Les plus de 35 000 infirmières et infirmiers (dont 10 000 diplômés depuis moins de 10 ans)* qui ont répondu à la consultation de l’Oni en décembre considèrent avec une certaine sévérité la formation délivrée aux étudiants en soins infirmiers.
À l’heure où, 15 ans après la précédente réforme du référentiel de formation, la nouvelle réingénierie est en cours, l’opinion des IDE sur leur formation montre l’urgence de sa réforme. Et de son « adaptation aux réalités d’un métier en pleine évolution », souligne l’ONI.
En effet, la moitié des infirmiers ayant répondu estiment que leurs missions, sur le terrain, dépassent le contenu théorique délivré lors de leur formation. Cette proportion est encore plus élevée (63%) pour les diplômés depuis moins de 10 ans.
« Désenchantement »
Une partie non négligeable des répondants affiche une vision assez désabusée du métier : alors que six infirmiers sur dix recommanderaient à des proches de faire ce métier, ce n’est pas le cas pour 37% d’entre eux. D’ailleurs, précise l’Oni, un jeune diplômé sur deux considère que la formation est l’un des motifs de désenchantement.
Quatre sur dix (et les deux tiers des diplômés de moins de cinq ans) admettent d’ailleurs avoir envisagé d’abandonner leurs études en cours de route. Beaucoup d’entre eux (sept sur dix) auraient apprécié de bénéficier d’un meilleur accompagnement durant leurs études. Et « près de 30% des infirmiers (et 41% de ceux diplômés depuis moins de 10 ans) déclarent ne pas s’être sentis suffisamment encadrés et soutenus depuis leurs premiers pas au contact des patients », peut-on lire dans les résultats de la consultation.
En termes de sujets d’enseignements, la moitié des répondants voudraient pouvoir suivre plus de cours sur la prise en charge des urgences, 38% sur la pédiatrie et 32% la gestion de la violence, loin devant les soins palliatifs (21%), la psychiatrie (13%) et la gériatrie (11%).
Par ailleurs, quasiment 7 répondants sur 10 se disent prêts à s’investir dans le tutorat des jeunes diplômés. Et plus encore (9 sur 10) considèrent que les acquis professionnels devraient être plus pris en compte à travers la validation des acquis de l’expérience ou la validation des acquis professionnels.
Propositions
L’Ordre formule une série de propositions pour remédier aux problématiques révélées par cette consultation.
La première, de grande ampleur, préconise que la réforme, en cours, du décret infirmier s’opère « en passant d’un décret d’actes à un décret de missions » afin de mieux refléter l’activité quotidienne réelle des infirmiers. Un préalable indispensable pour envisager la réforme de la formation : « les deux sont liés », rappelle-t-on à l’Oni.
L’Ordre propose aussi qu’il soit intégré aux discussions sur l’ouverture du nombre de places en IFSI « pour qu’elles soient en adéquation avec les besoins de la population du bassin de vie d’implantation de l’établissement », ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Cela lui semblerait légitime puisqu’il dispose d’une cartographie fine du nombre de professionnels dans chaque territoire. Il propose d’autre part de renforcer les passerelles en cours de formation notamment entre les différents parcours de formation en santé « pour favoriser l’évolution professionnelle ».
Accompagner davantage
Plusieurs propositions concernent enfin l’accompagnement des étudiants durant leurs études, en particulier les stages, et celui des jeunes diplômés à leurs débuts, des moments charnière dans la façon dont les futurs et jeunes professionnels vont envisager leur futur.
L’Ordre propose de diversifier les lieux de stages en les adaptant davantage au projet professionnel des étudiants mais aussi de personnaliser davantage l’accompagnement des étudiants durant leurs stages.
Sur la question du tutorat des jeunes diplômés, qui souffre du manque de professionnels expérimentés et disponibles, l’Oni suggère de lancer une réflexion sur des modules de formation et du temps dédiés ainsi que sur une meilleure reconnaissance des missions des tuteurs.
Enfin, l’Ordre souhaite que soient renforcées la VAE et la VAP pour les infirmiers « tout au long de leur parcours » et que la certification périodique des professionnels de santé soit déployée car elle est, précise-t-il, bénéfique pour la qualité des pratiques, des soins et des relations avec les patients mais aussi pour la santé des soignants.
Géraldine Langlois
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* Plus de la moitié sont salariés du secteur public, un peu moins d’un tiers salariés du secteur privé, 4% sont libéraux.
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