Le collectif des infirmiers libéraux de Savoie a décidé d’interrompre les soins à domicile à partir du 16 septembre prochain. En cause : la remise en question du mode de facturation des indemnités kilométriques (IK), confirmée par le directeur général de la Cnamts hier, dans un courrier adressé aux syndicats Convergence infirmière, FNI et Onsil.
“Les kilomètres parcourus pour lesquels une demande de remboursement est sollicitée doivent correspondre aux seuls kilomètres effectivement réalisés et à la perte de temps subie par le professionnel de santé“.
Cet extrait de la lettre – datée d’hier -, du directeur général de la Cnamts, Nicolas Revel, en réponse aux sollicitations de trois des quatre syndicats d’infirmiers libéraux provoque déjà un vif mécontentement dans la communauté des infirmiers libéraux.
Les premiers concernés, ceux de Savoie, avant même d’avoir cette réponse, avaient réagi : ils cesseront les soins à domicile à partir du 16 septembre.
Rappel des faits
Pour mieux comprendre la situation, il faut rappeler le contexte.
En décembre 2015, la CPAM de Savoie avait demandé aux infirmiers libéraux de revoir la façon dont ils facturaient leurs indemnités horo-kilométriques, sous peine de sanctions et d’indus.
Il fallait que les infirmiers acceptent de facturer leurs IK en «kilomètres réellement parcourus» entre les patients alors que jusqu’alors ces derniers facturaient «en étoile». C’est à dire que pour chaque patient, un aller et un retour au cabinet étaient comptabilisés, même s’il n’y avait pas de retour «réel» au cabinet professionnel.
Les infirmiers ainsi que trois syndicats qui les soutiennent dans cette affaire, estiment qu’ils sont en droit de facturer ainsi leurs indemnités kilométriques. Car d’une part, selon eux, les autres professionnels de santé facturent de cette façon et, d’autre part, ces indemnités pour des kilomètres non réellement parcourus compensent la perte du temps passé en voiture. D’où le terme «indemnités horo-kilométriques».
Ils s’appuient aussi sur l’article 13 de la NGAP (Nomenclature générale des actes professionnels) qui mentionne que “l’indemnité du professionnel de santé est calculée pour chaque déplacement à partir de son domicile professionnel (…) sur le trajet tant aller que retour“.
Une interprétation qui divise
Si la nomenclature précise que l’indemnité Aller et Retour est due pour un déplacement, elle ne dit pas s’il en est de même lorsque le professionnel n’effectue pas le retour et qu’il se rend directement chez un autre patient, dans le cadre de sa tournée.
Pour les infirmiers libéraux concernés, c’est une évidence. Ils facturent et ont toujours facturés ainsi leurs déplacements.
Pour les tutelles, c’est plus compliqué. Car l’article 13 précise tout de même que les kilomètres doivent être facturés “en fonction de la distance parcourue“.
L’affaire, qui a commencé par une volonté de la CPAM de Savoie de revoir ce mode de facturation, est montée jusqu’à la CNAMTS, et même jusqu’au ministère de la santé.
En Juin dernier, Marisol Touraine, sollicitée pour répondre à cette question s’était exprimée.
“Les frais de déplacement du professionnel de santé sont remboursables en fonction de la distance réellement parcourue. Les frais de déplacement ne sont remboursés que dans le cas d’une visite dans une autre agglomération que le domicile professionnel et entraînant un déplacement de plus de 2 km en plaine et 1 km en montagne” expliquait la ministre, qui s’opposait ainsi à la facturation “en étoile” des professionnels. Selon elle, ce mode de facturation est issue d’une application “erronée” des règles de la nomenclature.
Demandant qu’un dialogue s’établisse entre les Caisses et les professionnels, et consciente de la perte financière occasionnée pour les professionnels, elle avait envisagé une aide spécifique pour les cabinets d’infirmiers libéraux.
Le problème devient national
La ministre avait alors provoqué un tollé et les syndicats en avaient appelé en juillet à Nicolas Revel, le directeur général de la Cnamts, craignant que les CPAM des autres départements s’alignent sur les décisions prises en Savoie.
Or la réponse de Nicolas Revel qui – tout comme Marisol Touraine – s’est exprimé en faveur des «kilomètres réels», ne plaît pas aux syndicats.
“La valeur de l’IHK a été négociée sur la base d’une facturation en étoile, c’est à dire sur un trajet aller-retour cabinet professionnel domicile du patient. De manière unilatérale, sans concertation avec les partenaires conventionnels, la Cnamts semble résolue à revenir sur les modalités de facturation en cours mais sans avoir le moins du monde anticipé les conséquences d’un tel positionnement” s’insurge la FNI sur son site.
De son côté, Nicolas Revel, dans son courrier, se dit “conscient” des “difficultés d’application posées par la rédaction actuelle de l’article 13 de la NGAP“.
Annonçant qu’un groupe de travail interne a été mis en place à l’Assurance Maladie, en vue de “réfléchir à l’évolution de ces dispositions, cet article concernant l’ensemble des professionnels de santé et non pas seulement les infirmières libérales“.
Une réunion de travail nationale, associant les représentants des syndicats ainsi que les services techniques en charge de ces sujets à la Cnamts, devrait avoir lieu dans les prochaines semaines.
Malika Surbled
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