« Pronostic mental engagé », c’est le titre du rapport sur la santé mentale des étudiants en santé, publié cette semaine par 15 associations et fédérations d’étudiants de ces filières (soins infirmiers, médecine, sages-femme, kiné, orthophonie, etc.).
Elles souhaitent « lever l’omerta » sur ce sujet, résume Bleuenn Laot, présidente de la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (FNESI) : « on ne veut plus se taire ». Selon elle, « on est arrivé à un point de non retour ».
« On nie notre souffrance », nous confiait il y a peu une ESI qui a été envoyée prêter main forte à des équipes hospitalières au lieu d’aller en stage.
Pour la deuxième fois en moins d’un an, crise sanitaire oblige… Les étudiants dont la formation a été interrompue du jour au lendemain en novembre en PACA, et qui ont dû se débrouiller seuls pour trouver des vacations l’ont aussi très mal vécu.
Là où les autres étudiants se voient « seulement » obligés de suivre des cours à distance, les jeunes qui suivent des études de santé cette année sont particulièrement impactés par les conséquences de la crise. Ils ne sont toujours pas des étudiants comme les autres…
La crise n’explique pas tout
Les difficultés liées à la crise sanitaire, génératrices de fortes incertitudes sur la qualité des études et la valeur de leur diplôme, s’inscrivent dans un paysage estudiantin déjà peu favorable.
Le rapport pointe ainsi que 80,4% des ESI estiment que leurs études ont un impact négatif sur leur vie personnelle.
Ce travail décortique l’ensemble des facteurs liés aux études qui entrent en jeu : la formation en elle-même, sur le plan pédagogique ou de l’organisation des enseignements, les stages en milieu de soin et la précarité des étudiant.
Comme le souligne Bleuenn Laot, les études en soins infirmiers sont « éprouvantes, stressantes. En stage, nous sommes confrontés à des situations très difficiles, parfois atroces, comme lorsque nous participons à l’accompagnement de personnes en fin de vie… On nous demande d’apprendre à gérer nos émotions, à nous en détacher. Mais aujourd’hui on laisse trop les étudiants se débrouiller seuls » dans ce domaine.
Le rapport, qui évoque d’ailleurs les dispositifs et structures qui pourraient venir en aide aux étudiants en souffrance, pointe que les 15 engagements pour le bien-être des étudiants en santé, annoncés en 2018 par Frédérique Vidal ministre de l’Enseignement supérieur, et Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé, n’ont pas porté leurs fruits…
Des soins pour les futurs soignants
« Le pays a besoin de soignants, on manque d’infirmières et d’infirmières, nous sommes les futurs soignants, et rien n’est fait pour prendre soin de nous », déplore la présidente de la FNESI.
En ne prenant pas cette réalité en compte ou, pire, en indiquant dans son vademecum sur la mobilisation des personnels pendant la crise que les ESI peuvent être mobilisés une semaines par stage de cinq semaines en tant qu’aide-soignants, une mesure « très angoissante » pour les étudiants, « le gouvernement se tire une balle dans le pied, ajoute-t-elle. Comment prendre soin si on ne prend pas soin de nous ? »
Géraldine Langlois
Les Etudiants en soins infirmiers manifestent cet après-midi à Paris
Pendant la crise sanitaire, les étudiants en soins infirmiers ont dû faire face à des situations ubuesques et inédites. Stages transformés en renforts, formation interrompue, disparité de traitement selon les régions…
Pour la Fnesi, la situation n’est plus tolérable. “Nous avons sollicité les ARS et les ministères qui ne nous ont pas proposé de mesures concrètes“, explique-t-elle dans une lettre ouverte. “Nous n’avons plus d’autre choix, nous devons nous faire entendre autrement […] Montrons que nous ne laisserons pas bafouer nos droits sans conséquences !“.
La fédération, soutenue par des organisations infirmières (CEFIEC, SNPI, CNI, ANEIA, SNIES, FNI), a lancé un appel à manifester cet après-midi à Paris.
Reportage à suivre sur ActuSoins.
M.S
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