Théâtre : La vie d’une infirmière en hôpital psychiatrique, mise en scène à Paris

La vie d’une infirmière, à l’étroit entre les murs de l’hôpital psychiatrique, et son envol vers une autre vie est mise en scène à Paris, dans un petit théâtre montmartrois.

Théâtre : La vie d'une infirmière en hôpital psychiatrique, mise en scène à Paris« Quand je vois passer les gens, tous les gens dans la rue, un par un ou en foule, je les vois avec leur cage individuelle, leurs barreaux portatifs. C’est un ballet lugubre et triste. Il n’y a que les enfants qui n’en ont pas. »

Sur la scène, une comédienne s’habille, se déshabille, change de personnage à un rythme effréné. Elle se présente comme enfermée et on pourrait d’abord la croire patiente internée, mais non, c’est l’infirmière d’un service de psychiatrie.

Prune Lichtlé incarne Anna, protagoniste du roman Le journal fou d’une infirmière, publié pour la première fois en 1975. L’auteure de l’ouvrage, Anne-Xavier Albertini, a en effet exercé 10 ans les soins infirmiers en hôpital psychiatrique, à La Timone (Marseille), avant de devenir journaliste puis écrivain.

La comédienne connait l’œuvre et son auteure de longue date. « J’ai lu le livre il y a douze ans, mais je ne me sentais pas alors suffisamment mature pour jouer tous ces personnages. » En 2018, elle reprend l’ouvrage et se lance dans une adaptation pour la scène. « Ce texte est percutant, il faut vraiment que tout le monde l’entende, justifie l’artiste. Notamment tout ce qu’elle aborde à propos du travail. »

Anna raconte son univers professionnel, dresse les portraits des patients qu’elle côtoie, grands criminels ou névrosés plus « classiques », mais aussi ceux des soignants, de la surveillante générale – toujours un peu acariâtre – à l’interne un peu trop pédant.

C’était dans les années 1960, alors que la profession prenait tout juste la relève des religieuses. Cela s’entend dans la pièce avec ces patients qui font eux-même le ménage. C’était encore l’époque des dortoirs et de la menace de l’aiguille.  « Si tu ne prends pas ton médicament tu auras la piqure. » Celle de la blouse blanche et des « cellules » punitives. Celle aussi des premières infirmières débarquant dans des « services d’hommes ». « Il nous fallait cacher nos cheveux et porter des chaussures plates pour pouvoir courir. »

Mais Anna décrit également sa vie de femme divorcée, de mère, de compagne et les multiples aliénations qui l’accaparent. L’impossibilité de prendre soin de soi, le questionnement sur ses habitudes, son sentiment de culpabilité, ses responsabilités… Son rapport au travail enfin, « prisonnière du besoin de gagner sa vie. » Et l’actualité du texte saute alors au visage du spectateur. L’obligation de travailler, toujours, même au risque de sa propre santé, en étant « mal payée » pour jouer les chiens de garde.

Car toute la pièce s’avère finalement l’histoire d’une lente libération, celle de l’auteure. « Ils m’ont appris à déchirer ma camisole », proclame-t-elle à propos de ses patients. La modernité et la justesse du jeu de la comédienne entrainent l’adhésion du public. On rit, parfois jaune, on s’indigne et expérimente avec Anna les limites de sa condition et le bonheur de les repousser.

La pièce se joue à Paris jusqu’au 5 mai. Elle pourra ensuite également être jouée en province. Peut-être pour commencer dans les Alpes maritimes, où un établissement psychiatrique a déjà sollicité la comédienne.

Sandra Mignot

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Le Journal fou d'une infirmièreLe Journal fou d'une infirmière 

Auteur : Anne Xavier-Albertini/ adaptation Prune Lichtlé

Mise en scène :  Thierry Jahn

Interprète : Prune Lichtlé

 

Tous les mardis, au Théâtre Montmartre Galabru, 4 rue de l’Armée d’Orient, Paris 18, 20 h.

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