on ressemble de plus en plus à l’hôpital général, et il y a de plus en plus de soins techniques mais aussi d’autres avantages. A vous de voir.

  5. Jeanne Boyer dit :

    Du mal à me projeter encore plus de 20 ans ds un service hospitalier…ce sera non pour moi!!

  6. étonnant ! détonant ! pendant qu’on y ai plus on va supprimer d’emplois plus on va remettre en cause les 35 heures, plus cela va s’améliorer ?

  7. Agnes Garces dit :

    A l heure actuelle a la sortie d école tu vas où il y a du travail. Ce n est pas la peine de faire des choix de lieu et de service car tu prends ce qu’on te propose en attendant la plupart du temps 1 an a 18 mois quand tout va bien avant un CDI. Alors changer d emploi quand on en peut plus, je n y crois même pas. Triste réalité

  8. Sissou Grigri dit :

    Ca va être dur de tenir

  9. Impossible, c’est de l’esclavage ! Pas du travail , la fonction ide … on va finir comment , on n’y arrivera pas !

  10. Oui ! Pas dans ces conditions en tout cas.

  11. Cali Caliotte dit :

    Tu proposes quoi Seb Gonzy, nous avons un service minimum. Quoique nous fassions ça passera inaperçu. Voyons ce que les sages femmes ont fait. Pourtant très mobilisée. 18mois après, plus personne n’en parlait et pourtant…

  12. Seb Gonzy dit :

    Nous IDE sommes incapables de nous mobiliser pour défendre nos conditions d’emplois au niveau national, la reconnaissance de notre travail et de nos études. Mais c’est surtout de la sécurité des soins et donc du patient dont il est question. Critiquer sur facebook nous savons faire mais agir c’est autre chose…!

  13. La phrase veut tout dire « combien de temps tiendrez vous » on se croirait dans une nouvelle émission de télé réalité! Mais ça c’est la réalité tout court! Pour ma part 21 ans que je tiens, et je ne sais pas comment c’est possible!

  14. Sylvie Gaspar dit :

    Vu comment la fonction hospitalière française tourne en ce moment, jamais ni bonne ni conne !

  15. Tout a fait impossible et improbable que je tienne jusqu’à la retraite

  16. Little_asa dit :

    La conclusion reste sévère : quatre personnes sur dix dans le milieu hospitalier ne se sentent pas capables de faire le même travail jusqu’à leur retraite, et cette proportion atteint même la moitié des aides-soignants et des infirmiers.
    =============================================

    Mais bon, puisque Bachelot nous dit que ce métier n’est pas pénible, pourquoi se plaindre hein?
    (c’est du sarcasme hein).

Réagir à cet article

retour haut de page
395 rq / 5,035 sec