Accueillir les intérimaires : AS, IDE, cadres, médecins, le rôle de tous!

Accueillir les intérimaires : AS, IDE, cadres, médecins, le rôle de tous!

Les agences d’intérim paramédical sont à présent bien installées sur le marché et tous les établissements hospitaliers sont ou ont étés amenés, à un moment ou à un autre à les solliciter pour trouver du personnel remplaçant. La qualité de la prestation de l’infirmier intérimaire dépend en grande partie de la qualité de l’accueil qui lui est réservé.

Dans une profession comme celle d’Infirmier Diplômé d’Etat, qui connaît une situation de pénurie dans certaines régions, et tout particulièrement en Ile-de-France, le recours à l’intérim est courant. Ce phénomène est amplifié par des impératifs économiques, politiques et par la nécessité de maintenir une offre de soins à la population.

Le personnel soignant des services est parfois dépassé par ces impératifs et ne comprend pas toujours les choix faits par le directeur d’établissement. Le recours au personnel intérimaire est onéreux, compliqué à organiser dans les services de soins car aussi compétents qu’ils soient, ces soignants intérimaires qui viennent parfois pour une première mission, n’ont pas la connaissance des habitudes de service, de l’environnement de l’établissement…

Dans le contexte tendu que connaissent les hôpitaux, le personnel soignant préférerait souvent que le directeur choisisse de fermer des lits, mais la fermeture de lits est très périlleuse. Fermer des lits implique une réduction d’activité qui elle même implique une réduction des moyens financiers accordés par l’Agence Régionale de Santé (A.R.S.) à l’établissement et donc une réduction du Tableau Prévisionnel des Emplois Rémunérés (T.P.E.R.).

Autrement dit, lorsqu’un hôpital ferme des lits même temporairement, il dispose de moins de postes l’année suivante. C’est une spirale que tous les hôpitaux cherchent à éviter. Pour certaines activités soumises à autorisation spéciale, le risque pour l’hôpital d’une fermeture temporaire de lits, est le retrait de cette autorisation et par conséquent la perte pure et simple de l’activité au détriment de la population.

Être intérimaire ne comporte pas que des avantages

Les intérimaires souffrent d’une mauvaise image. Apparentés à des mercenaires du soin, ils sont attaqués sur leur niveau de compétence jugé inadapté au besoin du poste. Mais ils sont aussi attaqués sur leur choix professionnel et leur niveau de rémunération. Outre les jalousies qui peuvent s’exercer, les infirmiers titulaires d’un service trouvent injustifié l’écart entre leur salaire et celui de l’intérimaire qui vient réaliser les mêmes taches. Sans compter que l’infirmier intérimaire abat moins de travail car on le dispense généralement de faire les soins directs les plus techniques et spécifiques ou les soins indirects comme les commandes de pharmacie ou de matériel.

Il est vrai que l’Infirmier intérimaire jouit d’avantages non négligeables qui l’ont conduit à faire ce choix d’exercice professionnel. Il est mieux payé, est maitre de son planning, il choisi ses lieux d’exercice… Au quotidien, il n’a pas à supporter le poids d’une organisation et d’une hiérarchie qui peuvent devenir pesantes dans le temps.

Néanmoins la place d’infirmier intérimaire n’est pas à la portée de tous. L’infirmier intérimaire est sollicité par des services en situation de crise. Au quotidien, ces professionnels de santé travaillent donc dans des organisations en mode dégradé. Ils doivent avoir la capacité à s’adapter à des environnements professionnels différents tous les jours. Il faut composer avec les personnes, les lieux, les organisations, les procédures, les outils (dossier patient informatisé…), les habitudes de soins, alors même que souvent, personne n’a pris le temps de montrer les lieux, d’expliquer les procédures principales, de présenter à l’équipe… Parfois, l’opposition de l’équipe soignante et son agressivité à l’égard de l’infirmier intérimaire conduit à des situations catastrophiques telles que l’abandon du poste par celui-ci !

Tout cela se passe au détriment  des conditions de travail de tous, mais surtout au détriment de la qualité des soins dispensés aux patients. Dans de telles situations, l’image de l’établissement est rapidement ternie, et il devient difficile d’obtenir à nouveau une aide extérieur. Cela peut aussi avoir un impact sur la capacité de l’établissement à recruter.

Accueillir les intérimaires : le rôle de chacun

Une fois que le besoin de remplacement par des infirmiers intérimaires est clairement établi, chacun peut s’interroger sur sa participation à l’accueil du remplaçant.

En amont de la demande à l’agence d’intérim, le cadre de santé mobilise son équipe pour expliquer cette stratégie de remplacement. La mise en avant du bénéfice pour l’équipe soignante et pour les patients d’obtenir une aide extérieur doit conduire chacun à accepter cette situation, et à être acteur dans l’adaptation de l’organisation. Une réflexion globale sur le poste proposé à l’infirmier intérimaire en partenariat avec l’agence d’intérim permet de mettre en adéquation les besoins du service avec les compétences des infirmiers intérimaires.

D’une façon générale, il est plus facile de trouver un infirmier qui acceptera de travailler en service de médecine cardiologique qu’un infirmier pour une Unité de Soins Intensifs en Cardiologie. Pour le personnel titulaire, cela implique de prendre les postes qui requièrent les compétences les plus techniques.

Toujours en amont de la demande, le Cadre de santé communique la description du poste à l’agence d’intérim. Cette communication peut se faire par le biais d’une plaquette de présentation du service qui détaille la composition de l’effectif présent le jour de la mission, les pathologies rencontrées, le profil des patients, et enfin la description d’une  journée type dans le service. L’infirmier intérimaire choisis alors de réaliser la mission en connaissance de cause. Par nature, l’inconnu est anxiogène, cette communication permettra à l’infirmier intérimaire d’être plus serein lors de sa prise de poste.

Le jour de la prise de poste, le travail peut être organisé avec anticipation. Des choses simples telles que préparer les documents nécessaires pour l’envoi des prélèvements sanguins programmés, préparer le dossier du patient qui est attendu en examen dans un autre service ou dans un autre établissement, permettent de faciliter la prise de poste pour l’infirmier intérimaire. Les infirmiers titulaires du service ont souvent bénéficié d’une période d’intégration pour apprendre à réaliser ces soins indirects. Il serait déplacé de leur part de reprocher à la personne qui les réalise pour la première fois de ne pas le faire correctement.

L’accueil de l’infirmier intérimaire est un élément majeur. Même si il s’agit d’une période de crise, de ras le bol pour les titulaires du service, la convivialité et le sourire participent grandement à la satisfaction du remplaçant. Ne pas le laisser attendre dans un couloir jusqu’à ce que quelqu’un daigne s’occuper de lui est essentiel. Les professionnels soignants savent ce qu’accueillir signifie et ils le montrent tous les jours à leurs patients et aux familles, ils devraient donc être en mesure de l’appliquer dans cette situation (présentation de l’équipe, des lieux, des ressources telles que les procédures…).

La qualité des transmissions infirmières est bien entendu essentielle. Les transmissions orales seront plus détaillées lorsqu’elles s’adressent à un remplaçant qu’à un titulaire qui était déjà présent la veille.

Par ailleurs, l’idée de proposer un référent auquel l’infirmier intérimaire peut s’adresser en cas de difficulté est souhaitable. Ce référent est à priori un cadre de santé ou un infirmier, mais lorsque ce n’est pas possible, des aides-soignants chevronnés peuvent assumer cette responsabilité dans la limite de leurs compétences. Le cadre de santé a un rôle en matière de représentation de l’établissement. Son passage dans l’unité limite le sentiment de solitude et d’abandon du professionnel qui pourrait se sentir perdu.

Tous ces éléments participent à la bonne prise en charge des patients, à la satisfaction de tous les professionnels titulaires ou intérimaires, et à l’image de marque de l’établissement.

Julien Pouvesle – Cadre de santé