Il pourrait manquer 80 000 infirmiers en 2050

Il pourrait manquer 80 000 infirmiers en 2050

Si l’évolution de la population et de la démographie infirmière se poursuivent au même rythme que ces dernières années, il manquera 80 000 infirmiers pour répondre aux besoins en soins en 2050. C’est la conclusion majeure de la récente étude la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) du ministère de la Santé, qui pointe les leviers à activer pour éviter ce scénario.

© Dikushin Dmitry / ShutterStock

Si la forte hausse des effectifs infirmiers entre 2013 et 2020 (la plus élevée parmi les professions de santé sur la période) se poursuit au même rythme jusqu’en 2050, le nombre d’infirmiers passera de 599 000 en 2021 à 821 000 en 2050, soit plus 37%.

C’est le scénario que formule la Drees en s’appuyant sur des hypothèses de « comportements constants ». Le mode d’exercice libéral serait celui qui connaîtrait la plus forte progression, plus 60% sur la période, contre plus 15% seulement pour les salariés.

De ce fait, la part des infirmiers libéraux parmi l’ensemble des infirmiers passerait de 16% en 2021 à 21% en 2050.

La part des infirmiers qui travaillent à l’hôpital public baisserait en revanche pour atteindre 40%, notamment à cause des départs en cours de carrière. La part d’infirmiers travaillant dans les secteurs de l’hospitalisation privée, social et médicosocial, en revanche, resterait stable.

Décalage avec les besoins

Selon la Drees, la hausse globale du nombre d’infirmiers ne se traduira pas forcément par une amélioration de la couverture des besoins en soins infirmiers.

Même si le rythme de croissance des effectifs continue de dépasser, comme c’est le cas entre 2013 et 2021, celui de la croissance de la population, il sera, compte tenu des hypothèses de comportements constants, inférieur au rythme de croissance, dans la population générale, de la part et du nombre des 60 ans et plus, qui concentrent 84% de la consommation de soins infirmiers.

Si cette consommation est constante, elle augmentera ainsi de 50% entre 2021 et 2050… alors que le nombre d’infirmiers n’augmentera, lui, « que » de 37%. Et la densité d’infirmiers pour 100 000 habitants passerait ainsi de 885 en 2021 à 807 en 2050. Pour répondre à ce niveau de consommation de soins, il faudrait que le nombre d’infirmiers atteigne 901 000 en 2050 : il  en manquerait donc 80 000.

Pour Camille Parent, autrice de cette étude, le nombre de diplômés constitue le principal levier pour infléchir la courbe des effectifs d’infirmiers. Selon elle, il faudrait que le nombre de diplômés augmente de 13% par rapport à la tendance issue des hypothèses de ce modèle (29 000 par an), et passe ainsi à 39 000 par an entre 2021 et 2050.

Augmenter le nombre de diplômés

Ce scénario dépend de plusieurs facteurs, le nombre de places en IFSI, les taux d’inscriptions et les interruptions en cours d’études, dont les variations peuvent influer fortement sur les scénarios.

Sur le plan des quotas de places, la tendance est plutôt favorable puisque le nombre de places a augmenté de 23% entre 2010 et 2021 pour atteindre 38 000 places en 2025. Mais le taux d’abandon est aussi à prendre en compte. « La progression des taux d’interruption en cours de formation est devenue spectaculaire sur les toutes dernières années », observe Camille Parent. Il est passé de 11% en moyenne entre 2013 et 2019 à 16% de 2020 à 2022, culminant à 20% en 2022. « Si le taux d’abandon restait au même niveau qu’en 2022, il faudrait plutôt 43 200 places de formation par an », souligne l’autrice, pour atteindre le nombre de diplômés nécessaires. Ou bien réduire drastiquement le taux d’abandon.

Elle évoque par ailleurs la nécessité de réduire le nombre d’infirmiers qui quittent la profession en cours de carrière et donc d’améliorer l’attractivité de la profession elle-même et, par rebond, de sa formation. D’autant plus que sur la période considérée le champ des soins infirmiers pourrait lui aussi évoluer. Tout comme la consommation de soins des patients, à la baisse sous l’effet des progrès médicaux, ou à la hausse avec l’apparition de nouvelles maladies ou sous l’effet de nouvelles modalités d’organisation des soins.

Enfin, si un des scénarios d’évolution de la population produits par l’Insee, avec un rajeunissement de la population, se réalisait, la consommation de soins ne progresserait que de 37%… au même rythme donc, que la tendance de la démographie infirmière envisagée.

Géraldine Langlois

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