Nouveaux étudiants en soins infirmiers : La réforme incomprise

Nouveaux étudiants en soins infirmiers : La réforme incomprise

Depuis la réforme, les nouveaux étudiants en soins infirmiers sont souvent vivement critiqués par une partie de la communauté infirmière. Selon les dires, ils seraient moins compétents et alertes qu’avant. La tension monte entre les anciens et les nouveaux.

Nouveaux étudiants en soins infirmiers : La réforme incomprise

Une intégration difficile dans les services

« Largués, boulets, incapables… ». À en croire certains commentaires sur la page Facebook d’Actusoins, les nouveaux étudiants en soins infirmiers représenteraient un lourd fardeau dans les services.

« Quand on arrive en stage, on nous attend un peu de pied ferme. Certains professionnels nous regardent d’un mauvais œil et nous reprochent de ne pas être de vrais professionnels. Selon eux, nous ne mériterions pas notre futur diplôme » regrette et confirme Jonathan Nagode, président de la FNESI.

Idées reçues ou opinions fondées sur l’expérience ? Les étudiants « nouvelle génération » sont en tout cas bien souvent malmenés malgré eux.  Pourtant, ce sont eux qui sortiront pour la première fois en 2012 avec une réelle reconnaissance – un grade licence, correspondant au bac +3 tant réclamé par le passé par la profession – et une opportunité de poursuivre leurs études comme dans n’importe quelle autre filière.

Côté pratique, ce qui déplait, en général, c’est  l’absence de MSP, de note de fin de stage ou d’expérience tout simplement. En effet, les étudiants ont moins de stages, et pas – ou peu – de techniques enseignées à l’IFSI.

Quant au coté théorique, il y a moins de pathologies étudiées. « Depuis 1992, nous sortions des infirmiers polyvalents, certes. Maintenant, la consigne, c’est de sortir des infirmiers réflexifs » explique Jane-Laure Danan, vice-présidente du CIEFEC. « Des infirmiers qui réfléchissent sur leur pratique, capables de se former non seulement par le biais des connaissances, mais aussi des compétences. Des infirmiers qui puissent admettre qu’ils ne connaissent pas tout sur tout et qui pourront résoudre les problématiques par leurs propres moyens » ajoute-t-elle.

L’universitarisation, nécessaire à ce changement de programme, suscite aussi de vifs émois. « Il faut que la formation reste professionnelle, plutôt que strictement universitaire » s’inquiète Michelle dans un commentaire d’article.

Des résistances au changement

Pour Jane-Laure Danan, les critiques de la profession relèvent simplement d’une « résistance au changement ». « Il s’agit d’un conflit psychosocial entre les nouvelles et les anciennes générations. Chaque fois qu’il y a une réforme, les professionnels estiment que c’était mieux avant. Pourtant ce sont bien eux qui ont demandé cette réforme.»

Elle illustre sa théorie par l’exemple de la MSP. « Nous – les formateurs et directeurs, ndlr – avons de manière unanime entendu nos collègues des services de soins nous dire que les MSP prenaient trop de temps, qu’elles étaient inutiles et qu’il faudrait un autre dispositif. Dès lors que nous avons mis en place ce nouveau dispositif, il y a des mécontentements », ajoute Jane-Laure Danan.

Le bon de la réforme

Plus de MSP ? « Tant mieux », selon Jonathan Catinaud, chargé de la mission communication de la FNESI, en réponse à une internaute qui estime que le D.E « n’est plus ce qu’il était ». « La MSP représentait le seul jour où tu préparais ton chariot, où tu le désinfectais pour aller faire la toilette de M.X alors que les autres jours tu prenais tout dans tes bras. La quasi-totalité des formateurs savaient que tout était théâtralisé. Jusqu’au patient, qui vantait les mérites de l’étudiante ».

Même raisonnement pour les notes de stage, remplacées par un port-folio qui évalue dix compétences et qui rend possible un meilleur suivi dans le temps. « Il permet aux professionnels de voir le parcours de l’étudiant mais aussi son niveau d’acquisition. C’est l’occasion d’une vision plus concrète » reprend Jonathan Nagode.

Quant aux stages, certes moins nombreux, ils sont plus longs. Les étudiants font un seul stage par semestre qui dure entre 5 et 15 semaines. « On connaît mieux nos patients et l’on a l’occasion de naviguer sur les services adjacents. Par exemple, un stagiaire en chirurgie pourra faire une semaine au bloc et en salle de réveil. »

Pour veiller à répondre aux attentes des professionnels et des étudiants, un comité de suivi de la réforme se réunit régulièrement au ministère de la santé. Tous les représentants disent unanimement qu’il y a encore des points à améliorer – notamment en terme de tutorat et de disponibilité dans les services -, pour que les professionnels d’aujourd’hui et de demain soient à même de travailler main dans la main.

Malika Surbled