Prenant en compte les données de l’incidence de la tuberculose, l’efficacité du vaccin BCG, les données d’exposition des professionnels, le HCSP recommande de lever cette obligation vaccinale.
“En complément, il est nécessaire de renforcer les mesures de prévention primaire et secondaire avec un strict respect des mesures barrière, une amélioration du dépistage et du suivi médical, une réduction des retards à l’isolement du patient. Le médecin du travail a la possibilité de proposer au cas par cas une vaccination par le BCG en fonction de l’évaluation du risque d’exposition et de contamination“, explique le HCSP.
Le HCSP rappelle par ailleurs que les vaccinations des professionnels de santé, mais aussi des étudiants des professions de santé se justifient à la fois pour protéger les futurs soignants, en raison des contacts possibles avec des patients potentiellement contagieux, en particulier dans les établissements de santé, mais aussi pour protéger les patients d’une contamination soignant-soigné.
Toute obligation vaccinale induit des difficultés
Le HCSP justifie aussi sa recommandation par les difficultés et les réticences induites par la notion d’obligation.
L’instance souligne notamment que l’obligation peut avoir des conséquences sur l’emploi. “Une obligation vaccinale pour un professionnel peut entraîner, en cas de refus de la personne, une rupture du contrat de travail ou une impossibilité d’embauche, ou pour les étudiants, une impossibilité à commencer ou poursuivre des études dans la filière concernée par l’obligation“, explique l’avis.
“Toute décision de rendre ou de maintenir obligatoire une vaccination pour des professionnels de santé ne doit s’appliquer qu’à la prévention d’une maladie grave avec son risque élevé d’exposition pour le professionnel, un risque de transmission à la personne prise en charge et avec un vaccin efficace dont la balance bénéfices-risques est largement en faveur de son utilisation“.
Il existe de grandes disparités en Europe concernant le caractère obligatoire ou recommandé des vaccinations pour les personnels soignants. En Europe, la vaccination par le BCG chez l’adulte n’est obligatoire dans aucun pays. Elle est recommandée dans 7 pays dans certains groupes à risque, parmi les professionnels de santé en France et à Malte. Elle n’est pas recommandée dans 20 pays, et dans 2 pays il y a des recommandations spécifiques contre la vaccination des adultes par le BCG.
Cette disparité ne serait pas explicable par des différences entre pays sur l’efficacité des vaccins, leurs effets indésirables ou le niveau d’exposition des soignants.
M.S
Avis du HCSP. Extraits
Conformément au code du travail (art. R.4426-6), tout employeur peut recommander une vaccination aux salariés, après avis du médecin du travail, lui-même se référant aux recommandations du calendrier vaccinal. Un consentement éclairé est nécessaire (art. R.4127-36 CSP) et le personnel visé est en droit de refuser la vaccination.
L’incidence de la tuberculose dans la population générale est en baisse constante depuis 30 ans. Elle était en 2015 de 7,1 pour 100 000, et 5,2 pour 100 000 pour les formes pulmonaires (Données Santé publique France). Une confirmation bactériologique était obtenue dans 47 % des cas déclarés. Cependant, le nombre de cas de tuberculoses à bacilles multi (MDR)1 et ultrarésistants (XDR) a augmenté en France en 2012 et 2013 par rapport aux années antérieures, avec une tendance à la poursuite de l’augmentation en 2014.
Cette incidence moyenne masque de fortes disparités régionales et populationnelles, certaines populations ayant une incidence très élevée, atteignant en 2015, 202 pour 100 000 chez les immigrants arrivés en France depuis moins de 2 ans et 167 pour 100 000 chez les personnes sans domicile fixe (Santé publique France, données non publiées).
Plusieurs méta-analyses et revues de littérature ont montré que les soignants étaient plus à risque de contracter une tuberculose que la population générale.
Toutefois, la réduction de l’incidence de la tuberculose dans la population générale et l’amélioration des mesures de prévention de la transmission semblent porter leurs fruits et expliquent probablement la faible incidence de la tuberculose chez les soignants en France, selon des sources concordantes : Une étude menée auprès des médecins du travail de centres hospitaliers a mis en évidence une incidence de tuberculose maladie de 6 pour 100 000 pour les infirmiers et de 5,35 pour 100 000 pour les aides-soignants.
Les données de la déclaration obligatoire montrent que le nombre de cas de tuberculose maladie déclarés est relativement stable chez le personnel des établissements de santé, avec un nombre de cas annuel compris entre 98 et 126 entre 2012 et 2015 et une incidence inférieure à 10 cas pour 100 000 personnes dans ce milieu professionnel (Santé publique France, données non publiées).
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