Mobilisation pour le soutien psychologique des soignants confrontés au coronavirus

Mobilisation pour le soutien psychologique des soignants confrontés au coronavirus

Les initiatives se multiplient pour proposer, en cette période de crise sanitaire, un soutien psychologique et une écoute aux soignants fragilisés ou stressés. Elles se déploient à l'échelle d'un territoire, d'un établissement, d'associations ou d'un groupe de psys bénévoles pour proposer un espace de parole à ceux qui sont en première ligne.
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« Les soignants, qui sont dans le feu de l’action et très engagés, ont parfois du mal à demander une aide psychologique », observe le Dr Frédérique Warembourg, psychiatre et coordinatrice du centre régional du psychotrauma au CHU de Lille.

La crise sanitaire dans laquelle ils sont plongés les confronte pourtant à des difficultés inédites. Ils sont témoins de drames humains et ils travaillent dans une tension physique et émotionnelle encore plus grande que d’habitude, pour une période déjà longue et dont la fin n’est pas encore connue… Beaucoup craignent aussi d’être contaminés et de contaminer leurs proches ou des patients. « C’est tout à fait normal d’être stressé dans cette situation », ajoute la psychiatre.

Double dispositif au CHU de Lille

Le CHU de Lille a donc créé un dispositif d’écoute et de soutien psychologique destiné aux soignants. Il comprend d’une part une ligne téléphonique, dont le numéro est communiqué en interne.

Au bout de ses six postes, des psychiatres, psychologues, infirmiers exerçant en psychiatrie et internes en psychiatrie, dont certains sont membres de la cellule d’urgence médico-psychologique du CHU. Ils sont disponibles depuis le 20 mars, de 8h30 à 21h, pour écouter et soutenir les soignants… de l’établissement mais aussi des autres hôpitaux de la région où sont pris en charge des patients Covid-19.

Des membres de cette « équipe » informelle font régulièrement des maraudes dans les services de l’hôpital impactés par la crise sanitaire pour faire connaître la ligne téléphonique mais aussi le second volet du dispositif : des consultations « de visu ». « Nous avons mis en place une consultation “physique”, explique Frédérique Warembourg. Nous pouvons recevoir les agents du CHU, en cas de besoin. »

Bien d’autres établissements ont mis en place des dispositifs de soutien pour les soignants. Les Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) ont créé la cellule CoviPsy67, pour les personnels soignants du Bas-Rhin. Plus 50 professionnels du soutien psychologique répondent aux soignants qui appellent la ligne dédiée (03 88 11 68 20) ouverte sept jours sur sept. Ils y proposent une écoute et une évaluation médico-psychologique et orientent le cas échéant vers un accompagnement « adapté et gradué ».

Des établissements publics de santé mentale ont aussi ouvert des lignes de soutien en Bretagne, en Dordogne et ailleurs.

Mobilisation en ville

Des psychologues, psychiatres et psychothérapeutes de ville se mobilisent également.  Marie-José Del Volgo et son mari Roland Borri, psychanalystes à Marseille, ont souhaité proposer une écoute et un soutien psychologique (gratuit), en priorité aux soignants hospitaliers et libéraux et aux agents hospitaliers non soignants.

« De nombreux collègues ont trouvé cela intéressant, souligne Marie-José Del Volgo. Ils se sont associés à la démarche, menée sous l’égide de l’Appel des appels , qu’elle et Roland Borri ont lancé en 2008. 

« Une chaine de solidarité s’est mise en place », poursuit-elle. Ils ont réservé des créneaux horaires dans leur emploi du temps pour recevoir les demande d’aides des professionnels en première ligne face aux patients touchés par le Covid-19. Sept jours sur sept, toutes les plages horaires mobilisent entre un et trois « psys », à Marseille et Paris.

Quelques psychologues se sont réunis sous la bannière des « Psychologues solidaires »  (présents aussi sur Facebook). Ils sont 1500 selon Tiffany Perrier, psychologue à l’origine de ce mouvement, avec son mari informaticien, qui a mis en place les outils numériques du projet. Sur la plateforme qu’ils ont créée, ils mettent en relation des soignants et des psychologues, dont les qualifications sont vérifiées (et les consultations dans ce cadre gratuites). Les soignants reçoivent une liste de psychologues dans laquelle ils choisissent celui à qui ils souhaitent parler et qui est disponible. Ces psychologues « apportent une écoute, pas un suivi psy thérapeutique », précise Tiffany Perrier.

A l’Ordre aussi

Psychologues du monde et le Réseau national des psychologues ont également lancé, au détour de cette crise sanitaire, le dispositif « Action in(tervention) psy(chologique) COVID-19 ». Sur leur plateforme web (via la visio ou le chat) ou par un numéro vert (09 74 19 18 00), les soignants peuvent bénéficier d’une consultation « non payante » avec un psychologue.

Ces dispositifs s’ajoutent à ceux qui sont déjà disponibles, au niveau national, 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Comme la ligne d’entraide (0800 288 038) pour tous les professionnels de santé que l’Ordre national des infirmiers et celui des médecins ont ouvert, en avril 2018. Ou le numéro vert de l’association Soins aux professionnels de santé (SPS, 0805 23 23 36, appli « ASSO SPS »), qui donne aussi aux soignants accès à un réseau national de 100 psychologues.

Géraldine Langlois

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