Violaine Levistre, une infirmière MSF dans l’enfer d’Ebola

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Violaine Levistre est partie pendant un mois et demi en Guinée dans un centre de traitement de Médecins Sans Frontières. Alors qu'une de ses collègues (du retour du Liberia) est actuellement hospitalisée à l'hôpital militaire Bégin à Saint-Mandé où elle reçoit des traitements expérimentaux, Violaine Levistre raconte son expérience à ActuSoins.

©DR Violaine Levistre, à Donka, en Guinée

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Violaine Levistre, à Donka, en Guinée

« Je vais bien, merci ! » Violaine Levistre, infirmière de 38 ans est bien rentrée de sa mission dans l’épidémie d’Ebola pour Médecins Sans Frontières (MSF) en Guinée.

Cette parisienne engagée dans les missions humanitaires en tant qu’infirmière depuis 2006 et qui, depuis 2012, ne travaille plus que pour MSF, ne semble pas traumatisée par cette dernière expérience.

Revenue fin août de Conakry, après un séjour d’un mois et demi en Guinée, elle a pu directement reprendre sa vie ordinaire.

« J’ai pu aller où je voulais, voir qui je voulais, il fallait simplement que je surveille pendant le temps d’incubation de 21 jours d’éventuels symptômes comme l’apparition de fièvre, de nausées, de vomissements, ou de diarrhée », explique-t-elle.

La jeune femme semble sereine, même si elle reconnaît que cette maladie qui a contaminé 5335 personnes, dont dernièrement une volontaire MSF, et décimé 2600, « peut faire peur ». Pourtant, elle n’a pas hésité à partir quand son « poolmanager », qui répartit les volontaires sur différentes missions, lui a proposé cette mission.

Elle a donc été envoyée le 15 juillet à l’hôpital public de Donka, dans la capitale guinéenne, où ont été montées les tentes d’un des deux centres de traitement de MSF dans le pays. La mission, comme toutes celles d’urgence, est courte car le rythme de travail est intense, sans jours de repos.

L’équipe était alors composée de 45 professionnels guinéens (hygiénistes, gardiens, lavandières, et infirmières) et de 4 expatriés (un responsable terrain, un médecin, une administratrice et elle-même, infirmière référente). Le centre comptait au total 34 lits : 20 destinés aux malades suspectés d’avoir contracté Ebola, et 14 pour ceux dont les analyses sanguines ont révélé qu’ils étaient effectivement porteurs du virus.

Sur ces deux zones, les conditions d’hygiène sont très strictes, avec un sens unique de circulation de la zone à bas risque (pour les malades suspect) vers la zone à haut risque (pour les malades confirmés). Dans cette dernière zone, on n’entre qu’en tenue protectrice, protégé de la tête au pied. A la sortie, la décontamination au spray de chlore est méticuleuse.

Méfiance envers les Blancs

Premier défi pour l’équipe de MSF : il a fallu gagner la confiance des malades. « Certains pensent que les blancs ont amené la maladie, qu’on leur injecte des médicaments qui vont les tuer, ou qu’on ne va rien faire », raconte Violaine Levistre.

Les proches des malades, interdits d’accès au centre de traitement, ne peuvent pas les rassurer. Les gardiens du centre veillent ainsi à ce que toutes les mesures d’hygiène soient respectées, que n’importe qui n’entre pas dans le centre. Ils veillent également à la sécurité du personnel.

« Il y a eu des mouvements de population, dans la zone où s’est déclaré le virus, à Guéckédou », raconte l’infirmière qui, pour sa part, n’a jamais été agressée ou la cible de comportements agressifs. En un mois et demi de mission, deux patients se sont évadés du centre. « L’un était négatif, l’autre s’est enfui avant qu’on n’ait pu lui faire les tests nécessaires ».

Heureusement, lors du triage, les équipes listent avec le patient les proches qui auraient pu être en contact étroit avec lui. « Nous appelons la famille pour qu’elle convainc le malade évadé de revenir, pour qu’elle le tienne isolé le temps qu’on aille le chercher. » Deux patients guéris d’Ebola sont devenus promoteurs de santé et témoignent auprès des patients de l’utilité de rester dans le centre.

Des vagues successives

Alors que MSF alertait les organisations internationales sur le manque de lits et la difficulté de prendre en charge des malades en Afrique, l’équipe de Violaine Levistre n’a jamais refusé du monde quitte à rajouter quelques lits dans les chambres.

En revanche, l’autre centre de traitement de Guinée, à Guéckédou, épicentre de l’épidémie dans le pays, manquait parfois de personnel. « Ce qui est compliqué avec cette épidémie est que les malades arrivent par vagues. Entre deux, nous pouvions être en surnombre et libérions des médecins pour l’autre centre mais la semaine d’après, c’était nous qui manquions de personnel face à une nouvelle vague d’arrivées de malades. ».

A cela s’ajoute le manque de volontaires pour remplacer ceux, en fin de mission. Ainsi, le centre n’a pas eu de responsable administrative pendant 10 jours. Et pourtant la crise ne fait que s’accentuer. Violaine Levistre le reconnaît, MSF seul « ne pourra pas gérer seul l’épidémie ».

Ariane Puccini (Youpress)

A relire : Evacuation (lente) d’une infirmière française de MSF atteinte d’Ebola

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