Crise sanitaire : la coordination des infirmiers libéraux non rémunérée

Au cœur de la gestion de la crise sanitaire de la Covid-19, les infirmiers libéraux semblent aujourd’hui en payer les frais. Quid de leur rémunération pour la coordination de l’organisation des soins dans les territoires ?

Crise sanitaire : la coordination des infirmiers libéraux non rémunérée

A Alès (Gard), ce sont les médecins généralistes de l’Association pour la promotion de la médecine générale (APMG) qui ont souhaité la création d’un Centre Covid-19 afin d’y réorienter leurs patients contaminés.

La maison médicale de garde a donc été transférée, le temps de l’épidémie, dans un gymnase, afin d’y recevoir les patients suspects ou infectés. « Les médecins sont venus nous voir et nous ont demandé, en tant qu’Association des infirmiers libéraux du bassin alésien (Ailba), de participer à la prise en charge des patients », fait savoir Dominique Jakovenko, infirmier libéral et président d’Ailba. 

Les missions des infirmiers libéraux

Les infirmiers libéraux (idels) ont rempli trois missions au sein du centre Covid-19, qui a fermé ses portes le 28 mai.

Tout d’abord, l’accueil, l’organisation de l’arrivée des patients et leur orientation en fonction de leur état de santé. Puis, le remplissage d’un document transverse aux urgences de la clinique et de l’hôpital, ainsi qu’aux médecins généralistes et aux infirmières du centre Covid-19 composé de quatre volets : renseignements administratifs, antécédents médicaux, signes cliniques et constantes prises par les infirmiers.

Enfin, en fonction de la prescription du médecin, le suivi en télésoin ou en présentiel au domicile du patient pour s’assurer que sa situation ne s’aggrave pas.

Une vingtaine d’idels ont accepté d’être d’astreinte à l’accueil du centre Covid-19 et environ 75 ont été volontaires pour assurer le télésuivi ou la consultation en présentiel au domicile des patients, en dehors de leur tournée.

Du 11 mai au 28 mai, les idels ont aussi assuré les tests PCR sur prescription médicale et sur rendez-vous, au centre de prélèvement. « Une trentaine de volontaires ont rempli cette mission à laquelle nous avons été formés par un laboratoire de biologie médicale », précise Dominique Jakovenko.

Une coordination de chaque instant

Pour l’organisation de cette prise en charge, les idels ont joué un rôle majeur. La coordination d’Ailba a créé une ligne téléphonique et une adresse mail Medimail sécurisée dédiées.

Pendant trois mois, quatre infirmières qui se sont relayées sept jours sur sept pour fluidifier et sécuriser les interventions.

Les infirmières de coordination ont fourni 380 heures de travail, de même que pendant les 67 jours d’ouverture du centre Covid, les idels, sur leurs jours de repos, ont assuré 850 heures de présences, d’astreintes et de vacations. Elles ont aussi récupéré et distribué le matériel de protection issu des dons pour 400 infirmiers.

« Tout ceci est tracé selon la quantité et représente 400 heures de disponibilité », informe le président d’Ailba. Cette même coordination infirmière a organisé la mise en place et la réalisation des prélèvements PCR sur site dédié. L’ensemble de ce travail a permis de faire le relai avec les médecins de ville, les laboratoires et l’hôpital.

Absence de rémunération

Pour la réalisation des actes techniques, les idels ont été rémunérées par l’Assurance maladie.

Mais là où le bât blesse, c’est que la rémunération de la coordination assurée par les infirmiers « est toujours en discussion avec l’Agence régionale de santé (ARS) ».

Dominique Jakovenko a rappelé dans un courrier à l’ARS le travail effectué par les idels à l’occasion de la crise sanitaire et demandé une rétribution. « Mais l’ARS ne semble pas vouloir nous financer notre travail », dénonce-t-il.

Et de poursuivre : « Pour le moment, il semblerait qu’une somme va être versée à l’APMG mais nous ne savons pas combien. Et le montant serait apparemment basé sur un temps infirmier et un temps médical, ce qui ne correspond pas à la réalité… Les temps de présence infirmière suscités par la crise sanitaire sont non valorisés à ce jour, ce qui laisse une démotivation inhabituelle des infirmières libérales.»

Il dénonce un bénévolat organisé. « On nie de nombreuses heures que nous avons effectuées. Sans compter qu’aujourd’hui, nous assurons des permanences au centre hospitalier et au laboratoire de biologie médicale quotidiennement pour faire les prélèvements. Les actes sont payés, mais la coordination… »

Laure Martin

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actusoins magazine pour infirmière infirmier libéralPour aller plus loin (abonnés) : Lire notre article « Covid-19 : les idels au coeur d'actions locales » dans le numéro 37 d'Actusoins (juin, juillet, août 2020). 

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